Ce texte fait partie du cahier spécial Recherche en partenariat
Il n’y a que la signature visuelle de Sea of Stars qui soit rétro : derrière ce jeu vidéo au look d’autrefois, on retrouve des innovations technologiques à la fine pointe, fruit d’une collaboration entre le Sabotage Studio et le Centre de développement et de recherche en intelligence numérique (CDRIN).
On associe souvent la recherche-développement (RD) aux sciences dites « dures », imaginant qu’elle sert principalement à résoudre des problèmes complexes ou à concevoir de nouveaux produits dans des domaines comme l’ingénierie ou la médecine. Pourtant, la recherche joue également un rôle crucial dans l’industrie du divertissement, notamment dans le jeu vidéo, qui devient un véritable terrain d’expérimentation.
« Dans un secteur aussi compétitif que celui du jeu vidéo, la RD est capitale pour innover et apporter des solutions techniques qui permettent aux studios de donner vie à des projets ambitieux et de se différencier », écrit Olivier Therrien, chercheur-programmeur au CDRIN.
Son travail s’articulant autour du transfert technologique, le CDRIN a pour mission de faire le pont entre le milieu universitaire et certaines industries. On parle ici du jeu vidéo, mais aussi de l’industrie maritime et, au sens plus large, du secteur des effets visuels, de l’animation et de l’interactivité.
« Généralement, on commence par effectuer une veille sur un sujet, une fonctionnalité ou un problème vécu par un partenaire, explique M. Therrien. Ensuite, on va cibler une approche pour résoudre ce problème, puis on va développer et implémenter un prototype fonctionnel. »
Si certaines de ces tâches peuvent parfois être réalisées en interne par les entreprises privées, le fait de s’adjoindre un groupe de recherche offre un accès à une expertise spécifique qui pourrait leur manquer, tout en permettant d’unir les forces en présence, nuance le chercheur, qui a lui-même baigné plusieurs années dans l’industrie du jeu vidéo de Québec avant de rejoindre le CDRIN.
Cette synergie est particulièrement précieuse dans un secteur en constante évolution, où chaque détail compte pour offrir une expérience immersive et fluide aux joueurs.
Un casse-tête technique
La collaboration entre le CDRIN et Sabotage Studio, une firme indépendante de Québec spécialisée en développement de jeux à l’allure rétro, s’est échelonnée sur quatre ans, en deux phases.
C’est le studio qui a d’abord approché le centre de recherche en 2019, intéressé par une technique appelée « illumination globale en temps réel » (Screen space global illumination, ou SSGI). Cette technologie utilise des pixels de l’écran pour créer des zones de lumière dans le jeu, rendant l’expérience du joueur plus réaliste et immersive.
« C’est une technologie qui fonctionne normalement pour les jeux en trois dimensions, explique Olivier Therrien. Notre défi a été de l’appliquer à leur jeu qui est en deux dimensions. »
Le défi était de taille : simuler un brouillard qui se dissipe, une ombre qui suit un personnage ou encore les traces laissées par un protagoniste dans la neige. Autant d’effets visuels qui paraissent simples à l’œil nu, mais qui nécessitent un savoir-faire complexe pour être crédibles et fluides.
Il fallait, de plus, stabiliser les images lors des scènes impliquant du mouvement, un défi compliqué par la plateforme Nintendo Switch, l’une des consoles pour lesquelles le jeu a été développé, entre autres. Pour y parvenir, le CDRIN a expérimenté plusieurs pistes de solution.
La RD a notamment mené à la création d’un système de réutilisation des ombres, qui a amélioré les performances des joueurs dans différentes scènes du jeu.
« La collaboration nous a permis de peaufiner nos propres techniques à l’interne, et cela nous a apporté des connaissances de plus, dont on ne disposait pas », indique M. Therrien.
Des avancées qui profitent à toute l’industrie
Si certaines avancées réalisées dans le cadre du projet collaboratif n’ont pas été intégrées dans la version finale de Sea of Stars pour diverses raisons, elles pourront toutefois être utiles au reste de l’industrie du jeu vidéo.
Le fruit du partenariat entre le Sabotage Studio et le CDRIN a d’abord mené à la publication d’un article scientifique publié dans le Computing Journal. Le centre de recherche a également rendu disponible, et ce, gratuitement, un plugiciel permettant d’intégrer ces effets visuels dans tous les jeux développés sur le moteur de jeu Unity.
« Tous les programmeurs pourront en profiter. Cela démocratise les éclairages complexes dans les jeux, et déjà, on a vu sur Twitter que certaines personnes l’ont intégré, relève Olivier Therrien. C’est intéressant de voir que la recherche qu’on a faite est utile à plein de gens. »
Ce contenu a été produit par l’équipe des publications spéciales du Devoir, relevant du marketing. La rédaction du Devoir n’y a pas pris part.
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