LA PRISE EN CHARGE SOCIO-MEDICALE AU SENEGAL, UN POIDS DEUX MESURES ?

Le Trésor public sénégalais dépenserait plus de 4,7 milliards F Cfa par an. Chaque année, 40 à 50 agents sont pris en charge par le Trésor public, pour la bagatelle de 4,7 milliards de francs Cfa. L’Etat dépenserait environ 180 millions pour la prise en charge d’un agent. “Quarante fonctionnaires de l’Etat bénéficient d’évacuation vers l’étranger, sur décision médicale du Conseil de santé dirigé par le médecin-chef du centre médico-social. Cent quatre-vingt millions sont dépensés par malade. Cette somme comporte les frais de transport, l’hospitalisation y compris la nourriture, en plus de la prise en charge médicale. S’il s’agit d’une haute autorité, la somme est presque doublée’’, nous confie-t-on.

Alors que l’écrasante majorité de la population, pauvre, ne peut se soigner correctement, les initiatives de prise en charge socio-médicales souffrant de ressources adéquates, voici que les dignitaires du Sénégal utilisent les fonds publics pour accéder aux soins dans des cliniques et hôpitaux en Occident et au Maghreb, aux allures de tourisme de relaxation pure.

Un contraste trompe-l’œil qui a du mal à prendre forme :

En 2013, l’État sénégalais avait mis en place un dispositif de couverture sanitaire dénommé Couverture Maladie Universelle (CMU) visant à fournir une prise en charge -partielle ou totale- des frais de #santé pour l’ensemble de la population, ainsi qu’un programme de Bourse de sécurité familiale (BSF) pour les familles défavorisées, assujetties à des critères de revenus, d’inscription et d’assiduité à l’école des enfants, afin de combattre les injustices sociales et les inégalités pour une meilleure répartition des richesses nationales. Autant de mesures théoriquement viables mais dont l’application reste encore un rêve pour la majorité!

Dans le cadre d’un plan de déploiement d’un modèle de prise en charge compensatoire, avec quelques experts et collaborateurs de la diaspora, lors d’une visite de terrain au Senegal en 2017-18, on s’est rendu compte que la majorité des Sénégalais ne connaissaient pas du tout, et peu bien, l’existence du concept de la CMU. Un bien mal communiqué.

Étant nous-mêmes proches directs de parents et amis restés au pays, qui mieux que nous connaît la charge financière du coût de la Santé au Sénégal ?

Ainsi les dépenses médicales comprennent : la consultation ; les examens biologiques ; l’imagerie médicale (radiographie, électrocardiogramme, échographie) ; les médicaments prescrits ; les éventuelles autres dépenses médicales. Pour chaque type de dépense, plusieurs niveaux d’intervention en jeu : au-delà du co-paiement, via une structure de prise en charge, une mutuelle ou une autre personne proche, tout encore en l’absence du digital.

Expérimenté des modalités de prise en charge socio-médicale, l’on se demande bien au Sénégal comment l’État d’antan était parvenu à instituer un ratio de prise en charge 80-20%. A savoir la décision imposée aux structures de santé de fournir gratuitement un ensemble de prestations en sus des délais de compensation par l’État (jamais à temps et trop de dilatoire) ont privé ces structures d’une part, de leurs ressources et créé des déséquilibres budgétaires dans leur gestion. La plupart ont réagi en restreignant l’offre de service aux bénéficiaires ; par exemple, aucune structure de santé ne fournit gratuitement les médicaments, et beaucoup d’autres, loin du tintamarre médiatique ont simplement fermé boutique par défaut de retard dans la contribution attendue de l’État providence… mais aussi des piètres sommes perçues entre 3000 et 7000 fCFA par membre, l’année. Un scenario prétentieux au départ qui malheureusement requiert une réévaluation majeure!

Quid des raisons politiques, tous les professionnels de santé rencontrés affichaient une adhésion au principe de la couverture maladie (dans l’esprit) mais la plupart avaient des connaissances limitées et parfois imprécises sur les dispositifs existants, les modalités d’accès ou les prestations couvertes. « Nous, on fait les consultations. Pour savoir qui a accès, comment ça marche, il faut voir avec le service social », conseillait un infirmier. Un médecin reconnaissait : « Vous savez, quand on est médecin, on n’a pas trop besoin de ça [mutuelle]. Quand on a un membre de notre famille qui est malade, on va voir un collègue et il nous règle notre problème.» Peu ou mal informés sur les dispositifs en place, ils n’abordaient quasiment jamais ce sujet avec les patients lors des consultations. Occasion manquée de relations publiques à revisiter.

Enfin, un levier tout aussi capital : la rigueur dans l’allocation des ressources aux plus démunis (BSF et autres filets de securite sociale). L’audit de la Cour des comptes du Sénégal portant sur les dépenses faites en 2020 et 2021 sur le « Fonds de riposte contre les effets du Covid-19 » d’un montant de plus de 740 milliards de FCFA (plus de 1,1 milliard d’euros), financé par des bailleurs et l’Etat, et selon ce rapport publié sur le site de l’institution de contrôle rattachée à la présidence de la République :

« Le montant total des dépenses (faites par différents ministères et) sans lien avec la Covid-19 s’élève à 19 727 096 727 FCFA » (environ 30 millions d’euros), soulève des inquiétudes notoires..

10 ans après le lancement de la CMU, une étude exhaustive s’impose pour apporter les correctifs nécessaires à son réalignement au paysage national de l’indice de pauvreté nationale. Le manque d’eau potable au Sénégal est en soi un indice d’insolvabilité des politiques de santé publique. La concentration à Dakar de l’essentiel du personnel soignant étant un autre indicateur tout aussi incriminant. C’est pourquoi l’apport de la diaspora dans ce domaine est d’une nécessité vitale pour le rééquilibrage de l’offre de services de santé de base alliée à la télémédecine.

La nutrition basée sur nos produits locaux demeure une innovation majeure à intégrer à notre concept de la prise en charge socio-médicale, avec l’expertise d’acteurs de la diaspora, nous entendons aussi mettre le focus sur la nutrition, le parent pauvre de la prise en charge socio-médicale en Afrique.


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