un an après le coup d’État du 26 juillet, Mohamed Bazoum ne lâche rien


Un an après le putsch qui l’a renversé en juillet dernier, Mohamed Bazoum continue son combat pour rester président de la République du Niger. Mais à Niamey, le bras de fer qui l’oppose au régime de transition du général Abdourahamane Tiani semble s’enliser alors même que les soutiens du président captif dénoncent ses conditions de détention.

Un procès en toile de fond

Dans la lignée du Mali en 2020, de la Guinée en 2021 et du Burkina Faso en 2022, le Niger a également vu son exécutif vaciller au cours du mois de juillet 2023. Ce qui n’était qu’une rumeur le 26 au matin fut officialisé quelques heures plus tard sur les postes de télévision : appuyé par la garde présidentielle, le Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP) déposait le gouvernement et prenait ainsi les rênes du pays. L’homme fort de ce putsch et actuel président du CNSP, le général Abdourahamane Tiani, avait notamment fondé son action sur une critique de la stratégie sécuritaire menée par M. Bazoum pour combattre l’avancée des djihadistes sur le territoire national. Ce dernier prônait une collaboration renforcée avec plusieurs partenaires occidentaux dont les États-Unis et la France.

Mais un an après ce coup d’éclat, le processus de transition peine à avancer dans ce pays du Sahel aux défis pourtant immenses. Le Niger et ses presque 30 millions d’habitants connait une croissance démographique parmi les plus élevées du monde et pourrait atteindre les 200 millions de ressortissants d’ici la fin du siècle. Pour l’heure, les nouvelles autorités restent tenues de statuer clairement sur le sort du président déchu, qui refuse toujours de céder à ce qu’il désignait déjà au lendemain de son arrestation, comme « une junte essayant de renverser la démocratie ». Son refus catégorique d’abandonner ses fonctions, Mohamed Bazoum le paye au prix fort ; car depuis son éviction, l’homme âgé de 64 ans vit à huis clos au sein du palais présidentiel en compagnie de son épouse.

Pour Florence Loan-Messan – future première femme bâtonnier de Côte d’Ivoire et membre du collectif international d’avocats assurant la défense de M. Bazoum – le parcours de son client est celui « d’un homme de conviction et de combat ». En ce sens, elle ne voit pas de possible évolution de sa posture. Pourtant les nouvelles autorités entendent bien le juger pour des faits d’atteinte à la sécurité nationale et de haute trahison. Niamey a d’ailleurs brisé l’un des principaux obstacles à une inculpation en abrogeant l’immunité présidentielle dont jouissait Mohamed Bazoum jusqu’en juin 2024. Derrière cette décision se trouve la Cour d’État du Niger, une institution érigée quelques mois seulement après l’arrivée au pouvoir d’Abdourahamane Tiani.

La peur d’être oublié

L’avenir proche d’un président entre parenthèses se poursuivra donc probablement devant un tribunal militaire. S’il est reconnu coupable à l’issue du procès, la question du sort qui lui sera réservé interroge déjà les observateurs. Purgera-t-il sa peine au palais ou en maison d’arrêt, comme le voudrait l’application du régime de droit commun ? Quoi qu’il advienne, sa défense continue de réclamer de meilleures conditions de détention, comme la possibilité d’échanger par téléphone avec ses proches ou ses avocats. Car depuis près de dix mois, seul l’état de santé de Mohamed Bazoum parvient jusqu’au monde extérieur par l’intermédiaire de son médecin personnel ; celui-ci étant chargé de lui rendre visite à intervalles réguliers.

Mais dans un contexte régional particulièrement trouble, le sujet Bazoum semble quelque peu s’estomper. Hinda Bazoum, la fille de l’intéressé, rapportait encore il y a quelques semaines sa peur d’être abandonné par l’opinion internationale. Bien que Paris ait récemment réitéré son appel à une libération immédiate et inconditionnelle, Florence Loan-Messan rappelle que la sortie du Niger de la Cedeao a considérablement « limité les moyens de pression sur la junte ». En annonçant sa sortie conjointement avec le Burkina Faso et le Mali début 2024, Niamey s’est extrait du cadre légal de transition prévu par l’organisation régionale. Pour rappel, la cour de justice de la Cedeao avait reconnu la légitimité du président Bazoum en appelant à le réhabiliter sans délais.

À l’image de ces demandes restées lettre morte, les autorités de Niamey semblent décidées à faire cavalier seul pour affronter la menace sécuritaire qui pèse sur un territoire vaste comme cinq fois le Burkina voisin. Sur ce point précis, Abdourahamane Tiani a tenu sa promesse si l’on considère le départ précipité des troupes américaines et françaises autrefois stationnées sur plusieurs bases stratégiques. Malgré l’inflation des premiers mois sous l’effet des sanctions, la Banque africaine de développement chiffre la croissance économique à plus de 10 % pour 2024. Ce dynamisme s’appuie notamment sur une production d’hydrocarbures en plein boom avoisinant les 120 000 barils par jour. Mais pour exporter durablement ses ressources, le pouvoir en place devra soigner ses relations avec certains voisins comme le Bénin, avec qui le Niger partage un pipeline.

En ce 26 juillet 2024, l’avenir de Mohamed Bazoum n’est pas à l’ordre du jour. Les autorités ont en effet décidé de rendre cette date fériée en mémoire de leur arrivée au pouvoir.


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