C’est un témoignage rare… Elle s’appelle Eva et a 25 ans. Elle est l’auteur d’un podcast où la question de grandir sans la présence de son père est posée. Un podcast qui transforme ce manque en acte de dire et de création. Une démarche émouvante qui fait écho auprès d’une jeunesse en quête de repères.
En Guadeloupe, la représentation du père absent est courante, avec des conséquences négatives sur le développement émotionnel et cognitif des enfants, tandis que les mères sont souvent idéalisées et portent la charge familiale. À 25 ans, Eva Francillette a souhaité mettre sur le devant de la table ce sujet tabou dans notre société à travers la création d’un podcast nommé « Sans père – Echange non conventionnel ».
C’est une minute durant laquelle j’explique comment on vit nous, les enfants, qui n’ont pas grandi avec cette figure paternelle. Comment on le vit au quotidien, comment en faire le deuil, comment passer outre et avancer avec cette charge, qui, finalement, est lourde à porter.
Eva Francillette, autrice du podcast « Sans père »
Dans son podcast, le propos est clair, structuré, mais sur le visage de cette jeune femme, la petite fille crie son manque de père et de repère.
On a essayé plusieurs fois de créer une relation, tenter des choses à différentes périodes de ma vie, à différents âges et chacune de ces tentatives se sont soldées par un échec malheureusement.
Eva Francillette, autrice du podcast « Sans père »
Eva, serait-elle la voix des enfants sans-voix sans père car son podcast semble en témoigner. Aujourd’hui, la jeune femme a grandi. Cette absence est devenue source de sens.
A chaque fois qu’on sort de là, on y va et on a le coeur gonflé quelque part parce qu’on a de l’espoir et quand on repart, on est pire que la fois d’avant parce que l’espoir est toujours plus grand mais la déception aussi est toujours plus grande. Et d’ailleurs, je le dis à un moment dans le podcast : « Je n’aurais rien de toi si ce n’est l’image d’un antillais à l’ancienne caché derrière ses persiennes ». Et le mot « persienne » est très bien choisi parce que j’aurais pu mettre « fenêtre » mais la persienne est plus symbolique parce qu’on y est vraiment bien caché et personne ne peut nous voir. Il n’y a que ces infimes espaces parce que vous avez trop honte.
Eva Francillette, autrice du podcast « Sans père »
En Guadeloupe, les familles monoparentales font dorénavant office de norme avec des enfants, des jeunes qui cherchent et recherchent le lien avec leur père.
Quand vous rencontrez un homme, qui plus est antillais, qui n’a pas grandi avec son père mais en l’occurence avec sa mère et qui a fait de lui cet enfant royal dont la mère ferme les yeux sur beaucoup de choses, ce garçon, quand il rencontre une fille, qui elle, n’a pas eu son père, et bien elle ne veut pas. Aussi, j’ai des amis qui ont tellement voulu faire abstraction de toute ressemblance, de toute appartenance, qui ont, soit changé de nom, beaucoup de gens le font, ou même vont plus loin et ont souhaité changer leur apparence physique, une part de leur visage qui était apparemment signe d’appartenance à leur père.
Eva Francillette, autrice du podcast « Sans père »
Eva a fait de ce vide un tremplin. Et voici son message de fin : « Tous ceux qui en ressentent le besoin, il faut en parler, libérer la parole dessus. Si ça peut vraiment ouvrir des portes et qu’on en parle, c’est le principal ».
Pour suivre et écouter le podcast d’Eva Francillette, rendez-vous ici.
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