la duplicité de la communauté internationale fait le jeu du Rwanda


La République démocratique du Congo, terre bénie des dieux ? L’affirmer n’a rien d’incongru si l’on considère sa démographie, sa position géographique ou ses incroyables ressources naturelles. Une condition essentielle à son déploiement demeure malheureusement absente de ce tableau : la paix.

Car on le sait, le Mouvement du 23 mars – milice communément appelée M23 – impose chroniquement la terreur à la frontière de l’Ouganda et du Rwanda. À cela, une explication évidente : l’est de la RDC est l’une des régions minières les plus riches de la planète. On y trouve de l’or et des métaux précieux, en particulier le coltan, essentiel à la fabrication de téléphones portables, ou le cobalt, qui équipe de nombreuses infrastructures aérospatiales.

Depuis l’automne 2021, on estime à environ un million le nombre de civils qui ont été déplacés, victimes de ces affrontements et vivant dans des conditions particulièrement précaires, sans accès suffisant aux biens de première nécessité.

L’envoi récent d’une force constituée de pays d’Afrique australe n’y changera rien, tous les observateurs soulignant le manque affligeant de moyens dont celle-ci dispose sur le terrain.

Des chiffres éloquents

Au fil du temps, de nombreux acteurs internationaux (experts de l’ONU, ONG…) ont établi, preuves à l’appui, le soutien de Kigali aux rebelles du M23, de même que les incursions d’unités militaires rwandaises sur le sol congolais. Les démentis du président Paul Kagame, loin de convaincre, confirment surtout un cynisme que nourrit l’appât du gain.

En créant les conditions de cette déstabilisation, le but est bien de neutraliser localement l’État congolais pour mieux préserver l’exploitation illégale de ces ressources naturelles.

Les études publiées ces dernières années sur le sujet sont assez prolifiques et toutes le démontrent : si son sous-sol recèle une quantité très négligeable de coltan, le Rwanda en est aujourd’hui l’un des premiers exportateurs à l’international !

Selon l’Office des mines du pays, en 2023, ses recettes d’exportation de minéraux ont d’ailleurs augmenté de 43 %, atteignant plus de 1,1 milliard de dollars.

Quasiment 60 % de ces exportations sont dirigées vers les Émirats arabes unis ou la Chine. Les Occidentaux ont donc un retard « à rattraper » et semblent s’y employer sans trop s’appesantir sur l’origine d’une rente minière transformée en principale source de devises du Rwanda…

Ainsi les États-Unis ne sont-ils pas, et de manière croissante, le premier investisseur engagé sur place ?

Quant à l’Union européenne, elle a conclu en février dernier un protocole d’entente avec ce pays portant sur « les chaînes de valeur durables pour les matières premières critiques et stratégiques » et censé favoriser « un approvisionnement durable » dédié à des objectifs « en matière d’énergie verte et propre ».

Que cette louable ambition environnementale conduise l’Europe à se rendre coupable d’un véritable recel ne peut qu’interroger. Car, indéniablement, les « matières premières stratégiques » dont il est question ici sont le produit d’un pillage caractérisé.

Au-delà des mots, des actes et des sanctions

Face à ce que Félix Tshisekedi a légitimement qualifié d’« agression sans équivoque », le temps est venu non seulement de condamnations claires de la communauté mondiale, mais aussi de sanctions : gel de certains avoirs ou aides au gouvernement rwandais, remise en cause d’accords commerciaux – y compris privés – à la traçabilité douteuse (ou pas douteuse du tout, selon la manière d’aborder la question…), voire recours au droit international afin que soient jugés certains actes de violence engageant vraisemblablement la responsabilité de cet État prédateur.

Le peuple congolais attend des actes. La fin de la duplicité. Et l’affirmation d’un esprit de justice jusqu’alors introuvable.

* Junior Mbuyi est expert financier international et auteur de l’essai, Quand le Congo s’éveillera, la RDC, superpuissance africaine de demain ?.


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