Soudan: Des milliers de civils fuient la nouvelle avancée des paramilitaires vers le sud-est

Samedi, les Forces de soutien rapide (FSR) ont annoncé avoir infligé un nouveau revers à l’armée en capturant une de ses bases à Sinja, capitale de l’État de Sennar (sud-est), provoquant la fuite de milliers de personnes, selon des témoins.

Des habitants qui ne pouvaient partir se sont réfugiés chez eux

« dans l’obscurité totale »

en raison d’une coupure d’électricité, a raconté à l’AFP l’un d’eux.

Dimanche, l’armée a félicité ses troupes à Sinja

« pour leur bravoure face aux tentatives de l’ennemi de déstabiliser »

la ville. Pour beaucoup, cette fuite laisse un goût de déjà-vu.

« La guerre n’en finit pas de nous poursuivre: on venait de s’installer à Sinja quand les FSR ont attaqué »

, raconte Mme Ahmed, jointe au téléphone par l’AFP.

Comme elle, beaucoup ont été déplacés plusieurs fois depuis le début de la guerre, en avril 2023, entre les paramilitaires du général Mohammed Hamdane Daglo et l’armée dirigée par le général Abdel Fattah al-Burhane.

« Avec ma famille, nous avons fui Khartoum en juin 2023, puis Wad Madani en décembre avant de trouver refuge chez des amis de la famille qui possèdent une ferme dans l’État de Sennar »,

confie Ahmed Nabil, joint également par téléphone.

« Lignes d’approvisionnement »

Des centaines de milliers de personnes avaient trouvé refuge à Wad Madani avant que la prise par les paramilitaires de la ville, en décembre, n’en force une partie à fuir vers l’État de Sennar, alors sous contrôle de l’armée.

Avant la guerre, Mme Ahmed était institutrice. Désormais, elle compte sur les petits boulots que son mari, ancien employé du secteur privé, a pu décrocher sur les marchés de Wad Madani puis de Sinja.

« Cette fois, on n’a plus assez d’argent pour se loger, on va chercher un abri pour déplacés à Gedaref en espérant que la guerre ne vienne pas encore frapper à notre porte »,

dit-elle.

Dans cet État frontalier de l’Éthiopie, ils s’ajouteront aux 600 000 personnes déplacées depuis le début du conflit.

Devant l’avancée des paramilitaires, Gedaref et l’État voisin du Nil Bleu ont décrété dimanche un couvre-feu nocturne.

« Si les forces de sécurité prennent le pont reliant l’est, elles auront une ligne ouverte vers la frontière éthiopienne, ce qui pourrait leur donner de nouvelles lignes d’approvisionnement »,

explique à l’AFP un expert militaire sous couvert d’anonymat, en référence à la zone frontalière où prospère déjà un trafic d’armes.

« Cela leur permettrait également d’encercler la ville de Gedaref »,

ajoute-t-il.

Des témoins ont rapporté que des combattants des FSR étaient entrés dans plusieurs villages le long du Nil Bleu sinueux, des habitants embarquant dans des bateaux en bois pour fuir de l’autre côté du fleuve.

Partout où ils sont passés pendant leur longue mais implacable descente vers le sud, les paramilitaires juchés sur des pick-up ont tout pillé, provoquant la fuite des habitants terrifiés.

Depuis samedi, des vidéos sur les réseaux sociaux montrent les paramilitaires exulter devant ce qui semble être la base ravie à l’armée.

D’autres images montrent les routes qui partent de Sinja prises d’assaut par des habitants fuyant les combats.

Sakina Omar, après avoir fui une première fois la capitale Khartoum pour Sinja en janvier, se dirige cette fois-ci vers l’État du Nil Bleu où son « mari a de la famille ».

Multipliant les victoires sur l’armée, qui a pu leur reprendre ces derniers mois une banlieue nord-ouest de Khartoum, les FSR contrôlent la majeure partie de cette dernière, de l’État d’al-Jazira (centre), du Darfour (ouest) ainsi que de larges pans du Kordofan (sud).

Alors que la ligne de front s’était stabilisée au nord de la ville de Sennar, les FSR l’ont contournée pour atteindre Sinja, faisant une percée sur plus de 50 km.

La ville est désormais encerclée et des témoins ont signalé dimanche des

« files de voitures tentant de quitter la ville par l’ouest mais bloquées par l’armée ».

À l’autre bout du pays, les FSR assiègent la ville d’el-Facher, chef-lieu de l’État du Darfour-Nord, seule capitale des cinq États du Darfour à échapper aux paramilitaires.

Quatorze mois de conflit au Soudan ont fait des dizaines de milliers de morts et provoqué le déplacement de plus de neuf millions de Soudanais.

Les deux belligérants ont été accusés de crimes de guerre pour avoir visé délibérément des civils et bloqué l’aide humanitaire.

Les États-Unis ont accusé les paramilitaires de nettoyage ethnique et de crimes contre l’humanité.

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