Leïla Drane, une lycéenne martiniquaise à la recherche de son identité

En mars dernier, le ministre des Outre-Mer, Manuel Valls, s’est rendu au lycée Frantz Fanon à Trinité lors de sa visite officielle. Il a rencontré des élèves qui l’ont interrogé sur l’avenir de la jeunesse martiniquaise imaginé par la France. Leïla Drane, élève de terminal en filière scientifique, a évoqué la question de l’identité et de la citoyenneté.

Lors de sa récente visite officielle en Martinique, Manuel Valls est arrivé au Lycée Frantz Fanon avec un script bien préparé.

Il voulait parler de délinquance, de trafics de drogue, du harcèlement scolaire, et aussi de la démographie vieillissante, de la pauvreté, de l’échec scolaire et d’une jeunesse qui imagine son avenir ailleurs.


Le 19 mars 2025, Ministre des Outre-Mer, Manuel Valls évoque les problèmes de la Martinique avec les élèves du Lycée Frantz Fanon à La Trinité.


C’était un bilan sombre pour les élèves qui ont constaté que le ministre n’avait pas de projet pour la jeunesse de la Martinique.

Pour leur part, les élèves avaient bien préparé cette visite. Ils ont interpellé le ministre des Outre-Mer sur plusieurs sujets.

Le but n’était pas de l’écouter mais qu’il nous écoute, lui. Je ne voulais pas qu’on ait une image d’élèves formatés. Je voulais qu’on voit des élèves réveillés intellectuellement.

Leïla Drane, élève du lycée Frantz Fanon à Trinité

Les élèves ont interrogé Manuel Valls sur leur avenir, sur l’éloignement géographique, la continuité territoriale, sur l’identité, et cette contrainte de quitter la Martinique faute d’opportunités pour les  diplômés du territoire.

Ils ont dressé une réalité compliquée pour la jeunesse martiniquaise qui n’est pas considérée « comme on l’aurait souhaité. »

Leïla Drane, née et éduquée à Trinité, a également interpellé le ministre sur la question de la citoyenneté.

On est dans une recherche de l’identité de soi, à savoir si on est Antillais ou français ou un peu des deux. Il y a plein de choses qui indiquent qu’on ne peut pas être totalement français comme l’état aurait souhaité.

Dans un échange spontané, Leïla Drane qui est élue au CAVL (Conseil Académique de la Vie Lycéenne) et vice-présidente du CVL de son établissement, avoue avoir éprouvé pour la première fois le sentiment d’être française lors de ce rendez-vous.

J’avais cette sensation d’être entendue et que mon opinion comptait au moins un peu. Dans la vie politique, les jeunes, surtout aux Antilles, ne sont pas vraiment impliqués dans les prises de décisions.


Leïla Drane et ses camarades prennent une photo avec Manuel Valls, ministre des Outre-Mer.


Léïla Drane a d’ailleurs été félicitée par le ministre à l’issue de son intervention.

Pour la lycéenne, la citoyenneté va beaucoup plus loin que le droit de voter ou d’être citoyenne européenne. À la Martinique, la notion de l’égalité n’est pas véritablement respectée à cause de l’éloignement géographique avec la France hexagonale.

L’absence de l’histoire de la Martinique dans les programmes scolaires a aussi été pointée du doigt par Leïla et ses camarades, ce qui nourrit chez elles le sentiment de ne pas se sentir légitimement françaises, qu’elles sont « les oubliées de l’histoire. »

L’amputation du budget du Pass Culture est un exemple récent de l’impact d’une décision prise en France, ce qui a fortement impacté les jeunes ultramarins. Ces derniers n’ont pas accès à une multitude d’offres culturelles de proximité.

Paris est une zone urbaine et le lycée Frantz Fanon de Trinité est classé établissement scolaire en zone urbaine. Or, il est difficile de voir les similitudes entre ces deux exemples. Les jeunes parisiens sont beaucoup moins touchés par les réductions budgétaires que leurs homologues trinitéens.

Les élèves le savent, le lycée Frantz Fanon porte le nom d’un résistant martiniquais, ce qui leur rappelle que le monde n’est pas facile et qu’il faut se battre.

Les œuvres de leur compatriote Frantz Fanon ne sont pas inclus non plus dans des programmes. Alors les jeunes lisent ses livres sur leur temps libre.

Son histoire ne va pas forcément servir sur ma copie de Bac ou de Philo, mais ça me permet de savoir d’où je viens. Je viens de la Martinique, des Antilles et mon histoire est multiple avec des origines d’Afrique, d’Asie. Je pense que la question véritable d’identité reste encore irrésolue.


Leïla Drane devant la Cité scolaire Frantz Fanon à La Trinité.


Leïla Drane n’est pas sur les réseaux sociaux qu’elle considère comme « un poison » qui « enferme » les usagers dans les écrans. Elle préfère vivre sa vie en temps réel.

Elle est en terminale scientifique, spécialité physique chimie et mathématique. Son premier objectif est de se spécialiser en ingénierie chimiste et elle est « pleine de projets ». Léïla espère se lancer un jour dans la politique.

 


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