La Raffinerie de Khartoum Dévastée : Crise au Soudan

La raffinerie d’Al-Jaili, pilier du Soudan, est en ruines après deux ans de guerre. Une crise économique s’abat sur le pays : jusqu’où ira le chaos ?

Imaginez un géant de métal et de feu, autrefois symbole de puissance économique, réduit à un amas de cendres et de ruines. C’est le destin tragique de la raffinerie d’Al-Jaili, située à une heure au nord de Khartoum, capitale du Soudan. Depuis avril 2023, un conflit impitoyable entre deux factions militaires a transformé ce joyau industriel en un champ de désolation, aggravant une crise qui menace la survie de tout un pays.

Un Colosse Terrassé par la Guerre

Construite au début des années 2000 grâce à un partenariat entre le gouvernement soudanais et une entreprise chinoise, cette raffinerie représentait un investissement colossal de **2,7 milliards de dollars**. Elle était capable de traiter **100 000 barils de pétrole par jour**, extraits principalement du Soudan du Sud. Mais aujourd’hui, elle n’est plus qu’un squelette calciné, ses réservoirs noircis par les flammes et son sol saturé de pétrole brûlé.

Le conflit qui oppose le chef de l’armée soudanaise à son ancien second, commandant des forces paramilitaires, a fait de cette installation un enjeu stratégique majeur. Après des mois de combats acharnés, l’armée a repris le contrôle du site en janvier dernier, mais à quel prix ? Les dégâts sont estimés à **1,3 milliard de dollars**, selon une source proche de la direction.

Une Bataille aux Conséquences Dévastatrices

Les affrontements autour d’Al-Jaili ont atteint leur paroxysme en janvier, lorsque des incendies ont ravagé le complexe. Les deux camps se rejettent la faute : l’armée accuse les paramilitaires d’avoir délibérément mis le feu, tandis que ces derniers pointent du doigt des bombardements aériens. Des images satellite ont capturé des colonnes de fumée s’élevant du site, témoignant de la violence de l’attaque.

Des unités entières ont été réduites en cendres, et certaines sections devront être reconstruites de zéro.

– Un responsable de la maintenance

Sur place, l’odeur acre du pétrole brûlé imprègne l’air. Les arbres, autrefois verdoyants autour de l’installation, sont désormais recroquevillés, victimes collatérales de la chaleur intense. Les salles de contrôle, jadis bourdonnantes d’activité, sont aujourd’hui silencieuses, leurs équipements hors service.

Un Coup Dur pour l’Économie

Avant sa destruction, la raffinerie couvrait une part essentielle des besoins énergétiques du Soudan : **50 % de l’essence**, **40 % du diesel** et **50 % du gaz domestique**, selon un économiste local. Sa fermeture a forcé le pays à se tourner vers des importations coûteuses, payées en devises étrangères par un secteur privé déjà exsangue.

Le Soudan traverse une crise économique sans précédent. La valeur de la livre soudanaise a chuté drastiquement : un dollar s’échange aujourd’hui à **2 400 livres**, contre 600 avant le début des hostilités. Les combats ont paralysé les infrastructures, et la population lutte pour accéder aux produits de première nécessité.

  • Production stoppée net, laissant le pays sans ressources locales.
  • Importations massives, creusant le déficit budgétaire.
  • Chute vertigineuse de la monnaie, rendant le carburant hors de prix.

Un Puzzle Logistique et Financier

Relancer la raffinerie est une mission titanesque. Certaines pièces, fabriquées à l’étranger, dépendent de délais de production et de livraison fixés par des partenaires chinois, qui détiennent toujours **10 % des parts** du complexe. Un ingénieur, sous couvert d’anonymat, estime qu’avec un financement adéquat, il faudrait au moins **trois ans** pour redémarrer les opérations.

Mais où trouver l’argent ? Le Soudan, déjà fragilisé par la sécession de 2011 qui a attribué **75 % des réserves pétrolières** au Soudan du Sud, peine à mobiliser des fonds. Les droits de transit, perçus pour l’acheminement du pétrole sud-soudanais via des oléoducs, constituaient une bouffée d’oxygène économique. Pourtant, même cette ressource a été compromise.

L’Oléoduc, l’Autre Victime du Conflit

En février 2024, un oléoduc clé reliant le Soudan du Sud au port soudanais a été endommagé lors d’échanges de tirs. Les exportations pétrolières, vitales pour les deux nations, ont été interrompues pendant près d’un an, jusqu’à leur reprise timide en janvier 2025. Cependant, c’est le Soudan qui en a payé le prix fort, selon un expert économique.

Le Soudan a été le plus durement touché, car il dépendait de ces revenus pour survivre.

– Un analyste économique

Privé de sa raffinerie et de ses revenus d’exportation, le pays se retrouve dans une impasse. Les oléoducs, bien que réparés, fonctionnent au ralenti, et la confiance des investisseurs étrangers s’est évaporée face à l’instabilité chronique.

Que Reste-t-il de l’Industrie Pétrolière ?

Jadis pilier de l’économie soudanaise, l’industrie pétrolière est aujourd’hui à genoux. La perte d’Al-Jaili n’est que la partie visible d’un désastre plus large : routes détruites, usines fermées, et une population confrontée à des pénuries sans fin. Le conflit a non seulement ravagé des infrastructures, mais aussi brisé les espoirs d’une reprise rapide.

Avant la guerre Pendant le conflit Aujourd’hui
100 000 barils/jour Production stoppée Ruines à reconstruire
1 $ = 600 livres Instabilité monétaire 1 $ = 2 400 livres

Ce tableau illustre l’ampleur du naufrage. Chaque chiffre raconte une histoire de déclin, où la guerre a transformé un pays riche en ressources en une nation au bord du gouffre.

Un Avenir Incertain

Alors que les flammes se sont éteintes à Al-Jaili, les braises d’une crise bien plus profonde continuent de couver. La reconstruction nécessitera des milliards, du temps, et surtout une paix durable – un luxe que le Soudan n’a pas connu depuis trop longtemps. Les habitants, eux, oscillent entre résignation et espoir ténu.

Le destin de cette raffinerie n’est pas qu’une question d’acier et de pétrole : c’est le reflet d’un pays déchiré, où chaque explosion résonne comme un cri d’alarme. Combien de temps encore avant que le silence ne remplace le chaos ?

Le Soudan à la croisée des chemins : entre ruines et reconstruction, l’avenir reste suspendu.

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