Pour que le Gabon pèse, il doit compter ses impacts… pour financer son avenir | Gabonreview.com

 

À l’heure où la planète réévalue ses priorités, le Gabon détient un atout inestimable : sa richesse écologique. Mais pour espérer en tirer profit sur la scène mondiale, estime Adrien NKoghe-Mba*, le pays doit franchir une étape décisive — mesurer l’impact réel de ses engagements environnementaux et sociaux. Car dans l’économie verte de demain, seules les données crédibles ouvrent les portes du financement.

«C’est cela, aujourd’hui, être un laboratoire d’excellence pour l’économie verte : non pas un terrain d’essai pour idées abstraites, mais un pays qui transforme ses ressources naturelles en valeur mesurée, partagée, reproductible.» © GabonReview

 

«Ce que l’on ne mesure pas, on ne le finance pas.» Cette maxime est devenue la boussole des grandes entreprises, des États responsables, et des territoires en quête d’avenir. Dans un monde où la transition écologique est le nouveau champ de compétition — technologique, diplomatique, économique — mesurer son impact écologique et social n’est plus une option : c’est une condition d’existence.

Le Gabon, avec ses 88% de couverture forestière, ses écosystèmes uniques et son ambition affirmée pour l’économie verte, est l’un des pays les mieux positionnés pour devenir un modèle de transition juste et durable. Mais entre le potentiel et le leadership, il y a un pont à construire : la preuve d’impact.

Pourquoi est-ce si crucial ?

Parce que les bailleurs internationaux, les marchés carbone, les fonds climat ou encore les financeurs de la biodiversité ne financent plus des intentions, ni même des projets bien rédigés. Ils financent des résultats mesurés, traçables, vérifiables. Ils veulent des données de terrain, des indicateurs fiables, des systèmes de reporting transparents. Ils veulent savoir : combien d’hectares restaurés ? Combien d’emplois créés ? Quel effet réel sur les communautés locales ? Quel carbone évité ou séquestré ?

C’est là que se joue l’avenir du Gabon vert. Car la richesse écologique du pays n’a de valeur que si elle est rendue visible, intelligible, comparable. Ce n’est pas un enjeu technique : c’est un enjeu de souveraineté. En mesurant ses impacts, le Gabon reprend le contrôle de son récit. Il ne subit plus les métriques imposées de l’extérieur — il les définit.

Mais il y a plus.

Mesurer, c’est aussi mobiliser. Un État, une collectivité, une entreprise, une ONG, une communauté locale : chacun peut s’aligner autour d’objectifs partagés si les résultats sont clairs et les effets visibles. C’est ainsi que naissent les coalitions ambitieuses. C’est ainsi que l’on passe de projets isolés à des programmes structurants capables de lever des financements à grande échelle.

Et le monde envoie des signaux forts : les financements climat se comptent désormais en centaines de milliards. La biodiversité entre dans les bilans des entreprises. La compensation carbone devient une ligne stratégique pour les multinationales. Le Gabon peut capter ces flux — à condition de prouver sa capacité à générer de l’impact réel.

C’est cela, aujourd’hui, être un laboratoire d’excellence pour l’économie verte : non pas un terrain d’essai pour idées abstraites, mais un pays qui transforme ses ressources naturelles en valeur mesurée, partagée, reproductible. Un pays qui met en place des outils de mesure modernes, forme ses jeunes à ces nouveaux métiers, et impose sa signature dans les circuits mondiaux de la finance verte.

Demain, les grandes puissances seront celles qui sauront restaurer des sols, faire pousser des puits de carbone, générer des revenus à partir de la protection du vivant. Le Gabon peut être cette puissance-là. Mais pour cela, il doit rendre visible ce qu’il fait déjà, structurer ce qu’il expérimente, et inscrire dans la donnée ce qu’il sait intuitivement depuis longtemps : protéger, c’est investir.

*Directeur général de l’Institut Léon Mba et président de l’association Les Amis de Wawa pour la préservation des forêts du bassin du Congo

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