Le clan du maréchal Haftar, qui contrôle l’est de la Libye, avance ses pions au Sahel

La visite s’est faite en catimini. Mardi 9 juillet, un jet privé Gulfstream G450, souvent utilisé par des proches du maréchal Khalifa Haftar, a atterri à Ouagadougou. A son bord, l’un des fils de l’homme fort de l’Est libyen, Saddam Haftar. Ni les autorités burkinabées ni celles de Benghazi n’ont officiellement fait état de son voyage – son premier au Burkina Faso depuis qu’il a été propulsé chef d’état-major de l’armée de terre de l’Armée nationale libyenne (ANL) par son père, mi-mai. Seule une photo de Saddam Haftar en treillis au côté du capitaine Ibrahim Traoré, le chef de la junte burkinabée, a fuité sur les réseaux sociaux.

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Cette visite du fils Haftar illustre les ambitions croissantes du gouvernement parallèle de Benghazi au Sahel. En quête perpétuelle de légitimité sur la scène internationale, les dirigeants de l’Est libyen, qui s’opposent au « gouvernement d’union nationale » basé à Tripoli (ouest) et reconnu par l’ONU, ont renforcé leurs relations diplomatiques avec les régimes militaires sahéliens ces derniers mois.

Début juin, Saddam Haftar s’est rendu à N’Djamena pour rencontrer le général Mahamat Idriss Déby, élu président du Tchad en mai. Pour ce premier séjour à l’étranger depuis sa promotion comme patron de l’armée de terre, il avait troqué son treillis pour un costume sombre. Le signe, selon le spécialiste de la Libye Wolfram Lacher, des « ambitions politiques » de celui qui assume désormais un rôle d’émissaire de Khalifa Haftar.

« Les visites de Saddam Haftar au Sahel montrent qu’il cherche à renforcer sa crédibilité sur la scène internationale au moment où il commence à se préparer à la succession de son père, à laquelle peuvent prétendre plusieurs de ses frères », explique le chercheur de l’Institut allemand des affaires internationales et de sécurité (SWP).

Mandat d’arrêt

Si, comme à Ouagadougou, rien n’a fuité des échanges entre les deux dirigeants à N’Djamena, le gouvernement tchadien chercherait à obtenir de son voisin libyen le maintien sous cloche des combattants du Front pour l’alternance et la concorde au Tchad (FACT). Ce groupe rebelle, qui a établi sa base arrière dans les zones frontalières libyennes contrôlées par le clan Haftar, est à l’origine de l’offensive d’avril 2021 qui avait coûté la vie à l’ex-président Idriss Déby Itno, le père de l’actuel chef de l’Etat.

« Pour le régime tchadien, renforcer la coopération avec Benghazi peut être un moyen d’obtenir le retour au pays de certains combattants du FACT », analyse Wolfram Lacher. En octobre 2023, les hommes du maréchal Haftar avaient arrêté puis livré au Tchad Tahir Wodji, le chef d’état-major du FACT. Deux semaines plus tard, N’Djamena avait bombardé des positions du groupe rebelle dans le sud de la Libye.

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