A trois jours de la journée mondiale du droit des femmes, j’ai voulu me pencher sur les obstacles qui aujourd’hui encore empêchent les femmes de disposer librement de leur corps. Je parle bien sûr de la France, notre pays, dans lequel, faut-il le préciser, l’excision est interdite, et le droit à l’avortement reconnu depuis désormais un demi-siècle avec la loi Veil de 1975. Un droit reconnu dans la Constitution il y a tout juste un an, suite aux inquiétudes nées aux Etats-Unis et en Italie sur la remise en cause de cette avancée majeure pour les femmes. La France est ainsi devenue le premier pays au monde à inscrire la liberté de recourir à l’avortement dans sa loi Fondamentale.
En 2023, dernière année recensée, près de 244 000 femmes ont avorté, un chiffre qui a atteint son plus haut niveau depuis 1990. Et 140 000 femmes qui ont été excisées vivent en France, la moitié en Ile de France, en particulier en Seine Saint Denis.
Pourquoi faut-il encore combattre sur ces sujets qui sont apparemment bien identifiés et correctement traités ?
Il faut lire l’entretien édifiant publié cette semaine dans le 1, entre deux Sarah : la gynécologue Sarah Abramowicz, responsable à Montreuil de l’unité de prise en charge des femmes victimes de mutilations sexuelles, et la militante féministe Sarah Durocher, présidente depuis 2022 du planning familial.
S’agissant de l’excision, observe Sarah Abramowicz, la réparation purement chirurgicale, ne règle pas les problèmes de ces femmes. Outre ces mutilations, elles ont souvent subi des mariages forcés, des viols, des agressions, un parcours migratoire terrible. Il manque ainsi de soins multidisciplinaires qui prennent en compte ces traumas. Et au plan politique, c’est la double peine : l’extrême droite s’oppose à ces soins de réparation au prétexte qu’ils concernent surtout des femmes noires et immigrées. Quand une partie de l’extrême gauche voit encore dans ces pratiques une tradition culturelle et qu’il ne faut pas stigmatiser ces populations
Quels sont les obstacles à l’avortement ?
La constitutionnalisation de l’IVG ne règle pas tout, insiste la présidente du Planning familial Sarah Durocher. Les médecins peuvent toujours refuser de le pratiquer, faire écouter le cœur du fœtus pour culpabiliser les femmes qui veulent avorter, faire de la désinformation avec des numéros verts anti-IVG très bien référencés sur Google grâce aux gros budgets des groupes anti-choix. Un combat contre les tabous reste aussi à mener. A preuve toutes ces patientes qui tentent de se justifier, et parfois de s’excuser auprès des médecins de vouloir interrompre leur grossesse. Enfin, l’action publique dans ces domaines n’est pas ou très mal financée. Le pire exemple vient du Conseil régional des Pays de Loire qui a récemment privé le planning familial de l’intégralité de ses subventions, au mépris de toute son action qui, au-delà de l’IVG, répond aux problèmes de santé sexuelle et psychologique en milieu rural. Voilà pourquoi Jérôme, à l’approche de cette journée du 8 mars consacrée aux droits des femmes, le chemin reste long en France, mais plus long encore dans bien des pays du monde.
C’est à lire dans 1 Hebdo de cette semaine Ces femmes qui résistent, avec notamment des textes de la militante féministe américaine Gloria Steinem et de la journaliste d’origine iranienne Delphine Minoui.
Et en supplément vous trouverez un poster de l’artiste Joëlle Jolivet représentant la jeune étudiante Ahou Daryaei, symbole de la révolte des femmes iraniennes, qui s’était dénudée en plein Téhéran en novembre 2024.
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