- La Guinée est à nouveau en proie à une turbulence politique de grande ampleur.
Le gouvernement de transition a annoncé la suspension de 28 partis politiques, dont plusieurs figures emblématiques de la scène politique nationale, pour une durée de trois mois. Cette décision, justifiée par la volonté d’assainir l’espace politique, suscite de vives réactions et relance le débat sur l’avenir de la démocratie guinéenne.
Une vague de suspensions aux motivations controversées
Le Ministère de l’Administration du Territoire et de la Décentralisation a procédé à une évaluation des partis politiques sur une période de 90 jours. Les résultats de cette évaluation ont conduit à la suspension temporaire de plusieurs formations politiques, parmi lesquelles le RPG Arc-en-ciel d’Alpha Condé, l’UFR de Sidya Touré et le PUP de feu Lansana Conté. Selon les autorités, ces partis n’ont pas répondu à certaines obligations administratives, telles que la preuve de leur existence bancaire ou l’organisation de congrès réguliers.
Pour Mme Camara Djénab Touré, Directrice Nationale des Affaires Politiques et de l’Administration Électorale, cette mesure vise à garantir une meilleure structuration du paysage politique. Cependant, certains observateurs y voient une stratégie visant à affaiblir l’opposition et à favoriser un monopole du pouvoir par le Comité National du Rassemblement pour le Développement (CNRD).
Des figures historiques écartées temporairement
La suspension de ces partis est d’autant plus symbolique qu’elle concerne des acteurs majeurs de la vie politique guinéenne. Le RPG, qui fut le parti au pouvoir sous Alpha Condé, et l’UFR de Sidya Touré, ancien Premier ministre, ont marqué l’histoire politique du pays depuis l’avènement du multipartisme dans les années 1990. Leur mise à l’écart temporaire, alors que leurs leaders sont en exil, fait craindre une marginalisation durable de ces formations.
De son côté, l’UFDG de Cellou Dalein Diallo, principale force d’opposition, échappe à la suspension, mais à condition d’organiser un congrès sous 45 jours. Cette situation suscite des interrogations, notamment sur une éventuelle stratégie politique visant à reconfigurer le jeu électoral avant les prochaines échéances.
Une décision perçue comme une manœuvre politique
Les critiques fusent du côté des partis touchés par cette mesure. Pour Fodé Baldé, porte-parole de l’UFR, il s’agit d’une tentative du CNRD de consolider son pouvoir en affaiblissant les forces politiques concurrentes. « La volonté n’est rien d’autre que de créer les conditions pour que le CNRD soit seul sur le terrain », affirme-t-il.
De son côté, Joachim Baba Millimouno, chargé de communication de l’UFDG, s’inquiète d’un possible processus d’épuration politique déguisé : « Cela pourrait s’apparenter à une mise à l’écart progressive des leaders jugés gênants. » Cette lecture est partagée par de nombreux analystes, qui y voient un prélude à une restructuration forcée de la scène politique guinéenne.
Si cette suspension est officiellement limitée à trois mois, son impact sur le futur du paysage politique guinéen pourrait être déterminant. La Guinée se dirige-t-elle vers une véritable réforme de son système politique ou vers une concentration accrue du pouvoir ? L’avenir le dira.
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