Une radioscopie de la la société française pendant la crise sanitaire. La commande ministérielle, d’une ampleur historique, faite à 200 photographes collaborateurs de presse a fait l’objet, ce printemps, d’une exposition fleuve à la Bibliothèque nationale. La réussite de cette initiative tient avant tout à la liberté de ton offerte aux 200 lauréats : l’exploration en images du territoire post-covid se fait ainsi par touches impressionnistes, parfois inattendues, où chacun des participants, s’immisçant dans les méandres du corps social, y porte un regard personnel. Autant de facettes qui composent un talentueux kaléidoscope de la France des années 2020.
Se côtoient des sujets aussi divers que la jeunesse amoureuse en banlieue de Sandra Mehl, le recul du littoral atlantique chez Bertrand Stofleth, ou le rude travail des marins de Lorraine Turci. Quand Ed Alcock chronique les zones à risque près des centrales nucléaires, Camille Gharbi fait le portrait des nouvelles masculinités. Plus loin, Frédéric Stucin s‘attache aux fêtes de village, alors qu’Olivier Culmann sonde les postures et les espaces administratifs dans les bureaux de Seine Saint Denis.
Le précédent américain
Ce lien entre photographie et crise fait naturellement penser à la commande du gouvernement Roosevelt dans une Amérique en souffrance après le krach boursier de 1929 et aux images de la FSA (Farm Security Administration). Un vaste projet, mené entre 1935 et 1942, qui vit émerger les talents iconiques de Dorothea Lange, Walker Evans ou encore Gordon Parks.
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Dans le cas de la « Grande Commande », outre les 450 photographies exposées à la bibliothèque François Mitterrand durant le printemps, 2000 tirages, 10 par photographe, ont rejoint les collections, quand 20 000 images en fichiers numériques intègrent les collections dématérialisées accessibles sur Gallica. Il est aussi question, ici, de soutien des pouvoirs publics aux photographes de presse dont le métier fut encore plus précarisé par la crise Covid.
Et après ?
« C’est, en tout cas, une bouffée d’air salutaire », reconnaissent certains photographes participants. « Ce devrait être l’affaire des groupes de presse de faire travailler les photographes sur le long terme », rétorque, amère, Marion Hislen, ancienne déléguée à la photographie au ministère de la Culture et initiatrice du projet. Or la tendance à la baisse s’accélère, dans une époque où les images numériques fusent à la vitesse de la lumière, générées par l’intelligence artificielle sur le fil ininterrompu des réseaux sociaux.
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Des expositions sont à venir sur tout le territoire, ainsi que des projets éditoriaux ou pédagogiques pour découvrir le travail de chacun des 200 lauréats. En attendant, La Croix a choisi de publier une partie de ces regards de photographes pour vous accompagner durant l’été.
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