L’UE, pressée notamment par la Belgique, a adopté ce lundi des sanctions contre des personnalités rwandaises. Ces sanctions prévoient l’interdiction de se rendre dans l’UE ainsi qu’un gel des avoirs dans l’Union pour neuf personnes. Elles visent notamment trois hauts gradés de l’armée rwandaise – Ruki Karusisi, Eugène Nkubito et Pascal Muhizi – et le directeur général de l’Office rwandais des mines, du pétrole et du gaz (RMB), Francis Kamanzi. Quatre Congolais cadres du M23, dont son chef Bertrand Bisimwa, sont également visés par les sanctions européennes.
Rupture consommée entre Bruxelles et Kigali
Kigali a presque simultanément annoncé la rupture de ses relations diplomatiques avec la Belgique, accusant l’ex-puissance coloniale d’avoir « pris parti » pour Kinshasa « bien avant et pendant le conflit en cours » en RDC. La Belgique, ancienne puissance coloniale à la fois de la RDC (ex-Zaïre) et du Rwanda, a été l’un des pays les plus critiques de Kigali depuis que le mouvement anti-gouvernemental M23, soutenu par Kigali, a lancé en décembre une offensive éclair dans l’est de la RDC, qui l’a vu notamment s’emparer de Goma, capitale du Nord-Kivu, et de Bukavu, capitale du Sud-Kivu.
« Le gouvernement du Rwanda a notifié aujourd’hui le gouvernement de Belgique de sa décision de rompre les relations diplomatiques, avec effet immédiat », a déclaré le ministère rwandais des Affaires étrangères dans un communiqué. Une décision liée selon Kigali aux « tentatives pitoyables » de Bruxelles de « maintenir ses illusions néocoloniales ».
Kigali, qui avait déjà annoncé en février la suspension des programmes d’aide au développement belges sur son sol, exige que tous les diplomates belges présents au Rwanda quittent le pays dans un délai de 48 heures. La Belgique a « regretté » la décision « disproportionnée » du Rwanda de rompre ses relations diplomatiques et va à son tour déclarer persona non grata les diplomates rwandais en poste sur son sol, a réagi le chef de la diplomatie belge Maxime Prévot. « Cette décision illustre que lorsque nous sommes en désaccord avec le Rwanda, il préfère ne pas dialoguer », a-t-il ajouté.
La Belgique avait notamment demandé fin janvier à l’Union européenne d’envisager des sanctions contre le Rwanda, accusé de violer la souveraineté de la RDC. « Aujourd’hui, la Belgique a clairement pris parti dans un conflit régional et continue à se mobiliser systématiquement contre le Rwanda dans différents forums, utilisant mensonges et manipulations pour créer une opinion hostile injustifiée à l’égard du Rwanda, dans le but de déstabiliser le pays et la région », a accusé Kigali. « La décision d’aujourd’hui reflète l’engagement du Rwanda à protéger ses intérêts nationaux et la dignité des Rwandais, ainsi qu’à défendre les principes de souveraineté, de paix et de respect mutuel », ajoute le communiqué.
La Belgique, un « petit pays » pour Kagame
Dimanche, le président rwandais Paul Kagame avait déjà lors d’un événement public tiré à boulets rouges sur la Belgique, pays qui selon lui « nous a tués tout au long de l’histoire et revient sans cesse nous tuer davantage ». La Belgique est accusée d’avoir favorisé la division ethnique au Rwanda, qui a abouti au génocide des tutsi en 1994. « L’un des plus gros problèmes auxquels nous avons été confrontés est notre colonisation par un petit pays comme la Belgique, qui a découpé notre pays pour qu’il soit aussi petit qu’elle », avait encore dénoncé Paul Kagame.
Soutenu par quelque 4 000 militaires rwandais, selon des experts de l’ONU, le M23 (« Mouvement du 23 mars »), qui dit défendre les intérêts des populations tutsi de l’est de la RDC, a repris les armes fin 2021. Le groupe armé contrôle désormais de vastes pans de territoires dans l’est de la RDC, une région riche en ressources minières. L’Angola, pays médiateur dans le conflit, a annoncé la tenue mardi de pourparlers de paix entre le M23 et Kinshasa à Luanda.
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