Serge Letchimy : la Martinique a signé « une convention historique avec l’université des Antilles » – L’Etudiant

Pour mieux connaître les spécificités de chaque territoire et leurs enjeux en matière d’enseignement supérieur et de recherche, EducPros donne la parole aux présidents de région. Dans cette interview, Serge Letchimy, président du Conseil exécutif de la Martinique, nous explique les priorités de l’ile sur ces sujets.

Pour chaque territoire, l’enseignement supérieur et la recherche représente un enjeu majeur. La Martinique, qui compte près de 350.000 habitants, ne fait pas exception, avec une population étudiante estimée à 5.900 inscrits à l’université des Antilles., auxquels s’ajoutent les élèves de classes préparatoires aux grandes écoles (CPGE), de BTS et d’autres écoles spécialisées.

Quelle importance donnez-vous à l’enseignement supérieur dans vos politiques ? Quel est son poids dans votre budget ?

La Collectivité territoriale de Martinique (CTM) place l’enseignement supérieur au cœur de ses actions avec un budget de près de 14 millions d’euros, soit 23,25% du budget dédié à l’éducation et la formation.

Il s’agit ainsi pour la Collectivité de faciliter l’entrée dans la vie étudiante, favoriser l’élévation des niveaux de qualifications, participer au développement de la recherche, à l’optimisation de la qualité des formations sanitaires et sociales, pour faire de l’enseignement supérieur et la recherche (ESR), un levier de croissance économique et de bien-être social.

Quels sont les caractéristiques et les enjeux propres à votre territoire dans le domaine de l’enseignement supérieur ?

Nous nous attachons à produire une définition nouvelle de l’enseignement supérieur basé sur un accompagnement affermi, via une politique de labellisation de l’excellence par la collectivité.

En Martinique, l’offre de l’enseignement supérieur est vaste. Notre université détient une offre de formation solide dans différentes disciplines (médecine, arts, littérature, économie, sciences de gestion, droit, sciences) ainsi que différentes préparations aux concours. Il y a également 17 classes préparatoires aux grandes écoles.

Un premier cycle de formation ingénieur avec l’Insa s’est récemment installé, pour accueillir 23 étudiants. Ce cycle de deux ans au sein du lycée Schœlcher résulte d’un projet porté par l’académie de Martinique et la CTM permettant aux étudiants martiniquais et de la zone Caraïbe de bénéficier d’une formation d’excellence sur leur territoire.

Parallèlement, le nombre de sections de BTS permet une projection plus courte du parcours d’études.

Cependant, l’un des enjeux qui sous-tend l’enseignement supérieur à la Martinique est la recherche d’une plus grande attractivité. Il convient d’enrichir l’offre de formation et de développer l’expertise dans divers domaines : écologie, biodiversité, architecture, urbanisme, numérique, etc.

Notre objectif est que nos jeunes aient le choix dans la déclinaison de l’enseignement supérieur en Martinique. C’est notre engagement. Nous voulons une démocratisation éducative, c’est-à-dire une politique de montée en qualification de l’ensemble de la population.

Quel est le projet le plus ambitieux que porte votre région pour l’enseignement supérieur et la recherche ?

L’université des Antilles (UA) et la Collectivité territoriale de Martinique œuvrent conjointement sur des thématiques comme l’écologie, la santé, l’aménagement du territoire, la gestion des risques, le numérique, la mer, la langue créole, la littérature caribéenne, l’art, l’Histoire antillaise. Les sujets sont nombreux car c’est le dialogue des sciences qui permet une politique innovante.

Le président de l’UA, Michel Geoffroy, nous a fait part de son engagement pour que la recherche, les formations, l’innovation universitaire se positionnent clairement au service du développement de la Martinique. En octobre dernier, une convention liant l’UA et la CTM a donc été signée pour accompagner la création de formations, de projets de recherche et de bourses de thèse.

C’est une convention historique : cinq millions d’euros seront octroyés à l’université, sur trois ans.

C’est une convention historique : cinq millions d’euros seront octroyés à l’université, sur trois ans, afin que soient fondés un institut de biodiversité, un institut du numérique, un institut d’urbanisme et d’architecture, des masters visant à former des jeunes à la gestion de projets et de fonds européens ou encore à la biotechnologie et à la pharmacognosie.

Si nous réussissons la mise en œuvre de cette convention très ambitieuse, l’université des Antilles pourra jouer, aux côtés de la CTM, un rôle émancipateur très fort.

Mettez-vous en place des dispositifs ou aides financières pour attirer les établissements du supérieur ?

La CTM soutient la recherche sur des projets d’intérêt local tant au niveau des laboratoires de recherche, des entreprises que dans l’accompagnement individuel des doctorants. C’est ainsi qu’elle a mis en place différentes aides doctorales.

Par ailleurs, la CTM participe au déploiement des Cordées de la réussite : elle a conclu un partenariat avec l’académie de Martinique et des Cordées labellisées avec Sciences po Bordeaux, HEC, l’Insa Lyon, l’École Ferrandi et Garac, l’école nationale des professions de l’automobile.

Dans le domaine sanitaire et social, afin d’améliorer la prise en charge des étudiants, la CTM s’est engagée pour la création du Pôle Universitaire de Santé qui devra voir le jour à la rentrée 2024.

Face aux enjeux du territoire – vieillissement de la population faisant de notre département le plus vieux de France, émergence des maladies chroniques -, la CTM poursuit sa politique d’augmentation de quotas en accordant des autorisations de places supplémentaires pour les instituts de formation en soins infirmiers et l’institut de formation au DTS IMRT (imagerie médicale et radiologie thérapeutique).

Les établissements de l’enseignement supérieur représentent-ils, pour votre région, un outil d’aménagement du territoire ?

Le lycée le plus emblématique de la Martinique, le lycée Schoelcher, a été reconstruit et abrite de nouvelles structures de l’enseignement supérieur.

Dans le cadre de notre partenariat repensé avec l’université des Antilles, des investissements sont prévus afin de sécuriser et de moderniser les infrastructures : les bâtiments du campus de Schoelcher doivent être rénovés et le campus de Fort-de-France qui abrite l’Institut national supérieur du professorat et de l’éducation (Inspé) sera rebâti et reconfiguré.

Quelles sont les retombées économiques des acteurs du supérieur et de la recherche pour les villes et les territoires ?

Le maillage entre les différents acteurs du supérieur et de la recherche est fondamental lorsque l’on veut réaliser des projets d’avenir pour un pays.

L’université est le lieu des fondations d’une économie de la connaissance. Nous croyons que l’innovation et le transfert de technologies ainsi que l’initiation précoce à l’entrepreneuriat favorisent la création d’emplois.

Si des milliers d’emplois sont générés par le supérieur, c’est parce que l’innovation inscrit des stratégies en faveur de la compétitivité, offrent des qualifications et permet de penser demain.

Notre série : les enjeux de l’enseignement supérieur dans les territoires, vus par les présidents de région

Pour comprendre les enjeux de chaque territoire, EducPros vous propose une série d’interviews des présidents de région.

À tous, nous avons posé les mêmes questions, pour saisir les spécificités de leur territoire et permettre également de comparer les situations.

L’entretien de Serge Letchimy est le onzième de notre dossier. Vous pouvez également consulter les interviews de :

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