La Caravane de l’Eau : une mobilisation collective pour l’avenir des Niayes au Sénégal

Et si la solution pour faire face aux défis de l’eau se trouvait dans le dialogue et la mobilisation collective ? C’est le pari audacieux du Gret et de la Direction de la Gestion et de la Planification des Ressources en Eau (DGPRE) du ministère de l’Hydraulique et de l’Assainissement qui, du 17 au 28 février 2025, ont organisé une Caravane de l’Eau dans la zone des Niayes, au Sénégal. Cette caravane, qui s’inscrit dans le cadre du projet Girel[1] , a sillonné les communes pour mobiliser les populations autour d’un enjeu vital : le partage équitable et la préservation des ressources en eau

Les Niayes, une zone aux multiples enjeux

S’étendant sur 180 kilomètres entre Dakar et Saint-Louis, la zone des Niayes se distingue par son microclimat et ses nappes phréatiques, ce qui en fait un véritable grenier pour le Sénégal. Elle fournit une grande partie des légumes consommés dans le pays – oignons, tomates, carottes, choux, agrumes…Cette zone est donc essentielle pour l’économie locale et la sécurité alimentaire du pays. Les eaux souterraines des Niayes sont surexploitées et polluées par une multiplicité d’usagers (petit∙e∙s agriculteur∙rice∙s, agro-industriels, industries extractives, etc. – même si leur niveau de responsabilité diffère). Les effets conjugués de la croissance démographique et du changement climatique ne font que renforcer la dynamique à l’œuvre, mettant en danger les écosystèmes et les moyens de subsistance des agriculteur∙ice∙s, éleveur∙euse∙s, pêcheur∙euse∙s et, plus largement, l’ensemble des habitant∙e∙s.

Dans la zone des Niayes, nous avons de réels problèmes d’accès à l’eau “, témoigne une maraîchère de Darou Khoudoss. “Avant, il était facile d’avoir de l’eau pour arroser nos périmètres maraîchers. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. Nous avons beaucoup de mal à faire de la production de fruits et légumes. C’est pareil pour les ménages qui n’arrivent pas à accéder à l’eau “.

Maraîchère de Darou Khoudoss

Une caravane pour l’eau, une caravane pour l’avenir

Imaginez un dispositif mobile traversant les villages, animant les places publiques et les marchés et engageant les communautés dans des débats passionnants sur l’eau. La Caravane de l’Eau est une initiative innovante et participative conçue pour aller à la rencontre des populations locales. Son objectif ? Susciter un dialogue constructif entre les acteurs et actrices concernés : agriculteur∙ice∙s, éleveur∙euse∙s, autorités locales, services étatiques, médias et citoyen∙ne∙s, sur l’importance de l’eau et la nécessité de gérer équitablement et préserver les ressources en eau des Niayes.

Un périple à travers les Niayes

Pendant neuf jours, la Caravane a parcouru les localités stratégiques des Niayes, de Kayar à Ngeune Sarr, en passant par Mboro, Kébémer, Lompoul et bien d’autres. Chaque étape a été l’occasion de rassembler les communautés autour d’activités ludiques et pédagogiques, mais aussi de discussions profondes sur les défis locaux liés à l’eau.

Des activités pour tou∙te∙s, des messages pour chacun∙e

La Caravane de l’Eau a su captiver son public grâce à une programmation riche et variée :

  • Théâtre-forum : Des saynètes inspirées du quotidien des habitant∙e∙s ont mis en lumière les problèmes d’accès, de gestion et de préservation de l’eau, suscitant des débats animés et constructifs.
  • Témoignages : Les membres des instances locales de gestion de l’eau, accompagnées dans le cadre du projet Girel, ont partagé leurs expériences, montrant que des solutions locales existent.
  • Interventions de la DGPRE : Les représentants ont expliqué la politique nationale de l’eau et son application concrète dans les communes.
  • Émissions radios : Les émissions animées par le Gret et la DGPRE ont permis d’annoncer la caravane et de mettre l’accent sur la nécessité de préserver l’eau des Niayes.

Un impact au-delà des attentes

La Caravane de l’Eau a fait bien plus que suscité des débats autour des problématiques liées à l’eau : elle a aussi inspiré, en soulevant le débat de la responsabilité collective. En touchant plus d’une vingtaine de localités et en engageant plusieurs centaines de personnes, elle a réussi à créer les conditions d’un dialogue autour des enjeux et défis liés à la préservation de l’eau. Les populations ont davantage pris conscience de leur rôle dans la préservation de cette ressource précieuse, tandis que les autorités locales ont renforcé leur engagement en faveur d’une gouvernance plus inclusive et durable.

Assane Sow, producteur d’oignons à Potou, nous partage une vision claire des solutions à mettre en œuvre :

Pour régler les problèmes liés à l’accès à l’eau, je crois qu’il est crucial d’initier une concertation entre tous les usager∙e∙s de l’eau. Seule une bonne concertation et une organisation peuvent nous aider à dépasser cette situation. Par ailleurs, je pense qu’il faut rendre obligatoire les demandes d’autorisation de forage. S’il y a aujourd’hui un foisonnement des forages, c’est parce qu’il y a un manque d’organisation, notamment au niveau des autorités. Il faut décentraliser les services de la DGPRE au niveau des communes afin qu’ils soient plus proches des populations. Cela va davantage les motiver à demander une autorisation avant tout forage.”

producteur d'oignons dans la zone des Niayes

Assane Sow, producteur d’oignons à Potou

Ce témoignage souligne l’importance d’une gouvernance locale renforcée et d’une collaboration étroite entre les acteurs.

Et maintenant ?

La Caravane de l’Eau a posé les bases d’un changement durable. Mais le travail ne s’arrête pas là. Les communautés, désormais mieux informées et mobilisées, sont prêtes à agir pour protéger leurs ressources en eau. Le Gret et la DGPRE continueront à les accompagner dans cette démarche, en soutenant des initiatives locales et en renforçant les capacités des acteurs concernés dans le cadre du projet Girel.

Cette Caravane n’était pas qu’un événement : c’est le début d’un engagement collectif, réunissant l’ensemble des acteurs et actrices – des communautés locales aux institutions -, dans un effort commun pour une gestion partagée, durable et respectueuse de l’eau dans les Niayes.

Le projet Girel fait partie du Programme « communs et gouvernances partagées » financé par l’AFD. Il est principalement financé par l’Agence de l’Eau Seine Normandie et SENEO, avec la participation d’institutions publiques sénégalaises comme la Direction de la gestion et planification des ressources en eau, partenaire national principal du projet.

[1] La Caravane de l’eau s’inscrit dans le cadre de la troisième phase du projet Girel – Gestion intégrée des ressources en eau à l’échelle locale

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