« Sans les femmes, l’agriculture ne fonctionne pas »

Aujourd’hui, quel est le poids des femmes en agriculture ?

Il y a tout juste un an, à la veille des manifestations agricoles, la CCMSA a publié une étude sur le sujet. Alors qu’un agriculteur sur trois est une femme, nous voulions savoir qui elles étaient, quels étaient leurs parcours et leurs attentes. Côté chiffres, retenons qu’il y a en France 408 114 femmes qui travaillent à la production agricole en tant que salariées et 118 841 qui sont non-salariées.

Quand on regarde de plus près ces non-salariées, cheffes d’exploitation ou conjointes collaboratrices, une sur deux – seulement – a un conjoint qui travaille dans le milieu agricole et 44 % sont arrivées dans l’agriculture à la suite d’une reconversion professionnelle. Ces chiffres nous disent que l’agriculture sans les femmes, ce serait aujourd’hui très compliqué. Ce métier est de plus en plus choisi, et même si nous souffrons malheureusement d’invisibilité, nous pesons de fait.

Dans l’étude, les agricultrices trouvent leur métier difficile. Pour améliorer leur situation, quelles sont les priorités ?

Dans le livre blanc, nous en avons répertorié quinze, et avons mis en tête la question du statut. Cela peut surprendre, mais entre 15 000 et 20 000 femmes, épouses ou compagnes d’agriculteurs, travaillent encore sans statut. Les « sans profession » existent toujours, et lorsque cette situation se double d’une absence de statut marital, les conséquences peuvent être dramatiques. En particulier si l’exploitant vient à décéder. Nous avons récemment eu un tel cas dans le Maine-et-Loire.

Pour sensibiliser à l’importance du statut, la MSA a programmé une campagne de communication. Prochainement, elle va également proposer un rendez-vous à toutes les personnes sous statut de conjoint collaborateur. Rappelons que, depuis 2019, sa durée est limitée à cinq ans. Pour les femmes concernées, c’est donc le moment de réfléchir à la suite : devenir cheffe ou salariée d’exploitation.

Parmi les priorités du livre blanc, je retiendrai aussi tout ce qui peut faciliter l’articulation vie privée vie professionnelle. L’enquête de 2024 a montré qu’elle restait difficile. En particulier, nous poussons l’idée d’un remplacement « vie de famille » – qui pourrait relever des actuels services de remplacement – et la généralisation de l’aide au répit en cas de maladie grave d’un proche. Actuellement, seules quelques caisses la proposent.

L’histoire des femmes en agriculture est une suite de combats, marquée par quelques grandes figures. Où en sommes nous ?

Je fais partie de ces femmes, filles d’agriculteurs, qui ne voulaient pas devenir agricultrices. J’y suis venue après mon mariage. Dans ma génération, cette situation était très courante. Elle l’est beaucoup moins aujourd’hui. De fait, en épousant l’agriculteur, j’ai aussi épousé l’agriculture et ses combats.

Après 1965, qui a entériné l’indépendance de la femme au sein du couple, je retiens trois dates fondatrices de notre histoire : 1980, qui voit la création du statut de coexploitante ; 1999 et le statut de conjointe collaboratrice ; et 2010, qui a ouvert la possibilité du Gaec entre époux.

On peut y ajouter 2019 et l’instauration d’un congé maternité de huit semaines pour les non-salariées, avec la possibilité de se faire remplacer poste à poste. Sur ce point d’ailleurs, l’agriculture est en avance. Aujourd’hui, il nous reste à relever tout particulièrement le défi de l’engagement et de la prise de responsabilités. D’où l’importance des mesures évoquées ci-dessus.

Propos recueillis par Anne Mabire

(1) Caisse centrale de la mutualité sociale agricole

(2) Disponible et téléchargeable sur www.msa.fr

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