Renouveler la performance
Olivier Krumbholz, 66 ans, a tout gagné avec l’équipe de France féminine de handball, qu’il entraîne depuis un quart de siècle (1998-2013, puis depuis 2016) et qu’il dirige pour une dernière campagne olympique à Paris, avec la ferme intention de conserver le titre acquis à Tokyo.
« Je ne suis sensible à aucune mode. Cela se ressent dans le jeu que je professe. J’ai été formé selon des principes et des fondamentaux qui demeurent. Laisser penser que ces enseignements sont tous dépassés est une connerie manifeste. Je suis d’abord poussé par le pragmatisme. Je construis une équipe efficace plus que spectaculaire, fondée sur une vraie solidité défensive. Voilà notre identité de jeu. Parfois, j’entends les athlètes parler de plaisir, d’abord et avant tout. Certes. Mais moi, je dis par provocation : le seul plaisir dans le sport de haut niveau, c’est la gagne. Le véritable ambitieux n’est jamais rassasié.
« Je dis par provocation : le seul plaisir dans le sport de haut niveau, c’est la gagne »
À peine décroché un titre, il faut se projeter vers le suivant. Immédiatement. Je l’ai vérifié en 2003, après notre premier titre mondial dans des conditions extravagantes : sept buts remontés en sept minutes lors de la finale. Je pense que le ressort de la motivation s’est détendu alors chez certaines joueuses. Elles n’avaient jamais imaginé, au début de leur carrière, qu’elles seraient un jour championnes du monde. Et nous n’avons pas su conserver cet élan pour les Jeux olympiques d’Athènes en 2004, où nous terminons au pied du podium. Cette époque est terminée. Aujourd’hui, la transmission se réalise sur ces bases-là : les anciennes font bien comprendre aux jeunes qu’elles sont là pour gagner.
Concernant mon management, les choses ont évolué. Parce que les filles ont évolué, bien plus professionnelles, conscientes d’être dans un sens privilégiées et donc nettement plus investies, alors qu’on pourrait les croire plus désinvoltes. Elles ont changé, comme la société d’ailleurs, avec une remise en cause très claire de l’autorité verticale. Nous sommes désormais dans le coaching participatif.
Je ne suis plus l’entraîneur omnipotent de mes débuts. Ce qui ne veut pas dire pour autant que les joueuses ont pris le pouvoir et que toute forme d’autorité disparaît. D’ailleurs, en 2016, après mon retour aux commandes et notre médaille d’argent aux Jeux de Rio, puis le bronze dans la foulée à l’Euro, le président fédéral d’alors m’avait surtout félicité d’avoir “remis de l’ordre” dans cette équipe. C’est essentiel.
De même sur le plan du jeu, il faut trouver l’équilibre permettant une forme de liberté créatrice de chacune en même temps que la construction de repères intangibles pour le collectif. Ce n’est pas simple. Mais je crois que nous y sommes parvenus. Les résultats seront-ils toujours au rendez-vous avec un nouveau coach, avec la même permanence qu’en équipe de France masculine ?
Avant, quand on arrivait aux commandes d’une équipe, on voulait marquer son empreinte sur le jeu. Je pense que ce temps-là est révolu. On donne surtout une orientation, une cohérence dans le coaching. Le handball ne change pas forcément tous les six mois. C’est très compliqué, après avoir dirigé avec votre vision et vos méthodes, d’intervenir sur la suite en étant une espèce de vieux sage. Mais si on me demande, je n’ai jamais, dans quelque domaine que ce soit, refusé de prodiguer un conseil bienveillant. »
Lutter contre la répétition
Clémence Monnery, 36 ans, ancienne athlète et entraîneuse de l’équipe de France de plongeon depuis 2021, s’applique à casser la routine des entraînements de sa discipline, qui exige la répétition des gestes jusqu’à la création d’automatismes indispensables à la performance.
« Aux Jeux olympiques, à 3 m ou à 10 m, les filles doivent réaliser cinq plongeons, les garçons six. Chaque exécution durant moins de 2 secondes, l’action totale ne dépasse pas les 10 secondes pour les filles, 12 pour les garçons. Et tout se joue sur cette durée réduite. Il y a pourtant plein d’éléments à maîtriser : dès le départ, la meilleure trajectoire et la meilleure hauteur possible, puis les meilleurs changements de rythme entre les rotations et les vrilles exécutées, et enfin l’entrée dans l’eau limitant au maximum les éclaboussures.
Le but de l’entraînement est d’automatiser tous ces gestes, en les répétant encore et encore. C’est beaucoup par un travail “à sec” pour le départ et les rotations, avec un tremplin, un trampoline, en arrivant sur un tapis, car le plongeon, c’est de la gym. Ensuite on enchaîne les différentes phases. En approche de la compétition, on peut réaliser une soixantaine de plongeons par jour à 3 m, une vingtaine à 10 m car il faut limiter le choc au moment du contact de l’eau, la vitesse de chute atteignant les 60-70 km/h.
Pour contrer l’effet répétitif, on essaye donc de varier la forme et le fond des séances d’entraînement : travail à 1 m, à 3 m, exécution de toute la série de plongeons dans l’ordre, ou uniquement un des plongeons cinq fois… On utilise la musique, on fait des jeux pour faire de la place à l’amusement. Il nous faut casser la routine. On peut aussi créer des conditions d’instabilité, par exemple en modifiant les départs, en changeant les appuis, afin que le plongeur soit capable le jour J de réagir si besoin pour réussir son plongeon.
« Musique, jeux… Pour contrer l’effet répétitif, on essaye de varier la forme et le fond des entraînements »
Pour éviter la monotonie, nous avons aussi une approche qui prête une grande attention au groupe, même dans une discipline très individuelle. Ce n’est pas forcément simple à faire comprendre. On met donc aussi en place des activités communes hors entraînement. Du badminton, des sports collectifs, etc. Cela permet également de mieux lutter contre la peur, parce que le plongeon est une discipline qui souvent fait peur. Donc cette ambiance est aussi l’occasion de se sentir bien entouré, soutenu, encouragé. Tout cela se travaille.
Et peut-être encore plus aujourd’hui qu’hier. Mes athlètes, à l’Insep, font tous les jours chambre-self-entraînement, chambre-self-entraînement. Avec les réseaux sociaux, ils sont connectés, et profitent donc de cette fenêtre vers l’extérieur. Mais du coup, il y a moins de partage réel, moins de transversalité aussi avec les autres sports. Pour la plupart d’entre eux, leur seule vie, c’est de plonger. Les à-côtés, à mon époque au début des années 2000, étaient beaucoup plus importants que maintenant. Avant, le fait de casser la routine venait plus de la part des athlètes, et moins de l’encadrement. Aujourd’hui, c’est l’inverse. »
Gérer les ego
Vincent Collet s’apprête à disputer ses troisièmes Jeux olympiques à la tête de l’équipe de France masculine de basket-ball. Au milieu des stars du parquet, l’entraîneur doit gérer les caractères et les personnalités de son effectif pour s’assurer de l’équilibre de son équipe.
« Au sein d’une équipe, la hiérarchie a toujours existé. Pour que ça fonctionne, il faut qu’il y ait des leaders. Le plus facile, c’est lorsque ces leaders sont une évidence pour tout le monde, staff et joueurs compris. Si le coach peut donner une direction, le plus important reste l’acceptation et la reconnaissance de ces leaders par l’ensemble du groupe.
Il y a trente ans, les joueurs étaient des vedettes du championnat de France de basket. Ce qui a changé aujourd’hui, c’est que vous avez à la fois des joueurs évoluant en Europe et certains qui jouent en NBA, où les règles du basket diffèrent un peu (1). Forcément, cette rivalité entre les deux coins du globe peut intervenir. Dans les années 2000-2010, tout le monde était derrière Tony Parker, il faisait l’unanimité et c’était une force pour l’équipe. Aujourd’hui, nous fonctionnons davantage avec un leadership partagé.
Toutefois, demeure un équilibre à trouver entre le fait que chacun sache la place qui est la sienne au sein d’un effectif et, en même temps, la possibilité de redistribuer les cartes, pour que les joueurs ne se laissent pas aller à une certaine forme de confort. La remise en question, dans le sport de haut niveau, doit être permanente, et les joueurs le savent bien.
Lorsqu’un nouveau joueur éclôt, comme ça a été le cas avec Victor Wembanyama en 2022, tous les membres de l’équipe ne le voient pas d’un bon œil. On ne peut pas empêcher des joueurs, même professionnels, de ressentir une pointe de jalousie quand un nouveau menace leur place. Avec Victor, nous n’avions pas seulement l’arrivée d’un jeune joueur, mais celle du meilleur joueur de l’équipe, donc forcément, ça décale tout le monde. Il a eu l’intelligence d’arriver avec sa fraîcheur, il n’a écrasé personne. L’acceptation, pour les anciens, n’en est que plus facile.
« C’est fondamental, en tant qu’entraîneur, de se remettre soi-même en question »
En revanche, si un joueur aux qualités indéniables ne peut se fondre dans un effectif, il faut faire un choix. Ce choix de ne pas prendre un joueur est dur mais indispensable pour un entraîneur. Ce qui fait la différence entre le regard d’un coach et celui des médias et du grand public, c’est qu’on sait que la cohésion est fondamentale à la performance. Une addition de joueurs ne fait pas une équipe.
Face aux joueurs parfois frustrés de leur temps de jeu, habitués au banc, il faut discuter. Il n’y a pas une recette à préconiser, c’est très singulier, chaque joueur aura des besoins différents. Mais c’est fondamental de prendre le temps d’expliquer le choix et surtout, en tant qu’entraîneur, de se remettre soi-même en question. On se pose toujours la question de notre légitimité. On aspire soi-même à progresser, à évoluer. On se doit de rester apprenant, quand on exige de ses joueurs qu’ils continuent de progresser. »
Appréhender l’événement
Salim Abidi, entraîneur de l’équipe de France de breaking, s’apprête à vivre les premiers Jeux olympiques de la discipline. Pour les athlètes dont il a la charge, il devra lutter contre l’euphorie et le stress palpable d’un premier grand événement mondial.
« Le fait que les Jeux se déroulent à Paris et qu’à ce stade le break ne soit présent qu’à cette unique édition(la discipline n’est pas reconduite à Los Angeles en 2028, NDLR) doit être un élément de motivation supplémentaire, dont on se sert, en tant qu’entraîneur, pour mobiliser les athlètes. D’ailleurs, certains danseurs qui prenaient ce rendez-vous à la légère mesurent davantage la portée de l’événement, au fur et à mesure que l’échéance approche. Nous leur faisons comprendre que c’est l’occasion de marquer le coup, dans un sport où la France se classe parmi les meilleures nations.
Avec les Jeux olympiques, l’athlète peut à la fois être plongé dans un sentiment d’euphorie déstabilisant et/ou subir une forme de stress handicapante. Avant chaque compétition, je fais un entretien psychologique avec chacun des sportifs, de manière à apprécier leur ressenti. Chacun a un projet et une personnalité différents. Certains auront besoin d’un suivi mental poussé quand d’autres se satisferont du minimum.
Ce qui est vrai dans une discipline comme le breaking, c’est que chaque athlète n’a pas forcément un préparateur mental dans son entourage professionnel. Notre discipline a grandi petit à petit jusqu’à arriver aux Jeux, et les moyens investis dans ce sport n’ont fait qu’accroître. Au sein de l’Institut national du sport, de l’expertise et de la performance (Insep), ils profitent d’un pôle consacré à la préparation mentale qui s’occupe d’accompagner les danseurs dans leur préparation. Pendant longtemps, c’était un peu artisanal, mais il a fallu se professionnaliser pour traiter de la question mentale.
« Une technique essentielle pour nous, entraîneurs, est de répéter des scénarios qui pourraient déstabiliser le jour J, pour mieux les appréhender »
Dans les faits, il existe un bon et un mauvais stress pour le sportif, et il faut le canaliser. Le mauvais stress, c’est la remise en question perpétuelle, les prévisions trop négatives, tandis qu’un bon stress, à l’approche d’une compétition, réside dans les interrogations que l’on peut nourrir sur sa préparation : “Est-ce que j’ai bien travaillé cela ? est-ce que j’ai bien perfectionné ceci ?…” Ce sont des questions légitimes et il est de mon ressort, avec mon équipe, de faire la part des choses dans la tête des danseurs.
Une technique essentielle pour nous, entraîneurs, est de travailler avec l’athlète sur l’éventualité que les événements ne se passent pas bien. On répète des scénarios qui pourraient, le jour J, déstabiliser, pour mieux les appréhender. C’est un juste milieu à trouver entre évoquer toutes les situations inconfortables qui pourraient voir le jour mais ne pas risquer de démotiver pour autant le compétiteur. Ce travail-là est réalisé tout au long de l’année, en étroite collaboration avec le coach de l’équipe de France que je suis et les entraîneurs de club, qui voient les danseurs tout au long de l’année. »
Entraîner hommes et femmes
Ariane Imbert est coach de l’équipe de France de kite (voile). Avec deux sélectionnés (homme et femme), elle vivra les Jeux olympiques de Paris 2024 aux côtés de son binôme entraîneur, Bertrand Dumortier.
« Lorsque j’ai monté mon école de kite (ouplanche à voile aérotractée, NDLR) en 2008, j’ai progressivement commencé à entraîner des gamins qui naviguaient bien et j’ai créé un petit centre d’entraînement. Je les ai, plus tard, emmenés sur quelques compétitions.
« Pour dynamiser la discipline, j’ai toujours voulu entraîner tout le monde en même temps : jeunes, expérimentés, hommes, femmes, amateurs et champions »
En 2011 intervient la reconnaissance du haut niveau dans le kite avec la Fédération française de vol libre (FFVL). Mais à l’époque, nous avions très peu d’athlètes. Pour dynamiser la discipline, j’ai toujours voulu entraîner tout le monde en même temps : des jeunes, des expérimentés, des hommes, des femmes, des amateurs et des champions. Dans l’idée, des enfants pouvaient pratiquer le kite avec de futurs champions olympiques ! Je voulais créer une vraie émulation dont tout le monde pouvait tirer profit.
Aujourd’hui, pour échanger avec d’autres coachs d’autres catégories, je sais que certaines filles en ont marre d’être à la traîne par rapport aux garçons, mais dans ma catégorie, ils ne sont pas du tout concurrents. Généralement, les garçons sont de bons lièvres et apportent beaucoup aux filles, ça les tire vers le haut. Au niveau technique, il y a beaucoup d’échanges entre eux. Les filles amènent, dans l’ambiance de l’équipe, une certaine stabilité et une sérénité. Voire un peu de douceur et d’humour, ce qui fait que le groupe tient très bien en mixte, et je ne me voyais pas du tout séparer ce groupe en deux.
Quand il a été annoncé que le kite serait discipline aux Jeux olympiques de Paris, les Français étaient déjà leaders depuis un moment sur la scène internationale, et j’ai demandé à la fédération de ne pas changer ce fonctionnement-là. Ils m’ont fait confiance. Au départ, il était prévu une médaille mixte en relais, donc forcément, le fait d’entraîner hommes et femmes ensemble était logique. Mais lorsque nous avons su que la course au large n’était pas retenue par le Comité international olympique et qu’il y aurait une médaille hommes et une médaille femmes, la FFVL m’a demandé si je pouvais gérer les deux. J’ai dit oui à la seule condition qu’un cadre technique de la fédération, Bertrand Dumortier, m’accompagne dans ce qui est désormais un binôme.
Pour coacher en duo, les rôles sont répartis en fonction du feeling. En tant qu’entraîneuse, j’ai appris en même temps que mes athlètes, là où Bertrand en est à sa sixième préparation olympique. J’ai des qualités de management, je sais déléguer et aller chercher la bonne personne pour m’épauler. Bertrand, lui, a des connaissances dingues dans la stratégie, en analyse data. Il maîtrise parfaitement les logiciels et les nouvelles technologies, ce qui est fondamental dans le monde du kite, car on est souvent considérés comme les Formule 1 de la voile. À l’inverse, je maîtrise l’aspect technique, sécuritaire, et j’ai une connaissance historique de nos athlètes, que je suis depuis longtemps. À nous deux, je pense que nous formons le coach parfait ! »
Apprendre à gagner
Florian Bruzzo, 42 ans, a réussi à faire sortir de l’ombre l’équipe de France de water-polo en assurant sa qualification aux Jeux de Rio en 2016, une première depuis un quart de siècle. L’entraîneur ambitionne cette fois de bousculer la hiérarchie mondiale en décrochant un podium à Paris.
« Quand je prends pour la première fois les rênes de l’équipe de France de water-polo en 2012, je me retrouve face à un champ de ruines. Ma première rencontre avec les joueurs se déroule à Paris pendant les Jeux de Londres : dès mes premiers mots, je partage ma vision en leur disant qu’il est absolument anormal d’en être absents, que nous ne sommes pas plus bêtes que les autres sports collectifs français, et donc que nous devons viser la qualification à Rio en 2016. Les garçons me prennent alors pour un hurluberlu.
Je m’applique d’abord à évacuer certaines croyances limitantes qui traduisent seulement un manque de confiance. Je refuse surtout de commencer un match dans l’idée seulement de perdre de peu. C’est une espèce de maladie chez nous. Je veux changer cette mentalité tout de suite. Je ne comprends pas que l’on puisse partir loin de sa famille, gagner des clopinettes, faire d’énormes sacrifices, pour quoi ? Juste faire un stage en bleu, et jouer gentiment quelques compétitions ?
Moi, je ne me lève pas le matin pour participer, mais pour gagner. J’embarque les joueurs, qui finalement s’impliquent à fond. Ce n’est pas évident car tout le monde nous rit alors au nez. Se qualifier à Rio ? Certains dirigeants me disent carrément : “Florian, arrête de leur mettre des choses comme ça dans la tête.” Mais les joueurs voient que, avec l’encadrement, nous essayons de leur offrir les meilleures conditions possible. Ils nous rendent au centuple notre investissement. Pour moi, ce sont des pionniers. Ils montrent à tout le microcosme que c’est possible puisque nous allons à Rio, même si nous ne finissons que onzièmes.
Quand je reviens aux commandes en 2021, le groupe a beaucoup bougé mais la culture de la gagne est bien là. Je vérifie que nous sommes d’accord sur l’objectif pour Paris 2024 : un podium cette fois, en assumant ce désir de médaille. Tout le monde est monté en compétences. J’ai pour ma part travaillé l’apport de la psychologie, que ce soit à titre personnel pour comprendre les ressorts de mes actions, dans ma relation avec les athlètes ou dans la dynamique de groupe. J’apporte aux joueurs un espace nouveau d’expression, dans le secret, non pas de la confession, mais de la consultation.
« C’est l’autodétermination des athlètes qui fait qu’ils peuvent se transcender ou pas »
Cette ressource, libre aux joueurs de s’en saisir ou pas. Mais je crois beaucoup à cette vision à 360 degrés de la performance, c’est-à-dire qui intègre tout ce qui est autour du water-polo, avec des spécialistes du sommeil, de la nutrition, des protocoles de récupération, des protocoles d’échauffement, de la préparation mentale… Tout cela conduit progressivement à un management participatif. Je fais de plus en plus de place aux joueurs. Nous avons créé un groupe de leaders. J’essaye de développer de plus en plus la communication entre eux pendant les entraînements. Je sais m’écarter et dire : les gars, allez-y.
C’est l’autodétermination des athlètes qui fait qu’ils peuvent se transcender ou pas. C’est en tout cas comme ça que nous sommes arrivés dans le dernier carré du Mondial l’an dernier. Ce qui me surprend toujours, c’est la capacité de l’être humain à se mettre des barrières. Même là, pendant les semaines de stage de préparation pour Paris 2024, les gars découvrent qu’ils sont capables de choses qu’ils n’imaginaient pas. Alors oui, j’assure que nous pouvons prétendre à une médaille. Si nous ne la décrochons pas, c’est le sport qui le décidera, mais surtout pas nous qui nous serons autocensurés. »
Rebondir après l’échec
Emmanuel Huruguen, 45 ans, entraîneur des relais 4×400 m d’athlétisme, confronté en mai à la contre-performance de son relais masculin pourtant vice-champion du monde, tente de préserver la solidarité indispensable et la dynamique collective de son groupe pour rebondir aux Jeux de Paris.
« L’échec, nous l’avons connu début mai 2024 lors des Mondiaux de relais à Nassau, aux Bahamas, où nous espérions assurer la qualification pour Paris 2024 de nos relais 4×400 femmes, mixte, et messieurs, ce dernier étant le plus attendu puisque vice-champion du monde en 2023. Et c’est justement ce relais qui est passé à côté, d’abord à cause d’une blessure d’un athlète lors d’une série, puis à cause d’une erreur de transmission en repêchage, qui nous fait manquer la qualification pour 5 centièmes de seconde.
« Le poids de la responsabilité doit rester collectif »
Dans ce cas-là, pour rebondir, on commence par contextualiser. D’abord la blessure d’un relayeur : elle intervient après un tirage au sort qui nous place dans la même série que les Américains, intouchables, et donc dans l’obligation, puisque seuls les deux premiers sont qualifiés, de vraiment performer derrière eux. C’est un aléa qu’on ne peut pas contrôler, mais qu’il faut prendre en compte. Et dans ce cadre, le maître-mot de l’accompagnement est la solidarité.
Pour la course de repêchage, il peut certes y avoir une part de responsabilité individuelle, mais mon rôle est là encore de souligner que l’erreur résulte en fait d’un travail d’équipe. Parfois, je me retrouve devant des athlètes qui s’excusent. Moi, j’explique que si un relayeur prend une mauvaise décision dans une situation compliquée, c’est le résultat de ce qui s’est passé avant et qui amène une situation qu’il n’aurait pas connue sans ce qui précède. Le poids de la responsabilité doit rester collectif.
Reste qu’il faut digérer l’épisode. Cela passe par de longs débriefings individuels, que nous réalisons avec les entraîneurs personnels de chaque athlète, car ce sont eux les préparateurs de leurs athlètes au quotidien, et qu’il faut une clarté de compréhension pour tous les intervenants. J’essaye alors de débusquer les éléments qui pourraient être problématiques lors d’une prochaine sélection, pour éviter le grain de sable qui peut gripper la machine. Le débriefing concerne aussi tous les membres de l’équipe de relais, messieurs et dames, soit 17 athlètes au total dans le cas de Nassau, car une telle contre-performance peut aussi avoir des conséquences sur le relais mixte.
Contrer la déception est vraiment très complexe et il n’y a pas de science exacte. Le relais masculin s’est finalement qualifié au temps. D’autres aléas nous ont empêchés de vraiment performer aux championnats d’Europe. Mais Paris sera encore une autre histoire. Les Jeux sont dans toutes les têtes depuis un an. Il va falloir réussir à en faire une force plutôt qu’un poids. Il faut aussi que notre public transcende les athlètes, les porte vers le meilleur.
L’athlétisme est un des sports où il y a le plus de concurrence internationale, et cela se répercute évidemment sur les résultats. Tous les pays du monde sont représentés dans l’athlétisme, la compétition est très dense. Au public d’être vraiment généreux avec les athlètes français, de leur transmettre des émotions, de leur permettre à tous de battre leurs records personnels et après, on verra bien par rapport à la concurrence si cela mène aux podiums. Si on parvient à ce soutien, tous ensemble, la France dans son entier poussant très fort, alors on n’aura pas de regrets, on sera à notre place. »
(1) Différence dans la taille entre les terrains, durée d’un match, distance de ligne à trois points… Il existe quelques différences entre les matchs organisés par la Fédération internationale de basketball (Fiba) et le championnat américain (NBA).
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