Dans un contexte déjà fragilisé par la sortie des pays de l’AES (Burkina Faso, Mali, Niger) de la Communauté Économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), le Bénin vient d’être confronté à une nouvelle préoccupante concernant ses échanges commerciaux au sein de la même communauté.
En effet, selon les données publiées le mardi 18 mars 2025 par l’Institut national de la statistique et de la démographie (Instad), les exportations béninoises vers les autres pays membres ont accusé une baisse significative de 31,42% au quatrième trimestre 2024.
En chiffres, ces exportations ont atteint 9,6 milliards de francs CFA (15,87 millions de dollars) au quatrième trimestre 2024, contre 14 milliards de francs CFA durant la même période en 2023. Un recul de plus de 4 milliards de francs CFA qui intervient dans un paysage commercial régional en pleine reconfiguration.
Redistribution des cartes dans l’échiquier commercial ouest-africain
Le Nigeria s’impose désormais comme le principal partenaire commercial du Bénin dans l’espace CEDEAO, captant 49,4% de la valeur des exportations béninoises vers la communauté.
Une situation qui marque un changement notable dans la hiérarchie des échanges commerciaux, puisqu’au quatrième trimestre 2023, c’était le Togo qui occupait cette position avec 43% des ventes.
Derrière le géant nigérian se positionnent la Côte d’Ivoire (15,4%) et le Togo, relégué à la troisième place avec 14,8% des exportations.
À eux trois, ces pays représentent 79,6% des exportations béninoises vers la CEDEAO, dessinant ainsi une concentration des échanges qui pourrait fragiliser la position du Bénin en cas de tensions diplomatiques ou de conjoncture défavorable dans l’un de ces pays.
Des produits d’exportation diversifiés mais vulnérables
L’analyse des flux commerciaux révèle que les principaux produits exportés par le Bénin vers ses partenaires de la CEDEAO incluent les huiles de pétrole, les machines et appareils destinés à la construction, les tissus et fils de coton, ainsi que les ouvrages en pâte à papier et les barres en fer ou en acier.
Particulièrement notable est l’exportation d’huiles de pétrole vers le Nigeria pour une valeur de 4,1 milliards de francs CFA, suivie par les machines et appareils utilisés pour la construction et l’industrie minière (0,4 milliard).
Vers la Côte d’Ivoire, ce sont principalement les tissus de coton écrus (0,8 milliard) et les huiles de pétrole destinées à la réexportation (0,3 milliard) qui dominent les ventes.
Derrière ces milliards en moins, un contexte régional tendu pour le Bénin avec le départ de l’AES de la CEDEAO
Cette reconfiguration des échanges s’inscrit dans un environnement régional complexe.
La fermeture persistante des frontières entre le Bénin et le Niger depuis le coup d’État de 2023 continue d’affecter les flux commerciaux traditionnels.
Bien que le Bénin ait rouvert ses frontières suite à la levée des sanctions de la CEDEAO, Niamey, membre de l’AES, maintient les siennes fermées, invoquant des raisons sécuritaires. Une position d’autant plus fixe avec le retrait effectif de l’AES de la CEDEAO.
Cette situation explique en partie la chute des exportations béninoises et la réorientation des flux vers d’autres partenaires régionaux comme le Nigeria, devenu désormais le principal débouché pour les produits béninois dans la zone.
Par ailleurs, la baisse des importations du Bénin en provenance de la CEDEAO (-8,1%), établies à 57 milliards de francs CFA au quatrième trimestre 2024, témoigne d’un ralentissement global des échanges intracommunautaires qui touche l’ensemble de la région.
Des perspectives économiques incertaines
Cette contraction des échanges intervient dans un contexte où les exportations globales du Bénin affichent une hausse de 4,1% par rapport au troisième trimestre 2023, mais accusent une baisse de 20,4% en glissement annuel, selon l’Instad.
Le coton, produit phare des exportations béninoises avec 33,6% de la valeur totale des ventes à l’extérieur au quatrième trimestre 2024, demeure vulnérable aux fluctuations des cours mondiaux et aux aléas climatiques.
Cette dépendance à quelques produits clés et à un nombre limité de partenaires commerciaux accentue la fragilité de la position du Bénin dans les échanges régionaux et internationaux.
Face à ces défis, la diversification des marchés d’exportation et le renforcement des capacités productives apparaissent comme des impératifs pour l’économie béninoise, afin de réduire sa vulnérabilité aux chocs externes et de retrouver une dynamique positive dans ses échanges avec ses partenaires de la CEDEAO.
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