La profession d’enseignant n’a pas la cote auprès des jeunes du secondaire

La profession d’enseignant n’a pas la cote auprès des jeunes du secondaire. C’est ce qui ressort d’une étude sur la perception des élèves envers ce métier au Nouveau-Brunswick.

Quelque 424 entrevues ont été réalisées, au printemps 2022, auprès d’élèves de sept écoles réparties dans les trois districts scolaires francophones de la province.

«Les résultats obtenus nous ont permis de connaître les raisons pour lesquelles les élèves s’inscrivent ou non dans le programme postsecondaire en éducation», peut-on lire dans l’étude préparée par les professeurs en éducation, Marc Basque et Robert Levesque.

Selon les données recueillies, près de 45% des élèves sondés ont mentionné ne pas être intéressés au domaine de l’éducation; près de 17% ont déjà considéré d’explorer ce domaine, mais ont changé d’idée; et près de 11% ont indiqué être intéressés par le métier, mais qu’il ne s’agissait pas de leur premier choix.

Du 27,6% d’élèves qui avaient un intérêt pour l’éducation, seulement 34 sur les 424 sondés – ce qui représente une proportion d’environ 8% – avaient l’intention de s’inscrire dans un programme dans le domaine de l’éducation.

Le facteur le plus souvent perçu comme un avantage selon la plus grande part des répondants (171 sur les 424 répondants) est la possibilité d’obtenir des congés, notamment pendant la période estivale ou pendant le temps des Fêtes et le congé de mars.

Selon Robert Levesque, l’attrait des congés ne doit pas être la première source de motivation pour se lancer en éducation, car elle ne garantit pas un bon taux de rétention.

«Quand je parle d’éducation à des élèves, on aborde les congés comme un avantage, mais je leur dis toujours de ne pas venir en éducation pour les congés. Il faut que ce soit pour les bonnes raisons.»

Quatre-vingt-dix-neuf répondants ont mentionné la satisfaction d’aider les jeunes, alors que 92 d’entre eux ont identifié l’aspect social de l’enseignement comme un avantage.

«Ç’a été plaisant d’avoir ces commentaires-là, car ça nous montre qu’il y a des gens qui veulent faire une différence dans la vie des enfants. Ça fait partie des valeurs qui devraient nous amener dans le domaine de l’éducation.»

Du côté des avantages, six thématiques sont ressorties, soit les vacances/congés; le travail auprès des enfants; le fait de faire une différence ou aider; l’aspect social; le fait d’enseigner ou éduquer; et le salaire.

En ce qui concerne les désavantages, 41% des élèves sondés (174 sur 424) ont immédiatement identifié la gestion de comportement et la discipline que doit faire le personnel enseignant comme l’un des plus importants désavantages de la profession.

Certains participants, soit environ 22% d’entre eux, ont souligné que les enseignants font beaucoup de travail supplémentaire en dehors des heures de classe, notamment pour faire de la correction, ainsi que pour préparer des devoirs ou des cours.

Le salaire a aussi été identifié comme un obstacle par certains répondants.

Selon Robert Levesque, la composante salariale est particulière puisqu’elle a été soulevée comme un inconvénient, mais aussi comme un avantage.

«C’est très surprenant que c’était pratiquement 50-50 au niveau du salaire. Ma perception de tout ça est que ce n’est pas quelque chose qui va attirer les jeunes en éducation (…) Ce n’est pas nécessairement la raison du recrutement ou de la rétention. Quand ils partent, on ne parle pas non plus du salaire comme facteur déterminant.»

Une analyse plus approfondie a permis de soulever sept thématiques au niveau des désavantages, soit la gestion de classe; la charge de travail et les heures supplémentaires;  la pression liée à la profession, en lien avec la difficulté de satisfaire tout le monde; le degré élevé de patience requis;  le salaire; l’aspect trop routinier; et l’inconfort de parler devant un groupe.

«Le fait que des jeunes croient que la profession d’enseignant est monotone m’a surpris, car c’est loin d’être le cas.»

Une différence a aussi été observée entre les motivations pour enseigner au primaire par rapport à celles au secondaire.

«Parmi ceux et celles qui ont mentionné l’éducation primaire, certains indiquent que c’est parce qu’ils aiment les enfants tandis que d’autres prétendent que ce groupe d’âge est moins difficile à gérer comparativement aux adolescents. Parmi ceux et celles qui ont mentionné l’éducation secondaire, certains soutiennent que c’est parce qu’ils aiment les sujets enseignés au secondaire tandis que d’autres mentionnent qu’ils ont moins de patience avec les plus jeunes enfants», peut-on lire dans l’étude.

Selon M. Levesque, le manque d’intérêt pour la profession d’enseignant s’explique, chez certains jeunes, par un manque d’intérêt pour l’école.

Une pénurie difficile à freiner

Selon des données récoltées, le nombre de diplômés au baccalauréat en Éducation à l’Université de Moncton est passé de 115, en 2015, à 57 en 2022. Un creux de vague important a été observé en 2018 et 2019, alors qu’il y a eu à peine une trentaine de diplômés chaque année.

En tenant compte des estimations d’Emplois NB, qui indique qu’environ 2700 postes d’enseignants (près de 900 du côté francophone) seront disponibles au cours de la décennie 2017-2026, les professeurs Levesque et Basque ont estimé qu’il faudrait approximativement 100 diplômés par année pour combler les effectifs, seulement pour le secteur scolaire francophone.

«En s’appuyant sur le besoin en effectifs de 100 diplômés par année, il est évident qu’il y aura un manque flagrant d’enseignantes et d’enseignants pour combler la demande du système scolaire.»

Le vieillissement de la population ainsi que les départs à la retraite, l’augmentation de l’effectif scolaire due aux naissances et de l’immigration et la baisse du nombre de diplômés en enseignement au secondaire sont les principaux facteurs expliquant la pénurie.

Les chercheurs ont aussi fait référence à une étude menée à l’automne 2022 par l’Association des enseignants et des enseignantes francophones du Nouveau-Brunswick.

Selon les données amassées auprès de 323 membres du personnel scolaire, 27% des participants ont avoué avoir pensé à quitter leur emploi. Environ 36% d’entre eux ont avoué que, si le contexte économique était favorable, ils chercheraient activement un nouvel emploi. À l’époque, 18% des personnes sondées ont répondu qu’ils planifiaient la recherche d’un nouvel emploi autre qu’en enseignement dans les 12 mois suivant ce sondage. Finalement, 22% des participants comptaient changer de profession d’ici les trois années suivantes.

Pour Robert Levesque, la pénurie de main-d’œuvre en éducation n’est pas un défi seulement local ou provincial. Il s’agit d’une problématique nationale et même internationale.

«Il ne faut pas attaquer ce problème comme quelque chose de local ou régional. C’est plus grand que ça. Il faut avoir un dénominateur commun partout. Comment améliore-t-on le recrutement? C’est une bonne question et ce serait un bon sujet de recherche.»

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