AboPlus grand que l’ASF
Trop âgé pour la Suisse, Dominique Blanc vise un siège à l’UEFA
À 75 ans, le président sortant de l’Association suisse de football brigue une place au comité exécutif de l’UEFA. Pour finir en beauté.

Dominique Blanc quittera ce printemps la présidence de l’Association suisse de football.
AFP
- Dominique Blanc quittera la présidence de l’Association suisse de football ce printemps.
- Il ambitionne de rejoindre le comité exécutif de l’UEFA en avril.
- Ses thèmes de prédilection sont le football pour tous et toutes et les droits de l’homme.
- Il estime que son expérience est un atout stratégique pour l’UEFA.
C’est un homme au calendrier bien chargé qui nous rencontre dans un café à Lausanne. Dominique Blanc commente en quelques mots les matches de Coupe de Suisse de la semaine, avant d’attaquer le cœur de l’entrevue.
À 75 ans, le président de l’Association suisse de football nourrit encore des ambitions. Comme celle de gagner le comité exécutif de l’UEFA. Il s’inscrit comme l’un des onze candidats visant une des sept places d’un mandat de quatre ans lors des élections du 3 avril.
D’où vient cette idée de candidature au comité exécutif?
La première raison, c’est que je suis président de l’ASF depuis maintenant six ans. J’ai rencontré beaucoup de gens, et je pense qu’il est temps qu’un Suisse retrouve le comité exécutif de l’UEFA, car nous n’avons plus de représentant depuis le départ de Peter Gilliéron. En ce qui me concerne, ce serait l’occasion de finir en beauté.
Après avoir commencé dans une région, puis m’être occupé de structure suprarégionale puis fédérale, je me dis: pourquoi pas? Je suis motivé, parce que je me dis que je peux encore servir le football. Je peux encore lui apporter quelque chose à ce niveau. De plus, je ne suis plus éligible à l’ASF en raison de mon âge, mais le plafond n’existe plus à l’UEFA.
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N’étiez-vous pas de ceux qui avaient soutenu la limite d’âge à l’ASF?
C’est vrai, j’y ai participé.
N’est-il pas ironique de profiter de l’abolition de cette barrière à l’UEFA?
C’est intéressant, car nous avions entamé tout un travail de réformes à l’ASF. Nous avions augmenté le nombre de places au comité central, nous avions aussi introduit un quota pour avoir un minimum de deux personnes de chaque genre.
Une autre de ces révisions consistait à installer des limites de mandat et des limites d’âge. Cela se faisait un peu partout, y compris à l’UEFA. On peut discuter de ce qui était juste ou pas, mais je ne m’y suis pas opposé malgré le fait que j’étais le premier concerné. Puis, l’année d’après, l’UEFA a changé ses statuts et aboli cette limite d’âge.
Comment éviter une trajectoire comme celle de Joe Biden?
(Il rit.) C’est une bonne question, mais je pense que je ne suis pas comparable à lui actuellement. Si ça vient, j’espère que j’en serai conscient assez vite.
Que pensent vos proches de cette candidature?
Cela leur plaît beaucoup. Parce que c’est quelque chose de stimulant, et qu’ils m’ont toujours très bien soutenu. Il y a des milliers de personnes qui s’engagent pour des causes qui leur tiennent à cœur, qu’elles soient sportives, artistiques ou purement sociales.
L’expérience que vous avez en tant que président de l’ASF s’inscrit-elle comme un avantage?
Sur le papier, on pourrait se dire qu’à 75 ans il faut laisser la place aux jeunes. Je le comprends parfaitement, mais il faut aussi voir que les grandes organisations choisissent généralement des gens qui ont du temps et de l’expérience sur le plan stratégique.
En quoi l’Euro 2025 vous a-t-il permis de nouer des liens avec les instances européennes?
Cet événement nous oblige à être proches. Nous avons même une société commune. Je suis également membre de différentes commissions à la FIFA et à l’UEFA, dont celle des droits de l’homme et du développement durable. Je suis aussi dans le comité de la Fondation pour l’enfance.
Des thèmes assez porteurs…
(Il acquiesce.) Ce sont des thèmes très sensibles, qui sont toujours d’actualité. Il y a longtemps que je m’engage pour ça.
Pourquoi prétendre à une place au comité exécutif alors que vous siégez déjà dans tant de commissions?
Le comité exécutif prend les décisions exécutives: l’organisation des compétitions, le choix des villes pour les finales, tout ce type de choix.
Il y a seize membres en plus de deux membres des ligues professionnelles. Si je compare l’agenda à celui de l’ASF, il s’agit du même à quelques différences près. Toutes les commissions livrent leurs rapports au comité exécutif, qui se charge de mettre en place les principes stratégiques décidés au congrès.
Les personnes qui n’ont pas travaillé dans ce type d’organisation ne se rendent pas forcément compte de la quantité de travail effectué en amont. Une fois réunis, les dés sont pratiquement jetés, car tout a été anticipé dans les commissions ou en coulisses.
Quels sont les grands chantiers de l’UEFA dans les années à venir?
Pour moi, l’UEFA doit d’abord servir le football dans la philosophie qui l’a accompagnée jusqu’à maintenant. Nous vivons dans une période très instable. Guerre en Europe, au Proche-Orient, pratiquement chez nous. Nous voyons des actes de terrorisme ou des attentats, en plus d’une guerre économique déclenchée par Donald Trump et une grande instabilité dans beaucoup de pays en Europe.
Quelle est la réponse du football? Nous avons davantage de licenciés, nous n’avons jamais connu un tel développement, en Suisse comme ailleurs. Cela signifie que le football est un bon placement, une valeur refuge. Si nous investissons dans le football, nous investissons dans la société.
Comment cela?
Mon premier passeport avec la photo était celui de football. Cela signifie beaucoup pour moi, mais aussi pour beaucoup d’entre nous. Il a vraiment été un fil rouge, et je continue d’y croire parce que j’ai vu les bienfaits qu’apporte ce sport autour de moi. Il représente une grosse contribution sociale, même si tout n’est pas parfait.
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Justement, l’UEFA est souvent accusée d’être déconnectée des talus. Pourquoi vous attire-t-elle?
L’UEFA distribue beaucoup. Elle a reversé 308 millions d’euros aux clubs ne participant pas à ses trois grosses compétitions (ndlr: la Ligue des champions, la Ligue Europa et la Conference League). Un de mes objectifs porte sur la solidarité, et c’est pour cela que je veux rejoindre le comité exécutif. J’ai ces convictions depuis que je suis entré dans le football, je crois au principe de solidarité.
Je vois que la FIFA et l’UEFA sont critiquées car elles génèrent des milliards. Nous avons aussi l’image de ces joueurs beaucoup trop payés. Il s’agit de l’offre et de la demande, et il s’agit surtout d’une partie infime du bassin de joueurs.
Vous parliez de vos rôles dans des commissions liées aux droits de l’homme. Comment aborder ces questions politiques au sein de l’UEFA?
Je pense que le football doit rester apolitique. C’est un fondement. Je ne dis pas qu’il n’y a pas de politique sportive, mais le football doit passer au-dessus.
Souvent, le dernier endroit où l’on se parle avant une guerre est le premier où l’on se reparle ensuite. C’est le football. Il permet de garder des portes ouvertes lorsque les autres sont fermées. Il représente un puissant instrument de paix, même s’il a ses limites.
L’UEFA est active, et le président Aleksander Ceferin a lui-même lancé un groupe de travail pour étudier la candidature de l’Arabie saoudite en tant qu’hôte de la Coupe du monde de la FIFA.
Parce qu’il est mieux d’avoir ces pays dans la poche plutôt que de les exclure?
Je suis convaincu que le football reste un instrument de dialogue. Bien sûr qu’il peut être instrumentalisé, mais on a pu voir au Qatar – même si l’on a atteint la moitié de tous les objectifs fixés en matière des droits de l’homme – qu’il y avait matière à accélérer les changements. On voit les progrès dans le dialogue avec les Saoudiens.
Lorsque nous avons soutenu leur candidature, nous avons recommandé d’accepter de leur attribuer la Coupe du monde tout en gardant des signaux d’alertes. L’idée étant que certains critères doivent être mis en œuvre, et vérifiés par des organisations internationales neutres, sous réserve de réviser le jugement.
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Ne serait-il pas plus logique d’avoir une ligne rouge, qui fait qu’un pays qui ne remplit pas les critères ne puisse pas se voir octroyer un grand événement?
Ce n’est pas l’intention. S’il fallait organiser la compétition maintenant, les conditions ne seraient pas remplies. Mais nous avons dix ans pour y parvenir. Les Saoudiens eux-mêmes ont reconnu qu’il s’agissait d’un défi qu’ils devaient relever. Sur la base de ce que l’on a pu voir, lire, entendre et faire signer, on a confiance. Les engagements pris sont vraiment très forts, et seront appliqués très rapidement.
La confiance était-elle la même pour le Qatar?
Le Qatar était dans une situation différente, car la Coupe du monde leur a été attribuée en 2010, lorsque ces exigences n’existaient pas dans le cahier des charges. Nous avons fait ce que nous pouvions pour rattraper certaines situations. Le dossier des dédommagements aux travailleurs blessés est d’ailleurs toujours ouvert.
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