TNTV : A l’occasion de la célébration du 11ᵉ anniversaire de la réinscription de la Polynésie sur la liste des pays à décoloniser de l’ONU, vendredi, le Tavini a affiché son unité derrière le président. Qu’en pensez-vous ?
Gaston Flosse : « Ils fêtent les 11 ans d’inscription aux Nations Unies, mais il n’y arrivera jamais. Ce n’est pas à New-York qu’il faut aller, mais à Paris pour rencontrer le Président de la République française, d’autant qu’il a tous les atouts : le président de la Polynésie, de l’Assemblée, une majorité. Qu’est-ce qu’il attend pour bouger. C’est à Paris qu’il faut aller et non à New-York. Cela fait 11 ans, mais quelle est la suite de ces démarches ? Zéro. Il oublie de fêter également les 47 ans de lutte pour avoir l’indépendance, puisqu’il a lancé son mouvement il y 47 ans. En 47 ans, il n’a rien fait. Son indépendance n’a pas avancé d’un millimètre. Il prend mal les choses. Il ne peut pas se dégager complétement de la France. Nous avons besoin de la France comme la France a besoin de nous. Mais à cette allure, il n’y arrivera jamais ».
TNTV : Quel bilan dressez-vous de la première année du gouvernement Brotherson ?
Gaston Flosse : « Lorsque j’entendais et que j’ai lu la retranscription de son discours, qu’il avait commencé son année par trouver un déficit de 34 milliards dans les caisses du Pays (…), j’ai aussitôt appelé le président Fritch. Je lui ai dit : ‘Président, tu m’avais dit que tu avais laissé une réserve de 26 milliards. Qui est le menteur entre vous 2 ?’ Le Président Brotherson ou le Président Fritch. Il m’a dit : ‘Viens à mon bureau, je vais te montrer les documents’. (…) Il me montre un document où effectivement il y a une réserve de 26 milliards. Donc, malgré le respect que je vous dois, monsieur le Président Brotherson, vous nous avez menti. Il n’y a pas de déficit de 34 milliards. Le président Fritch vous avait laissé 26 milliards de réserves. Deuxième point qui est intéressant : un journaliste de TNTV, monsieur Yan Roy, interroge le président sur le fait que tous les chefs de service de l’hôpital de Taaone veulent démissionner. Voici la réponse du Président Brotherson : ‘Pour l’instant, ce n’est pas acté (…) Je comprends tout fait leur désarroi. Il n’y a ne serait-ce qu’au plan bâtimentaire plus de 15 milliards de travaux qui n’ont pas été effectués et qui auraient dû l’être ces 10 dernières années’. Cela veut dire quoi ? Ce ne sont pas les 10 milliards de travaux. On ne peut pas prendre des crédits quelque part et les salaires, le fonctionnement, de l’autre côté. Ce sont 2 parties tout à fait séparées du budget. L’un, c’est l’investissement et l’autre le fonctionnement. Et mettre tout cela sur le dos du Président Fritch…Monsieur le président Brotherson vous avez encore menti. C’est parce que vous n’avez pas mis les moyens pour recruter du personnel hospitalier (…) Je le sais moi-même. J’ai été la semaine dernière à l’hôpital et, dans la nuit, j’ai eu une douleur au foie. J’appelle (…) et pas de réponse (…) Je vois une infirmière qui arrive en courant et qui me dit : ‘Ne vous fâchez pas, je suis seule pour tout le bloc’ (…) Évidemment, on ne met pas les moyens. On a parlé tout à l’heure du cancer. Dans le projet de budget, le Président Fritch avait inscrit 5 milliards de crédits pour créer l’Institut du cancer en Polynésie. Et bien, le Président Brotherson a pris ces 5 milliards pour les mettre où ? Je ne sais pas. Il n’y a que 500 millions maintenant. C’est zéro. Cela ne peut pas marcher ».
TNTV : Le CHPF est en crise. Le gouvernement a annoncé qu’il engagerait d’importants moyens financiers pour le soutenir. Est-ce la solution ?
Gaston Flosse : « Pas du tout. La solution pour diriger un pays, c’est d’abord de faire entrer de l’argent dans les caisses. S’il n’y a pas d’argent en caisse, comment peut-on faire du social ? La priorité, c’est le social, c’est l’emploi, l’éducation, la solidarité. Mais s’il n’y a pas d’argent en caisse, que faire ? Il faut d’abord remplir les caisses, non pas par les impôts ou en allant mendier à Paris, mais déjà en faisant un effort sur nous-mêmes. Il faut voir nos activités économiques. Nous avons cerné le tourisme, la perle, la pêche. Il faut y ajouter la vanille, l’artisanat. Lorsque nous aurons mis ça à flot, et si nous n’avons pas assez d’argent, à ce moment-là, on va à Paris. Mais il faut commencer par soi-même, mais ce n’est pas le cas ».
TNTV : Vendredi sur notre plateau, des responsables du patronat et des syndicats de salariés exprimaient leur inquiétude pour les mois à venir. Partagez-vous cette analyse ?
Gaston Flosse : « J’ai surtout lu la déclaration du Président Brotherson (…) Sur l’économie, que dit-il ? ‘En termes d’activité économique, je n’ai pas vu les chiffres de l’ISPF, ni de l’IEOM, d’indicateurs qui viennent décrire un ralentissement de l’économie’. Mais bien sûr, parce que ces 2 chiffres sont le produit intérieur brut et le taux de croissance. Mais ces chiffres ne sont publiés que 2 ans après (…) Donc pour 2024, il faut remonter à 2022 (…) Aujourd’hui, notre économie est au plus bas. Il n’y a aucune visibilité pour l’avenir. Il y a également toutes les factures des travaux qui ont commencé (…) qui ne sont pas payées ».
TNTV : Comment relancer l’économie selon vous ?
Gaston Flosse : « Par exemple, on parle de tourisme et on n’a pas assez de chambres. Vous avez un terrain de 57 hectares à Outumaoro où pousse une forêt d’Acacias. Nettoyez ce terrain, mettez du sable et une belle plage et allez chercher des investisseurs (….) C’était l’objet de notre projet Mahana Beach (…) Il y avait de la place pour construire au moins 4 hôtels et recevoir les touristes, d’autant qu’aujourd’hui il y a une nouvelle compagnie américaine, Delta Air Lines, qui vient concourir toutes ces compagnies aériennes et mettre à mal Air Tahiti Nui. La perle est complètement à zéro. Une perle c’est le prix d’un roulement à billes. La pêche, on commence à peine. Nous sommes à 42 tonnes de production. Il faut donner un objectif. Une faute du Président Brotherson, c’est de ne pas avoir de plan. Il touche à tout. On veut tout faire. On retourne à Singapour, on voyage partout alors que c’est ici qu’il faut soigner le malade. Il est chez nous. Avec la vanille, par exemple, nous pourrions exporter 300 tonnes par an. Cela remplirait nos caisses et ferait circuler de l’argent dans la population (…) ».
TNTV : Dans un autre domaine, quel regard portez-vous sur les émeutes qui déchirent la population de Nouvelle-Calédonie ?
Gaston Flosse : « D’abord, je ne comprends pas que le ministre de l’Outre-mer ait touché à la loi. Elle était acceptée par tout le monde. Elle a été mise en pratique. Que l’on continue (…) Deuxièmement, la solution, c’est le pays souverain associé à la France. C’est l’erreur d’Oscar Temaru de ne pas vouloir parler avec la France. Il ne veut pas aller à Paris parler avec monsieur Macron, mais va à New-York parler avec le secrétaire général des Nations Unies. Ça donne quoi ? Zéro (…) Il a tout en main pour dire au Président de la République : ‘je représente le peuple polynésien. Voici-ci sa volonté’ (…) Le fait de ne pas vouloir travailler avec la France…mais c’est un mur devant nous. On peut diriger notre pays, mais on ne peut pas payer ce qu’on devrait payer. Il nous manquerait 100 à 120 milliards. C’est ce dont il faut discuter avec la France. D’où l’association avec la France. Nous avons donné la bombe atomique. Alors, et en retour ? Le Président Macron l’a dit quand il est venu en 2021 : ‘La Nation à une dette envers la Polynésie’ ».
TNTV : Le gouvernement veut retirer la date du 29 juin des jours fériés. Quel est votre avis ?
Gaston Flosse : « Est-ce que c’est urgent, d’abord ? On perd son temps sur cela alors qu’il y a plus urgent. Nous avons eu de la chance. Nous avons tous les signes distinctifs d’un pays indépendant. Un territoire d’outre-mer, ou un département, n’ont pas de drapeau. Nous avons un drapeau autorisé par le Parlement français (…) C’est officiel. Nous avons un hymne (…) et nous avons un sceau et cette Fête de l’Autonomie. Notre fête à nous. C’est un mouvement politique, bien sûr. On ne va pas mélanger le politique et le culturel avec cette date du mois de novembre. Quel que soit le gouvernement en France, le 14 juillet, c’est quoi ? C’est la Révolution. On a coupé le cou du Roi Louis XVI et on fête ça. Et aucun gouvernement n’a modifié la date. L’hymne, c’est la Marseillaise et cela l’est encore aujourd’hui (…) C’est comme ça. Ce sont des signes sacrés qui distinguent une nation ».
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