En Haïti, au moins 40 morts après l’incendie d’un bateau de migrants – Libération

Selon l’OIM, l’extrême violence à laquelle est confronté le pays des Caraïbes ces derniers mois «n’a fait qu’inciter les Haïtiens à recourir encore davantage à des mesures désespérées» pour fuir leur territoire.

Une tragédie qui illustre l’ampleur de la crise qui frappe Haïti. Mercredi 17 juillet, au moins 40 migrants sont morts après que leur bateau a pris feu au large du pays, a annoncé deux jours plus tard l’Organisation internationale pour les migrations (OIM). Selon des témoins, l’incendie s’est déclenché lorsqu’un passager a allumé une bougie pour réaliser un rituel vaudou alors qu’il y avait de l’essence à bord, a fait savoir un porte-parole de la police haïtienne. Lors de la traversée, de telles cérémonies sont parfois pratiquées par les migrants prenant la mer, dans l’espoir de se protéger et d’éviter les garde-côtes.

Le bateau, qui transportait «plus de 80 personnes», était parti mercredi de Labadie, une station balnéaire dans le nord d’Haïti, et se dirigeait vers les îles Turques-et-Caïques, un archipel situé à 250 kilomètres de là, selon l’OIM. Sur l’ensemble des passagers, seuls 41 migrants ont pu être secourus par les garde-côtes haïtiens, avant d’être pris en charge par l’agence onusienne.

Les recherches se poursuivent

Depuis, onze personnes ont été transportées à l’hôpital pour être soignées, notamment pour des brûlures, a déclaré l’agence onusienne. Sept blessés sont dans un état grave, a ajouté Arold Jean, porte-parole de la police haïtienne du département Nord, qui a décrit un «incendie suivi d’une explosion». «Les recherches se poursuivent dans l’objectif de retrouver d’autres survivants», a souligné le porte-parole, précisant qu’une enquête avait été ouverte pour «identifier et démanteler les réseaux qui organisent ces voyages clandestins».

Selon l’OIM, le drame reflète une fois de plus les problèmes présents dans le pays le plus pauvre des Amériques, miné par les gangs et l’insécurité, et où des centaines de milliers de personnes sont déplacées. «La situation socio-économique d’Haïti est à l’agonie. L’extrême violence de ces derniers mois n’a fait qu’inciter les Haïtiens à recourir encore davantage à des mesures désespérées» pour fuir leur territoire, a réagi dans un communiqué Grégoire Goodstein, chef de mission de l’OIM dans le pays.

Une augmentation du nombre de départs par bateau

Depuis des années maintenant, le pays des Caraïbes est enlisé dans une crise économique, politique et sécuritaire, exacerbée par la violence des gangs qui contrôlent 80 % de la capitale et des grands axes du pays. La situation s’est encore aggravée en début d’année, lorsque les gangs ont décidé d’unir leurs forces pour renverser le Premier ministre de l’époque, Ariel Henry.

Face à la multiplication de ces attaques fin février, les garde-côtes du nord d’Haïti ont constaté une augmentation du nombre de déplacés internes et de départs par bateau de migrants, affirme l’OIM. «Le manque d’opportunités économiques, l’effondrement du système de santé, les fermetures d’écoles et l’absence de perspectives poussent de nombreuses personnes à considérer la migration comme le seul moyen de survie», analyse l’organisation. Et ce malgré le fait que, d’après l’OIM, plus de 86 000 Haïtiens ont été contraints de revenir dans l’île depuis le début de l’année.

Depuis la démission d’Ariel Henry début mars, les autorités transitoires qui le remplacent doivent s’atteler à remettre le pays sur pied, avec l’appui d’une mission multinationale soutenue par l’ONU et menée par le Kenya. Mais leur tâche sera immense, dans un pays en proie à la violence et à la corruption, et qui n’a pas de président depuis l’assassinat de Jovenel Moïse, en 2021.

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