Le 30 mars 2025, le brigadier de 1ère classe Kabeya Senda Fiston, membre de la Police de circulation routière, a tragiquement perdu la vie. Officiellement, les circonstances exactes de son décès restent floues. Toutefois, selon un collègue policier présent sur les lieux, l’agent aurait été violemment pris à partie après avoir arrêté un véhicule du cortège de la Première ministre pour une infraction au code de la route, un geste qui aurait conduit à sa mort. Une enquête militaire est en cours.
La question de l’impunité des membres des cortèges officiels
Le décès de Kabeya Senda Fiston a profondément choqué, bien au-delà des rangs de la police. Ce drame ravive un vieux débat en République démocratique du Congo : celui de l’impunité souvent associée aux cortèges officiels, perçus comme étant au-dessus des lois. Et Kabeya Senda n’est malheureusement pas la première victime d’un système où les excès sont rarement sanctionnés.
Le 8 mars 2025, à peine trois semaines avant la mort du brigadier, trois personnes ont perdu la vie à Kinshasa, heurtées par des véhicules du cortège du gouverneur de la capitale. Deux ans plus tôt, un homme avait été percuté mortellement par le convoi présidentiel alors qu’il se dirigeait vers l’aéroport de Ndjili. Ou encore le 5 février 2018, dix personnes, dont deux soldats de la garde républicaine, avaient été blessées lors d’un incident impliquant le cortège de l’ancien président Joseph Kabila.
Ces événements démontrent que les cortèges officiels ne sont pas de simples dispositifs de sécurité pour les hauts dirigeants, ils peuvent aussi se transformer en zones de non-droit, où la vie des citoyens est mise en danger.
Pour Luc Lutala, coordonnateur de la SYMOCEL (Synergie des Missions d’Observation Citoyenne des Élections), cette situation révèle un profond déficit de formation au sein des forces de l’ordre.
« Il faut se rendre à l’évidence : les centres de formation sont très peu utilisés. Il en existe très peu qui offrent une formation professionnelle sanctionnée par un brevet. On se retrouve ainsi avec un corps de police assez cosmopolite, dont le niveau de formation est difficile à établir » explique Luc Lutala.
Cette carence structurelle contribue à une culture du flou, où les rôles sont mal définis, les règles peu respectées, et la hiérarchie souvent ignorée, notamment lorsqu’il s’agit d’assurer la sécurité des hautes autorités.
L’échec des réformes sécuritaires
Pour Franck Tshitenge, secrétaire du Réseau national des ONG des droits de l’Homme, même si les circonstances exactes de la mort du brigadier Kabeya ne sont pas encore établies, ce décès incarne l’échec des réformes sécuritaires promises depuis plusieurs années.
Selon lui « un certain nombre d’actions ont été initiées pour professionnaliser la police. Mais l’implication froide des autorités empêche toute réforme effective ».
Depuis le 1er avril, la justice militaire s’est saisie du dossier. Les autorités affirment vouloir faire toute la lumière sur les circonstances de la mort de Kabeya Senda.
Mais dans un climat de méfiance généralisée envers les institutions, la famille du brigadier et la société civile attendent plus que des déclarations : elles réclament des actes, de la justice et des garanties que de tels drames ne se reproduisent plus.
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