Venu pour célébrer les 60 ans des relations diplomatiques entre la France et la République populaire de Chine, Xi Jinping sait que sa rencontre avec Emmanuel Macron ne s’arrêtera pas au protocole, même si tout, dans cette visite du 6 et 7 mai, est fait pour flatter le rapprochement des deux hommes. Le président chinois et son épouse Peng Liyuan seront reçus lundi par Emmanuel et Brigitte Macron à Paris, où un dîner d’État est prévu à l’Élysée en présence d’artistes chinois.
Mardi, les deux dirigeants iront dans les Hautes-Pyrénées, tout près de là où la grand-mère maternelle du président de la République, Germaine Noguès, est décédée en 2013. Puis ils se rendront au Tourmalet, col mythique du Tour de France. Ce registre de l’intime fait directement écho à la visite du chef de l’État en Chine en avril 2023. Xi Jinping l’avait alors reçu à Canton, pour une cérémonie du thé dans la résidence où son père Xi Zhongxun fut gouverneur de 1978 à 1981.
Double agenda sur l’Ukraine
Sur le fond, les deux hommes doivent cependant surmonter les divergences importantes sur des dossiers qui ont eu tendance à s’accumuler dans le temps. Xi Jinping n’a plus remis les pieds en Europe depuis 2019. Il s’agit donc de sa première tournée sur le Vieux Continent depuis la pandémie de Covid-19, qui avait entraîné la fermeture sur lui-même du géant asiatique pendant près de trois ans.
Les demandes de l’Élysée restent dans la droite lignée de la visite à Pékin il y a un an, à commencer par une contribution active dans une « résolution » du conflit en Ukraine. Mais après avoir donné la priorité à la France, soutien clé de Kiev, le président chinois se rendra en Hongrie et en Serbie, deux alliés de Moscou. Paris espère obtenir des inflexions de Pékin, à l’image du coup de fil que le président chinois avait consenti à passer au président ukrainien Volodymyr Zelensky pour qu’il lui livre son point de vue.
« Notre objectif est d’encourager la Chine à utiliser les leviers dont elle dispose sur Moscou afin de changer les calculs de la Russie », souligne l’Élysée. Mais Pékin, qui se dit neutre, a prévu d’accueillir Vladimir Poutine dans le courant du mois de mai.
Le protectionnisme en accusation
Les litiges commerciaux seront eux aussi au cœur des discussions. Comme il y a un an en Chine, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, sera associée lors d’un échange trilatéral lundi à Paris, alors que la gestion du marché unique est une compétence communautaire.
Dans ce même but, Emmanuel Macron et Olaf Scholz ont « aligné leurs positions » jeudi 2 mai, à l’occasion d’un dîner informel à Paris, dans le but d’« obtenir des conditions de concurrence plus équitables » pour les entreprises. L’Élysée défend depuis 2017 l’idée de « renforcer les instruments de défense commerciale », tandis que Pékin accuse l’Europe de « protectionnisme » et compte bien y revenir lors de cette visite.
Des valeurs à défendre
Les inquiétudes sur les droits de l’homme, passage obligé, seront exprimées, assure l’entourage du président Macron. Pour la forme, Pékin n’ayant jamais cillé face aux critiques dans ce domaine. Il faudrait faire davantage, estime Maya Wang, directrice par intérim pour la Chine à Human Rights Watch.
« Le silence et l’inaction de la France en matière de droits humains ne feraient qu’enhardir le sentiment d’impunité du gouvernement chinois pour ses abus, en alimentant encore la répression dans le pays et à l’étranger. » L’ONG évoque notamment les détentions de masse, le recours au travail forcé et la persécution culturelle – à l’encontre des Ouïghours et d’autres musulmans turciques au Xinjiang, sous le régime de Xi Jinping, ainsi que la suppression des libertés à Hong Kong.
Fort heureusement, la France pense partager avec la Chine un « agenda positif ». Pour revoir la dette des pays les plus vulnérables, par exemple. Paris se félicite aussi d’avoir décroché la participation de Pékin au sommet pour un nouveau pacte financier, en juin 2023, ainsi qu’à une initiative sur la « décarbonation » du secteur du bâtiment. L’environnement fait partie des secteurs sur lesquels l’Élysée souhaiterait coopérer, dans la perspective notamment du sommet sur les océans programmé en juin 2025.
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