Haïti: après la population, les gangs s’en prennent aux médias

La capitale haïtienne Port-au-Prince est en proie à une nouvelle flambée de violences depuis deux mois, les gangs multipliant les attaques dans les quelques quartiers qu’ils ne contrôlent pas encore. La capitale serait sur le point de tomber. Et parmi les cibles des groupes armés, il y a la presse : ces derniers jours, trois médias ont été attaqués.

Le 13 mars dernier, l’attaque dont a été victime Radio télévision Caraïbes pendant la nuit est à la une des médias haïtiens. Les locaux historiques étaient vides depuis plus d’un an. Par mesure de sécurité, les équipes s’étaient installées dans une zone plus calme. Mais le bâtiment contenait encore des équipements et surtout, c’est une institution qui a été prise pour cible : il s’agit de l’un des plus vieux médias haïtiens et l’un des plus suivis.

Quand il découvre les images de l’incendie sur internet, Michel Joseph, co-directeur de la salle des nouvelles de Radio Télévision Caraïbes, est secoué : « C’est un mélange de colère, de tristesse et d’impuissance. Colère, parce que c’est une attaque directe contre notre mission de tenir le public informé dans un contexte où l’accès à l’information est vital. Tristesse, parce que ce bâtiment chargé d’histoire représente des décennies de travail acharné et de dévouement pour la vérité. Et en fin, je veux parler d’un sentiment d’impuissance face à la violence croissante qui semble ne pas épargner même ceux se battent pour donner une voix aux sans voix aujourd’hui en Haïti. »

La même nuit, les gangs ont aussi incendié la radio Mélodie FM. Trois jours plus tard, c’est Télé Pluriel qui est saccagée, même les toilettes sont détruites. 

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Pour Michel Joseph, les gangs savent très bien ce qu’ils font : « Attaquer les médias et attaquer Radio télévision Caraïbes notamment, qui est un média très puissant, c’est envoyer un message très fort. Si on réduit les journalistes au silence, la population n’aura pas accès à l’information. Et les bandits pourront établir leurs lois comme bon leur semble. Trois médias en une semaine, ça démontre la montée en puissance des gangs en Haïti.»

« Radio Télévision Caraïbes, qui comme un roseau plie, mais ne casse pas », résume un de ses journalistes : pas question de baisser les bras après ces attaques, insiste Michel Joseph. « Non, on ne peut pas aujourd’hui arrêter parce que la presse reste le dernier rempart de la démocratie. Oui, certaines fois on est on bord du découragement, on n’a pas abandonné ».

Ces attaques n’ont fait que des dégâts matériels. Mais en décembre dernier, alors qu’ils couvraient la réouverture d’un hôpital, deux journalistes haïtiens ont perdu la vie sous les balles des gangs, sept autres ont été blessés.

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