Interview/SEM. Assiélou Félix Tanon, Ambassadeur de Côte d’Ivoire au Ghana: « Je suis fier de voir de nombreux Ivoiriens émerger ici… »

M. L’ambassadeur, la Côte d’Ivoire s’achemine vers son scrutin présidentiel. L’opération d’enrôlement sur la liste électorale vient de s’achever. À ce stade, pouvez-vous nous faire le point concernant la chancellerie du Ghana ?
Avec la collaboration de la Commission électorale indépendante (Cei), nous avons mis en place la Commission électorale de la représentation diplomatique (Cerd). Il faut souligner que notre circonscription diplomatique couvre, en plus du Ghana, le Togo et le Bénin. À ce titre, nous avons enrôlé 502 personnes. II y a eu un réel engouement dans notre circonscription diplomatique et, dans l’ensemble, cette opération s’est bien déroulée.

Qui sont les Ivoiriens résidant au Ghana ? Combien sont enregistrés dans le fichier de la chancellerie de la Côte d’Ivoire au Ghana ?

Environ 2 000 Ivoiriens sont officiellement enregistrés à l’ambassade. Toutefois, ceux qui ne le se sont pas encore dépassent largement ce chiffre. Ils résident à Kumasi, à Cape Coast, à Takoradi et dans d’autres villes du pays. Beaucoup ne se rendent pas nécessairement à la capitale pour accomplir ces démarches administratives. Le Ghana abrite ainsi une grande communauté ivoirienne dynamique, répartie sur tout le territoire, contribuant activement à la vie économique et sociale du pays.

Comment cette communauté ivoirienne est-elle structurée au Ghana ?

À notre arrivée, plusieurs associations existaient déjà. Nous leur avons demandé de se regrouper au sein d’une seule faîtière, ce qu’elles ont accepté. Aujourd’hui, la communauté ivoirienne est représentée par cette structure qui regroupe diverses associations, dont celle des restaurateurs qui a été créée à ma demande, dès ma prise de service. De manière générale, les Ivoiriens sont présents dans divers secteurs, des petits métiers au domaine des affaires et occupent également des postes de cadres dans les entreprises et la finance. Je suis particulièrement fier de voir de nombreux compatriotes émerger et prendre la tête de multinationales ici.

Quels sont vos rapports avec les membres de la communauté ivoirienne au Ghana ? Fréquentent-ils leur ambassade ?

Il y a une bonne frange qui est assidue à l’ambassade. En revanche, les étudiants sont moins réguliers. C’est pourquoi nous avons décidé de les rencontrer très prochainement et de mettre en place un dispositif pour les accompagner dans le cadre des stages de fin d’études. Notre objectif est de les sensibiliser, afin qu’au terme de leur formation au Ghana, ils retournent en Côte d’Ivoire pour contribuer activement au développement du pays.

Y a-t-il des problèmes spécifiques auxquels se trouvent confrontés les Ivoiriens résidant au Ghana ? Quelles sont les initiatives que prend la chancellerie pour y faire face ?

L’une des préoccupations majeures est l’acquisition du permis de résident. Les Ivoiriens doivent acquérir plusieurs documents administratifs pour une meilleure insertion dans le tissu économique. Il s’agit du permis de travail, de la non-citizen carte appelée abusivement Ghana card. Par exemple, pour bénéficier d’une carte Sim de téléphonie mobile, il faut absolument avoir la non-citizen carte. Sans elle, il est impossible d’ouvrir un compte bancaire. Par conséquent, inutile d’envisager d’entreprendre une quelconque affaire. C’est un véritable problème. Depuis notre prise de service, le 30 mai 2023 et dans le cadre des bonnes relations entre nos deux pays, nous avons décidé de promouvoir le principe de réciprocité. Selon l’Office national de l’état civil et de l’identification (Oneci), les Ghanéens résidant en Côte d’Ivoire ne sont pas soumis à des frais pour leur carte de séjour. Nous avons donc rencontré les autorités ghanéennes qui ont pris bonne note de notre requête. Nous allons amplifier cette action auprès des nouveaux dirigeants pour que cette initiative aboutisse dans le strict respect de la réciprocité. Il s’agit de permettre à certains membres de la communauté ivoirienne non en règle de sortir de l’illégalité et de la clandestinité.

Qu’en est-il des 500 Ivoiriens qui, après la cessation officielle du statut de réfugié, ont choisi de s’installer au Ghana ?

Le Hcr, la Côte d’Ivoire et le Ghana avaient signé un accord tripartite permettant à 500 Ivoiriens, qui avaient choisi de vivre au Ghana, d’avoir le passeport et le titre de séjour. Ces passeports avaient été remis officiellement au Service d’immigration du Ghana. Mais, à ce jour, ces documents n’ont pas été remis à leurs bénéficiaires. Ce qui, naturellement, leur cause d’énormes préjudices. À plusieurs reprises, nous avons essayé de faire avancer le dossier. Nous avons espoir qu’il aboutira dans les meilleurs délais.

Pourquoi ce dossier n’a-t-il toujours pas trouvé de solution ? Qu’est-ce qui coince ?

Sur ce dossier, les autorités ghanéennes nous ont répondu que c’est la toute première fois qu’une telle opération se réalise. Par conséquent, ils ont décidé d’aller minutieusement, afin de respecter la législation en vigueur. Pour notre part, nous les encourageons à faire en sorte que, rapidement, nos compatriotes disposent de leurs passeports pour leur permettre de sortir de l’illégalité.

Abordons un autre chapitre très important, celui des us et coutumes. On le sait, la tradition occupe une place de choix dans ce pays. Comment se fait la cohabitation entre l’État moderne et cette tradition multiséculaire ?

Ici au Ghana, il existe un ministère chargé spécialement de la Chefferie traditionnelle. En plus, ce pays s’est doté d’une Chambre des rois et des chefs traditionnels. De toute évidence, on se rend bien compte de l’importance des rois et chefs et surtout de la tradition dans cette nation qui a su conserver ses us et coutumes. Ce qu’il faut comprendre, c’est que le Ghana a été colonisé par un État monarchique : le Royaume-Uni. Raison pour quoi ses populations ont mis tout en œuvre pour maintenir cette tradition multiséculaire.

Avez-vous une adresse à faire ?

Je voudrais exprimer ma profonde gratitude au Chef de l’État, SEM. Alassane Ouattara, qui m’a fait l’honneur de me nommer dans ce pays ami et frère qu’est le Ghana, une nation qui lui est si chère. Je tiens à rendre hommage à SEM. Nana Akufo-Addo pour son leadership et les nombreuses initiatives qu’il a prises pour faciliter notre mission au Ghana. C’est grâce au leadership de nos deux dirigeants que la Côte d’Ivoire et le Ghana ont pu signer l’Accord de partenariat stratégique. Cette vision est hautement salutaire pour nos nations respectives et constitue un modèle à encourager dans le cadre de la coopération Sud-Sud. Je voudrais traduire ma reconnaissance à SEM. Kacou Léon Adom, ministre des Affaires étrangères, de l’Intégration africaine et des Ivoiriens de l’extérieur, pour sa constante sollicitude et son soutien indéfectible à l’endroit de l’ambassade de Côte d’Ivoire au Ghana. Par ailleurs, je souhaite remercier SEMme Shirley Ayorkor Botchwey, ministre des Affaires étrangères du Ghana, pour son esprit de coopération et sa disponibilité qui contribuent à raffermir les relations entre nos deux pays et renouveler mes félicitations pour son élection en qualité de secrétaire générale du Commonwealth, en octobre dernier. Pour terminer, je voudrais adresser mes chaleureuses félicitations au Président élu, SEM. John Dramani Mahama et lui former mes vœux de succès dans la conduite des affaires de la nation ghanéenne. Je reste convaincu que sous sa présidence, les relations entre la Côte d’Ivoire et le Ghana continueront de se renforcer, dans une dynamique de fraternité et de coopération mutuellement bénéfique pour nos deux peuples.

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