La campagne officielle en vue de la présidentielle du 12 avril débute ce samedi 29 mars au Gabon. Huit candidats seront en lice, dont le chef de la transition, le général Brice Clotaire Oligui Nguema. Il a lancé pour la campagne le « rassemblement des bâtisseurs » pour sortir du cadre de l’ex-parti au pouvoir PDG. Pourtant, il n’hésite pas à revendiquer l’héritage d’Omar Bongo, dont il fut l’aide de camp pendant huit ans. Comme l’ex-président, à qui il est apparenté, Brice Clotaire Oligui Nguema vient de la province la plus orientale du pays, le Haut-Ogooué. Mais à Franceville, chef-lieu de la province, comme ailleurs au Gabon, les avis sont partagés sur cette succession, entre rupture et continuité.
De notre envoyé spécial de retour de Franceville,
Au moment de notre passage à Franceville, nous sommes à plus d’un mois de la campagne officielle. Pourtant, impossible d’ignorer que le chef de la transition sera bientôt candidat. Le général Oligui Nguema s’affiche sur tous les boulevards, et les rassemblements d’associations de soutien, créées pour l’occasion, se multiplient. En ce samedi début mars, plusieurs centaines de femmes en t-shirts blancs comme Imelda, une infirmière en formation, ont été convoyées des localités du Haut-Ogooué.
« On veut qu’ils posent sa candidature pour voter pour lui, parce qu’on voit déjà ce qu’il fait. Ça lui prouve déjà qu’il a l’amour de la population et il a pitié de la jeunesse. (…) Il change, il construit. On a vu comment il construit déjà les maisons, les routes, surtout dans mon village. On voit les merveilles qu’il fait déjà là-bas. Ça me prouve déjà qu’il adore sa population. »
Ornières bouchées, nouveaux boulevards terrassés, façades en réfection, écoles réapprovisionnées… Les marques du CTRI, le Comité militaire qui a renversé Ali Bongo, sont partout à Franceville. Dans les collines environnantes, les nouvelles villas fleurissent et les projets laissés en suspens reprennent. Mais tout le monde n’est pas convaincu par la frénésie de béton qui a gagné la transition.
« Ce sont des opérations de charme »
Guy-Roger Mangonda est professeur dans un lycée de la ville : « À chaque période électorale, on a souvent vu la même chose. Ce sont des opérations de charme. Ali Bongo, quand il est arrivé, disait qu’il était un bâtisseur. Il a commencé à faire ce que M. Olivier est en train de faire, et après, on a compris que ce n’était pas finalement un bâtisseur. Les gens qui ont accompagné Bongo père, ce sont les mêmes qui ont accompagné Bongo fils. Ce sont les mêmes qui accompagnent Oligui. Et pourtant, M. Oligui a dit que ce sont eux qui ont fait tomber le Gabon. Il n’y a rien qui est restauré. »
Un constat que partage Marcel Libama. Leader syndical, député de la transition, il espérait lui aussi une rupture plus nette : « Mais à l’évidence, nous nous rendons compte qu’il y a une continuation. Ce sont les mêmes choses, les mêmes façons de faire, les mêmes réflexes. Donc, il y a un paradoxe entre ce qui se passe sur le terrain et la gestion, les gestionnaires du pays. Ça nous laisse pantois, dubitatif. Et on s’est dit, »mais qu’est-ce ce qu’on veut ? ». »
Malgré ses réserves, et comme la quasi-totalité des cadres de l’ancien pouvoir, des ex-opposants et des figures de la société civile, Marcel Libama a intégré la campagne Oligui Nguema dans le Haut-Ogooué.
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