Snacking : plus qu’une opportunité d’affaires, un véritable mode de vie

Manger en tout lieu, à toute heure, en plus petite quantité. Surprenant en France où les habitudes se sont longtemps focalisées autour de trois repas consistants (quatre, goûter inclus) pris à créneaux fixes. Pourtant, mobilité, intensification des rythmes de vie, délitement des structures familiales… tendent à convertir les Européens à ces pratiques bien répandues en Asie. Autant de nouveaux territoires à explorer pour développer les activités des artisans.

Orienter l’offre de son entreprise autour du snacking sucré alors que les recettes traditionnelles de la pâtisserie française font la part belle aux produits généreux, à partager ou à consommer assis, le pari était osé. Le Grenoblois Thierry Court aurait pu mettre à profit son talent pour réaliser des entremets complexes ou des bonbons de chocolat aux saveurs exotiques. Il a pris le chemin inverse. Remarqué en 2017 grâce à sa victoire au concours télévisé Le Meilleur Pâtissier – Les Professionnels, il a déployé une marque aussi singulière que gourmande : Les Petits Bonheurs, des alternatives aux bonbons et snacks sucrés industriels. Son approche artisanale de la confiserie, associée à un travail sur le goût et les textures, lui a ouvert les portes de prestigieux établissements (Galeries Lafayette, Printemps, La Grande Épicerie, hôtels de luxe…), où les clients peuvent découvrir la saveur oubliée d’une confiserie (barres chocolatées, oursons en guimauve et autres billes de céréales enrobées) réalisée avec des ingrédients sélectionnés : moins de sucre, vrais fruits, épices, chocolat écoresponsable (fourni par le chocolatier franco-camerounais Serge Ngassa), arômes et colorants exclusivement naturels, zéro huile de palme, gélifiants vegan…

Sa présence au salon Sandwich & Snack Show (stand R06) n’est pas le fruit du hasard : son offre est particulièrement adaptée à la gourmandise décomplexée qui s’exprime désormais dans les habitudes alimentaires – 71% du public, à l’échelle mondiale, s’accorde une pause gourmande au moins deux fois par jour (source : étude State of Snacking, 2022) – et répond aussi aux attentes de naturalité et d’éthique des consommateurs. De quoi offrir de belles perspectives à l’artisan, désormais installé dans un outil de production de 500 m2, à Apprieu, en périphérie de Grenoble.

Une clientèle pressée et prête à multiplier les expériences

Globalement, une véritable quête d’instantanéité se saisit des consommateurs. Objectifs : gagner du temps sur chaque repas (peu importe leur température), hors domicile, avec des tickets moyens en repli. TheFork, spécialiste de la réservation de tables en ligne, dévoilait dans une étude sur les tendances alimentaires 2024 que si les réservations ont connu une croissance de +4,4% en 2023 (par rapport à 2022), le reflux de 2€ de la dépense moyenne dénote une volonté de se tourner vers des offres plus accessibles.

De sérieux atouts à faire valoir par la boulangerie, son modèle reposant sur la diversité des références, préparées en amont des périodes d’affluence. Ainsi, en complément des vitrines froides, le chaud pourrait faire son entrée dans les boutiques et offrir une expérience d’achat toujours plus fluide au sein des points de vente où le snacking représente une part conséquente du chiffre d’affaires (au-delà du seuil symbolique 50% chez certains artisans, indépendants ou en réseaux).

Quiches, plats chauds, tartines… : ces produits traditionnels aux recettes populaires offrent des repas réconfortants et des remparts efficaces dans un contexte de crise.

Pour autant, la contraction du pouvoir d’achat induit également une volonté de voyager par l’alimentation. De quoi ouvrir la voie à des produits issus des cultures culinaires du monde en boulangerie, dont les artisans maîtrisent bon nombre de techniques : brioches moelleuses garnies de recettes aux inspirations asiatiques, galettes de blé ou de maïs évoquant l’Amérique du Sud… Des concepts déclinables en formats réduits et particulièrement adaptés au snacking boulanger.

(Re)faire du sandwich un emblème de la restauration rapide à la française

Outre la diversification, se recentrer sur les fondamentaux peut également correspondre à l’expression d’une identité et d’un savoir-faire. Le déclin notable des enseignes de sandwicherie comme Pomme de Pain, Brioche Dorée ou même Paul aurait pu laisser penser que le produit connaissait un désamour du public. Il n’en est rien : le format s’est essoufflé à cause de la vision dégradée de la qualité de l’offre que pouvaient percevoir les clients. À l’inverse, un sandwich « cuisiné », assemblé à partir d’un pain frais et savoureux, peut devenir la pierre angulaire d’une offre de restauration, pour peu que les recettes répondent aux exigences de la clientèle.

Le succès de jeunes enseignes telles que Plan D, imaginée dans le 10e arrondissement parisien par l’entrepreneuse Alice Tuyet autour de « dwichs colorés et cuisinés » ou de Mamiche Traiteur (déclinaison salée de l’univers de la désormais célèbre boulangerie parisienne), témoigne du potentiel de ce plat sain et consistant, qui peut se déguster bien au-delà de la seule pause déjeuner.

Pour participer à ce mouvement, la boulangerie devra encore accroître sa culture de la saisonnalité et des associations de saveurs et donner naissance à de surprenants accords pain-garniture. De quoi écrire de nouvelles tranches d’histoire d’un snacking aussi sain que savoureux.


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