le Sud-Kivu s’inquiète du départ des casques bleus

La scène a tout d’une vraie offensive, et pourtant… Sous le regard des casques bleus du contingent pakistanais, une vingtaine de militaires congolais courent, roulent, montent à l’assaut et imitent le bruit des kalachnikovs sur la colline du village de Mikenge.

À partir d’aujourd’hui, le 123e bataillon congolais reprend les rênes de la base de la Monusco, installée ici depuis 2020 afin de protéger près de 2 500 Congolais ayant fui les violences communautaires qui ensanglantent la région. Et malgré la présence de groupes armés dans les environs, le major Jonas Baraka, bientôt en charge, assure que, avec eux, la sécurité ne sera à aucun moment menacée.

« Maintenant, la plus-value que les Pakistanais apportent à nos militaires concerne notamment la protection des populations civiles après leur départ. Il y a des groupes armés mais nous sommes capables d’intervenir dans tous les cas. »

Transfert de compétences

Un peu en retrait, le major Jawad Mehmood, commandant de la future ancienne base temporaire de Mikenge, trouve certains avantages à ce que les forces armées de la RDC, les FARDC, reprennent l’endroit. « Nous les entrainons aux techniques de combat de base, aux précautions de sécurité ainsi qu’à comment interagir avec les locaux. Mais étant donné que qu’ils sont Congolais, ils sont déjà bien ancrés dans la culture locale. »

Les Enjeux internationaux

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Du haut de leur colline, Yoshua Basanda, chef de groupe des déplacés de Mikenge, et Philémon Chiza, pasteur, observent la scène d’un regard perplexe. Ils sont ce que l’on appelle des Banyamulenge, une communauté jadis installée au Rwanda qui a migré sur les terres congolaises avant que le Congo soit Congo. Mais les guerres à répétition avec le Rwanda étant passées par là, les Banyamulenge, encore considérés comme des étrangers, sont vite devenus une cible des communautés voisines qui réclament leur départ de leurs terres.

Donc pour le pasteur, le départ de la Monusco rime avec retour de l’insécurité. « Nous sommes désolés de voir la Monusco partir. Car nous avons l’inquiétude de voir l’insécurité revenir. Nous avons fui ici alors que les FARDC y étaient, donc nous n’avons pas l’assurance que les FARDC puissent nous protéger comme l’a fait la Monusco. »

Présence dissuasive

Certes… La demande de retrait de la Monusco, qui doit être complétée à la fin de l’année 2024, émane du Gouvernement congolais au lendemain de violentes manifestations lors desquelles des dizaines de personnes avaient été tuées dans différentes villes de l’est de la RDC.

Mais l’avis de manifestants citadins est souvent bien différents de celui des Congolais vivant en milieu rural, parfois aux côtés des groupes armés, comme le soulève Josaphat Musamba, chercheur spécialiste des dynamiques de groupes armés.

« Je vais pas juger le bilan de la Monusco. Certains parlent d’un bilan mitigé, oui. Mais cette présence était dissuasive et elle jouait beaucoup dans certaines zones notamment dans les milieux ruraux. Une fois la mission partie, il y aura des recompositions sécuritaires énormes dans beaucoup de zones. »

Reste à savoir si les positions seront bien tenues par les forces de sécurité. Car la base de la ville de Kamanyola, transférée à la police le 28 février 2024, semble aujourd’hui vide. Et selon une source sur place, les gardiens de la paix manquent « de tout, et ne tiendront pas longtemps ».

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