l’ONU et l’Union européenne appellent à l’apaisement après l’assignation à résidence du vice-président Riek Machar
Le vice-président Riek Machar a été assigné à résidence, a confirmé vendredi 28 mars le pouvoir sud-soudanais. Un convoi de véhicules lourdement armés, dirigé par le ministre de la défense et le chef de la sécurité nationale, avait pénétré mercredi soir « de force dans la résidence du vice-président » à Juba, et l’avait arrêté, selon le parti de M. Machar.
M. Machar est accusé d’avoir « agité » ses « bases » pour qu’elles se rebellent contre le gouvernement et que le pays « retourne en guerre », a expliqué vendredi le porte-parole et ministre de l’information, Michael Makuei Lueth. « Il fera l’objet d’une enquête et sera traduit en justice », a-t-il ajouté.
Dans un communiqué, le parti de M. Machar a qualifié la privation de liberté de son chef de « violation flagrante » de l’accord de paix de 2018 et de « tentative (…) de consolider le pouvoir par des moyens inconstitutionnels ». A terme, le président Salva Kiir et ses soutiens veulent « dissoudre le gouvernement » et « suspendre la Constitution », « ouvrant la voie à un régime autocratique total », a-t-il accusé.
L’arrestation de M. Machar par des forces loyales au président Salva Kiir, après des semaines sous haute tension, fait craindre un retour à la guerre civile dans le pays, encore fragilisé par une sanglante guerre civile entre des forces soutenant les deux hommes entre 2013 et 2018.
Au terme de ce conflit qui avait fait quelque 400 000 morts et 4 millions de déplacés, les deux factions étaient parvenues en 2018 à un fragile accord de partage du pouvoir, que l’assignation à résidence du vice-président semble anéantir.
Jeudi, le parti de M. Machar dénonçait « une tromperie, une rupture de promesse » par le camp de M. Kiir, et a déclaré qu’il considérait comme abrogé l’accord de paix de 2018.
Médiation du Kenya
« Déposez les armes, placez la population du Soudan du Sud au-dessus de tout », a lancé vendredi le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, à l’adresse des dirigeants du pays. L’Union européenne s’est dite « vivement préoccupée » par l’arrestation de M. Machar, appelant M. Kiir à « revenir sur cette action et à apaiser la situation dans le pays ».
Le non-respect de l’accord de paix « conduira à un retour catastrophique » à la guerre et menace « des millions de vies », a prévenu jeudi la commission de l’ONU chargée de documenter les violations des droits humains dans le pays.
Restez informés
Suivez-nous sur WhatsApp
Recevez l’essentiel de l’actualité africaine sur WhatsApp avec la chaîne du « Monde Afrique »
Rejoindre
C’est dans ces circonstances que l’ex-premier ministre kényan, Raila Odinga, 80 ans, est arrivé vendredi en médiateur dans la capitale sud-soudanaise, a déclaré son porte-parole, Dennis Onyango, à l’Agence France-Presse (AFP). La décision avait été prise après un « entretien téléphonique avec le président Salva Kiir » et des consultations avec le président ougandais, Yoweri Museveni, et le premier ministre éthiopien, Abiy Ahmed, avait précisé le chef d’Etat kényan, William Ruto, qui préside la Communauté de l’Afrique de l’Est.
Aucune élection présidentielle depuis 2011
Juba, qui s’était réveillée jeudi au son des tirs d’artillerie, semblait plus calme vendredi avec ses magasins ouverts et des passants dans les rues, a constaté un correspondant de l’AFP. Mais une forte présence militaire est toujours visible devant la résidence de M. Machar, dont un tank.
Depuis février, plus de vingt alliés politiques et militaires de M. Machar ont été arrêtés, dont certains sont détenus au secret. Depuis la déclaration d’indépendance avec le Soudan en 2011, aucune élection présidentielle n’a été organisée au Soudan du Sud, pays parmi les plus pauvres malgré d’importantes ressources pétrolières.
Le gouvernement britannique, qui avait réduit ses effectifs diplomatiques au strict minimum, a exhorté jeudi soir ses ressortissants à quitter « immédiatement » le pays. L’Allemagne et la Norvège ont fermé leurs ambassades à Juba. Les Etats-Unis ont également réduit leurs effectifs au strict minimum, et appelé leurs ressortissants à quitter le pays.
Le chef de la Mission des Nations unies au Soudan du Sud (Minuss) avait dénoncé cette semaine des attaques indiscriminées contre les civils, notamment dans le nord-est du pays. Des affrontements s’y déroulent depuis des semaines, notamment entre les forces fédérales loyales au président Kiir et la milice « Armée blanche », accusée par le pouvoir de collaborer avec M. Machar.
Crédit: Lien source