Guinée: tantôt salée et redoutée, parfois douce mais capricieuse, quand l’eau dicte sa loi aux riziculteurs

Nous sommes dans un domaine agricole de plusieurs hectares, non loin de la capitale Conakry. Ici, tout le monde se prépare à la saison des pluies. Les terres ont été défrichées en prévision de l’installation de la culture du riz. A la plantation, le problème de l’eau se pose doublement aux riziculteurs: l’eau salée de l’océan et celle l’irrigation.

«En saison sèche, lorsque le riz a été récolté, l’intrusion d’eau salée dans les périmètres rizicoles apporte des éléments nutritifs, empêche le développement de mauvaises herbes et diminue l’acidification des sols qui aurait eu lieu sans intrusion salée». L’eau de mer jour alors un rôle bénéfique pour la riziculture comme le rappelle les auteurs de cette étude intitulée «En Guinée, les vertus du riz de boue qui pousse dans les mangroves», parue en janvier 2024.

Mais la situation change du tout au tout au moment de la plantation, cette eau océane peut se révéler désastreuse, poursuivent les auteurs de cet article: «En saison des pluies, le dessalement de la rizière se fait par submersion d’eau douce ; puis le riz est planté et protégé de l’océan Atlantique par des digues construites souvent manuellement à cet effet».

Il faut connaître et adapter certaines techniques pour que la période très attendue ne se transforme pas en désastre, confie Mamadou Sadio Bah. «Pour mettre les digues, il faut s’y prendre dès le mois d’octobre, car l’eau salée revient. Et si l’eau salée rentre dans ton champ de riz, c’est fini. Et puis chez nous, nous travaillons à la main. C’est très difficile», reconnaît-il.

Et si la construction des digues n’est pas faite correctement, il y aura de l’eau «mais pas celle souhaitée, celle de la mer. Et ce n’est pas un bon ingrédient pour la culture du riz», confie Mamadou Sadio Bah. «Vous voyez ces digues, elles sont très utiles. Actuellement il n’y a que de l’eau salée. Ces travaux permettent d’évacuer l’eau de mer afin de faire place à l’eau de pluie».

En contrebas, nous retrouvons Niémé Koivogui qui a mis au point une technique plus simple: trouver des domaines cultivables selon les saisons. «S’il n’y a pas de pluie, on se déplace plus en bas car même s’il n’y a pas de pluie, on peut trouver de l’eau pour les plantes. Mais si on voit que la pluie tombe, nous retournons en hauteur, sur la terre ferme, pour travailler».

Cette année, la saison pluvieuse est tardive et Conakry vit toujours sous une forte chaleur. Et les paysans exploitent une terre aride et sèche.

Par Mamadou Mouctar Souaré (Conakry, correspondance)

Le 16/05/2024 à 10h57

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