Excellences,
Chers collègues,
Je voudrais tout d’abord remercier les intervenants pour leurs présentations et saluer l’initiative prise par la Grèce d’organiser cette réunion en formule Arria, à laquelle la France s’est associée.
Chacun mesure l’ampleur de la révolution introduite par l’intelligence artificielle (IA) et son potentiel de transformation pour nos sociétés, nos économies et nos institutions. Le Conseil de sécurité doit approfondir ce thème afin de mieux en identifier les opportunités et risques potentiels dans le cadre de son mandat.
Je voudrais partager avec vous trois messages.
Tout d’abord, la France se mobilise pour bâtir une gouvernance internationale multi-acteurs, inclusive et durable de l’IA, mettant celle-ci au service de l’intérêt général.
Il existe un risque que le développement de l’IA se fasse à des vitesses différentes à travers le monde, limitant son accès à quelques privilégiés. Notre responsabilité collective est donc de faire émerger un cadre de gouvernance partagé, suivant l’aspiration à une IA ouverte, inclusive et sûre, respectueuse des droits de l’Homme et accessible à tous.
Cette ambition était au cœur du Sommet pour l’action sur l’Intelligence Artificielle, qui s’est tenu à Paris en février dernier, avec des participants de plus de 100 pays, gouvernements, chercheurs, entrepreneurs et représentants de la société civile. Les travaux du Sommet ont permis des discussions inclusives visant à définir des solutions et initiatives concrètes, pour mettre l’IA au service de l’intérêt général, du développement, de la durabilité et du progrès pour tous. C’est l’esprit de « CurrentAI », un nouveau partenariat mondial pour le renforcement capacitaire en IA lancé à Paris et visant à lever au total 2,5 milliards de dollars sur les cinq prochaines années.
Deuxième message : la vision d’une IA sûre et respectueuse du droit international doit inspirer nos travaux dans l’enceinte des Nations unies.
Le Pacte numérique mondial adopté en septembre dernier nous appelle à saisir les opportunités offertes par les technologies émergentes, dont l’IA, tout en remédiant aux risques liés à leur usage malveillant. La France appelle à la mise en place rapide du panel scientifique indépendant et du Dialogue mondial sur la gouvernance de l’IA qui sont actés dans le Pacte numérique mondial. La France apporte son plein soutien à l’Espagne et au Costa Rica, qui co-facilitent ce processus. Cette nouvelle architecture rendra possible le partage d’information pour une approche commune de l’IA. Les travaux du Conseil de sécurité en bénéficieront sans aucun doute.
Monsieur le Président,
La France soutient les initiatives et processus visant à inscrire le développement de l’IA militaire dans le respect du droit international, notamment du droit international humanitaire.
Cet enjeu est important s’agissant du développement de l’IA dans le domaine de la défense. Nous avons promu, lors du sommet de Paris pour l’action sur l’IA, l’adoption d’une déclaration, soutenue à ce jour par 27 Etats, sur le maintien du contrôle humain sur les systèmes d’armes intégrant de l’IA. Par cette déclaration, nous avons affirmé notre engagement à ne jamais transférer la décision de vie ou de mort à des machines opérant hors de tout contrôle humain, et notre volonté de continuer à participer au dialogue multilatéral sur ces questions. La France s’implique aussi dans le processus « REAIM », dont les efforts pour appréhender les enjeux liés au développement de l’IA militaire sont remarquables. Nous avons aussi soutenu la résolution sur l’utilisation responsable de l’IA dans le domaine militaire, présentée en 1ère Commission de l’Assemblée générale par la Corée du Sud. Nous appelons aussi tous les Etats à soumettre des contributions au rapport du Secrétaire général sur l’enjeu, connexe, des systèmes d’armes létaux autonomes. Les enceintes basées à Genève doivent mener à bien leur mandat sur ce sujet et la France ne ménagera aucun effort dans cette perspective.
Troisième point : dans le cadre de son mandat, le Conseil de sécurité doit contribuer aux efforts de gouvernance de l’IA, en utilisant le potentiel de celle-ci pour le maintien de la paix et de la sécurité internationales.
La révolution de l’IA a des implications sur les travaux du Conseil de sécurité. L’usage malveillant de l’IA aggrave certaines des menaces auxquelles nous devons répondre, par exemple lorsqu’elle est utilisée pour conduire des opérations de désinformation qui peuvent cibler les forces de maintien de la paix, nuire à leur légitimité ou encore affecter leur action.
Excellences,
Chers collègues,
Tout en prenant en compte ces menaces émergentes, le Conseil et ses organes subsidiaires doivent accroître leurs efforts pour mieux exploiter les bénéfices de l’IA. Les technologies de l’IA ont le potentiel d’apporter un soutien précieux à la surveillance des embargos ou aux opérations de maintien de la paix dans l’exercice de leurs mandats.
Pour conclure, la France se tient prête à contribuer aux travaux du Conseil pour progresser dans la voie d’un usage responsable de l’intelligence artificielle au service de la paix et de la sécurité internationales.
Je vous remercie.
Crédit: Lien source