Avec l’exposition (Nous sommes) rivière, terre et ciel présentée à Moncton, la commissaire d’art Laurence Butet-Roch met en lumière les diverses relations que nous entretenons avec la nature, à travers les installations photographiques et vidéo de quatre artistes de différentes régions du pays.
«Pouvons-nous imaginer une économie qui remplacerait l’argent par des cadeaux? Un monde dans lequel nous éprouvons de la gratitude pour tout ce que nous offre la nature et entretenons une amitié réciproque avec elle?», soulève Laurence Butet-Roch dans le texte accompagnant l’exposition collective.
La photographe-journaliste établie à Toronto s’intéresse depuis longtemps aux questions environnementales, l’amenant ainsi à entreprendre des études doctorales dans ce domaine. Elle a monté cette exposition spécialement pour la Galerie d’art Louise-et-Reuben-Cohen dans le contexte du premier Festival Photo Est qui se déroulera du 3 au 6 avril à Moncton et Sackville. L’exposition est déjà en montre. Des œuvres photographiques, un film sur grand écran et une installation de photosculptures lumineuses composent cette exposition qui occupe toutes les salles de la galerie.
Quand la direction de la galerie d’art du campus de Moncton l’a approchée pour concevoir ce projet, elle a eu envie de réunir des œuvres qui se concentrent non pas sur les dommages causés à l’environnement, mais sur les différentes connexions et manières de concevoir sa relation avec la Terre. La commissaire qui suit le parcours de ces quatre artistes depuis longtemps savait que leurs œuvres pouvaient se rattacher au thème et avoir de belles interactions entre elles.
«Je voulais vraiment démontrer que dans un sens, il y a différents rapports à la nature et ces rapports-là vont par la suite créer différents types d’actions. Si on la voit comme au service de l’être humain, effectivement, on va avoir un rapport beaucoup plus extractif où on va essayer d’exploiter la nature. Et d’autre part, si on a justement une relation que ce soit […] de l’amitié, une connexion plus filiale ou familiale, on va avoir des actions qui vont chercher plus à cultiver un rapport réciproque qu’à l’exploitation.»
Une histoire d’amitié
Les œuvres d’Amber Bracken, de Stephanie Foden, d’Alex Jacobs-Blum et de Josée Pedneault reflètent une multitude de façons d’exprimer la relation réciproque avec la nature et évoquent les mondes préservés par cette amitié. Apprendre à s’émerveiller et à exprimer une certaine retenue quand on part à la recherche d’une talle de bleuets sauvages, apprécier la connexion profonde et les sensations tactiles avec son milieu et vouloir protéger une rivière sont des thèmes abordés dans cette exposition.
Dans son projet, Stephanie Foden évoque la rivière Mutuhekau Shipu/Magpie qui a acquis le statut de personne morale selon le droit international. Cette rivière majestueuse de la Côte-Nord du Québec qui se déverse dans le fleuve Saint-Laurent peut ainsi se prévaloir de droits. Si dans le film d’Alex Jacobs-Blum, l’artiste se sent comme faisant partie intégrante de la terre, avec la rivière Magpie c’est un peu l’inverse, fait remarquer Laurence Butet-Roch.
«C’est d’essayer d’utiliser un stratagème humain, la question de personne morale pour venir protéger la rivière. Donc, je trouvais ça intéressant de voir que d’un côté, on peut parler de notre présence comme faisant partie intégrante de la Terre, mais on peut aussi essayer de trouver dans notre système humain des moyens pour venir renverser la tendance.»
En visitant l’exposition, on éprouve un sentiment de bien-être. Sur le son d’un tambour, les œuvres en deux et trois dimensions suscitent des réflexions sur notre relation avec notre environnement naturel. Il est aussi question de justice environnementale.
«[La justice environnementale], ce n’est pas juste une question de distribuer les dommages et les bénéfices de manière équitable, mais ça va beaucoup plus loin et c’est d’avoir un rapport à la terre qui est équitable où il y a cette notion de réciprocité, de protection plutôt que d’exploitation.»
Les quatre artistes sont des femmes. Sans chercher nécessairement à présenter uniquement des œuvres réalisées par des femmes, la commissaire a voulu offrir une visibilité à des artistes qui n’ont pas nécessairement toujours l’occasion d’être mises de l’avant. Elle espère que les gens vont se reconnaître dans certaines images et peut-être réfléchir à leur relation avec la nature.
L’émerveillement est un élément clé dans le travail d’Alex Jacobs-Bloom qui ressort dans cette exposition. Comme le mentionne la commissaire d’art, ce n’est pas seulement quand on visite un grand parc national, mais il peut être au quotidien, en observant par exemple, les journées de grand soleil pendant l’hiver.
L’exposition est en montre jusqu’au 6 avril. Laurence Butet-Roch sera à la galerie le 3 avril pour une présentation avec les artistes.
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