Le président Donald Trump a présenté cette semaine ses droits de douane soi-disant réciproques. Le jour de la libération? Plutôt le jour de la déclaration de guerre commerciale contre le monde entier. Le Canada et le Nouveau-Brunswick ont échappé au pire cette fois-ci, mais ne perdent rien pour attendre. Nous ressentirons longtemps les effets de ces grands bouleversements économiques.
Donald Trump a une qualité qu’on ne pourra jamais lui enlever: il a le sens du spectacle. Il aurait pu annoncer ses droits de douane dans un communiqué de presse, dans un message sur Truth Social ou dans une conférence de presse dans son Bureau ovale.
Il a plutôt choisi de le faire à l’extérieur, dans la roseraie de la Maison-Blanche, avec en arrière-plan de gigantesques drapeaux américains. Un travailleur de l’automobile a ensuite déclaré qu’il croyait que Ronald Reagan était le plus grand président de l’histoire des États-Unis, mais que ce titre doit désormais revenir à Donald Trump.
Ce détail est important. Le président est entouré d’idéologues qui partagent ses idées, de courtisans qui chantent ses louanges, de pleutres qui n’osent pas le contredire et de béni-oui-oui.
C’est rêver en couleurs que de croire que la crainte de provoquer une récession mondiale le fera reculer. Même l’effondrement des marchés boursiers n’a rien pour l’émouvoir. Il affirme désormais que c’est un mauvais moment à passer et a même laissé entendre qu’il a fait exprès. Une sorte de grande stratégie, en somme, incompréhensible pour le commun des mortels, mais dont le génie nous apparaîtra bientôt.
Notons aussi que Donald Trump fait exactement ce qu’il a promis de faire. Le président est un menteur pathologique. En ce qui a trait aux droits de douane, il n’a toutefois jamais caché ses intentions. Des dizaines de millions d’Américains ont voté pour ce programme. Même si leur pays devait plonger dans une profonde récession, ils ne risquent pas de lever le petit doigt pour mettre fin aux folies de leur mouvement MAGA (Make America Great Again).
Revenons à cette étrange fin d’après-midi à la Maison-Blanche. Le président et son secrétaire au commerce, Howard Lutnick, ont présenté un tableau montrant les pays avec lesquels les États-Unis ont un différend commercial, leurs supposées barrières tarifaires et celles qui seront désormais imposées comme mesure de rétorsion.
La liste est d’un ridicule consommé. Elle comprend des îlots inhabités de même que des pays africains dont l’excédent s’explique par le fait qu’ils exportent leurs ressources naturelles (par exemple, les diamants du Lesotho) et qui sont trop pauvres pour acheter quelque produit que ce soit manufacturé aux États-Unis.
Le Canada n’était pas sur la liste en question, ce qui est un immense soulagement. Par contre, nos problèmes ne sont pas réglés pour autant. Le bois d’œuvre, l’acier, l’aluminium, les produits non couverts par l’accord de libre-échange et l’industrie automobile ontarienne sont tous sous le coup de droits de douane variables.
La première ministre Susan Holt a réagi à l’annonce de Donald Trump en déclarant que «le Nouveau-Brunswick l’a échappé belle». Elle a raison. Aucun nouveau droit ne s’est ajouté à ceux qui existaient déjà, sauf pour l’automobile. Nous sommes solidaires des Ontariens, mais le fait demeure qu’il ne se construit plus d’autos dans notre province depuis la fin de l’aventure de la Bricklin, en 1975.
Les droits de douane présentement en vigueur et l’incertitude économique ont cependant commencé à faire leur œuvre.
Déjà des gens d’affaires ont contacté le gouvernement provincial afin de profiter du programme mis en place pour atténuer le choc économique provoqué par les choix insensés du maître de la Maison-Blanche. Selon Mme Holt, il s’agit surtout d’entreprises dont les affaires tournent au ralenti ou qui ont perdu leur clientèle en raison des nouvelles barrières tarifaires trumpistes.
Nous ne sommes qu’au début d’un conflit qui s’étirera vraisemblablement sur de nombreuses années.
Pour le moment, la réponse canadienne consiste à contre-attaquer avec nos propres droits de douane, appuyer financièrement nos entreprises en difficulté, faire pression sur les États-Unis pour limiter les dégâts, supprimer les barrières au commerce intérieur et trouver de nouveaux débouchés pour nos produits.
Nous appuyons cette stratégie. Le Canada et le Nouveau-Brunswick ne peuvent pas gagner une guerre commerciale contre les États-Unis, mais nous sommes suffisamment forts pour rester debout dans la tempête en attendant qu’elle prenne fin.
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