Nasir, théâtre d’une spirale guerrière au Soudan du Sud : l’accord de paix vacille

Hier, la petite ville de Nasir, nichée dans les confins nord-est du Soudan du Sud, s’est embrasée sous le fracas des armes. Une fois encore, l’armée sud-soudanaise a croisé le fer avec la White Army, cette milice communautaire aux allégeances troubles, étroitement liée à l’opposant historique Riek Machar. Ainsi, les échos de ces combats, qui persistent depuis la veille, résonnent comme un glas funeste sur une paix déjà chancelante, fruit de l’accord signé en 2018 entre les belligérants d’une guerre civile qui avait ensanglanté le jeune État.

Coup de théâtre à Juba : l’arrestation du général Duop Lam

Loin de se cantonner à un simple échange de tirs, cet épisode a pris une tournure dramatique avec un coup de théâtre à Juba, la capitale. En effet, le lieutenant-général Gabriel Duop Lam, figure éminente et chef d’état-major des forces loyales à Machar, a été arrêté au cœur du quartier général militaire. Cette arrestation, aussi soudaine qu’un orage d’équinoxe, a jeté une ombre pesante sur un paysage politique déjà fissuré. Dans ce contexte, les autorités ont déployé des cordons de sécurité autour de la résidence de Riek Machar, premier vice-président et ancien chef rebelle, transformant son havre en une forteresse assiégée. Cependant, cette mesure trahit l’angoisse d’un pouvoir central aux abois, tout en restant muet face à ces bouleversements.

L’opposition s’indigne : une purge ou une simple stratégie ?

Par ailleurs, du côté de l’opposition, les langues se délient avec une amertume palpable. Ainsi, Puok Both Baluang, porte-voix de Machar, dénonce une rafle ciblée et affirme que les autorités ont également arrêté deux autres généraux, Koang Gatkuoth et Wesley Welebe. « Pour des raisons obscures », a-t-il martelé, laissant planer le spectre d’une purge déguisée. Malgré cela, Riek Machar, dans une posture de détachement presque olympien, rejette toute responsabilité dans les affrontements de Nasir, arguant que la White Army agit de son propre chef. En d’autres termes, cette défense peine à convaincre, tant les liens historiques entre cette milice et son camp sont ancrés dans les mémoires.

Nasir : les voix de la société civile alertent sur les risques pour la paix

En outre, les murmures de la société civile esquissent une tout autre fresque. Ter Manyang Gatwech, du Center for Peace Advocacy, pointe du doigt une accusation lancinante : l’armée sud-soudanaise soupçonnerait les forces de Machar de souffler sur les braises de Nasir en soutenant la White Army. De ce fait, cette hypothèse, si elle se vérifie, ferait de l’arrestation de Duop Lam un acte de représailles autant qu’un avertissement. Edmund Yakani, figure respectée de l’ONG CEPO, ne mâche pas ses mots : « Ces violences dans le Haut-Nil sont une lame qui menace de trancher le fil ténu de l’accord de paix. » C’est pourquoi, cette mise en garde trouve écho dans les appels pressants aux garants de cet accord – l’Union africaine, l’ONU et les pays voisins – pour qu’ils interviennent et jugulent cette fièvre belliqueuse.

Nasir : une paix fragile au bord du gouffre

Enfin, au cœur de cette tourmente, le silence de l’armée sud-soudanaise, dirigée par le président Salva Kiir, pèse comme un ciel chargé de nuages. En effet, aucun communiqué, aucune explication n’a filtré, laissant le champ libre aux spéculations et à une tension qui s’épaissit d’heure en heure. À Nasir, les soldats réguliers affrontent de jeunes armés aux visages noircis par la suite de la guerre, et ces combats ne constituent pas un feu de broussailles isolé. Au contraire, ils s’inscrivent dans une litanie de heurts qui, depuis le début de l’année, érodent les fondations d’une unité nationale promise par l’accord de 2018. Dès lors, cet arrangement, censé marier les forces de Kiir et de Machar dans une armée unifiée, ressemble aujourd’hui à un serment prononcé sous la contrainte, prêt à se briser au moindre souffle.

Tandis que les balles sifflent à Nasir, que les familles fuient leurs maisons pour un abri incertain, une question persiste : combien de fois encore le Soudan du Sud devra-t-il danser au bord du gouffre avant que la paix, cette étoile fugitive, ne daigne enfin s’attarder dans son ciel ? **Peut-être**, la réponse sommeille-t-elle dans les cendres de ces combats, attendant qu’un nouveau vent vienne la dévoiler.

 


Crédit: Lien source

Laisser un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.