Le président du Niger, élu en 2021, est prisonnier depuis le 26 juillet 2023 par la junte putschiste au sein du palais. Il revendique toujours d’être à la tête de l’État du Sahel.
Un an après le coup d’État qui l’a renversé, le président élu du Niger Mohamed Bazoum est toujours retenu prisonnier par le régime militaire au pouvoir à Niamey, dans des conditions de détention strictes et avec la perspective d’un procès qui inquiète ses proches.
Mohamed Bazoum a été renversé le 26 juillet 2023 par le général Abdourahamane Tiani, le chef de sa garde présidentielle. Élu en 2021, il n’a jamais démissionné et revendique toujours d’être le président du Niger.
«Ils ont le moral»
L’ancien président est séquestré avec son épouse Hadiza depuis le jour du coup d’État dans sa résidence présidentielle, au sein du palais, à Niamey. Sa dernière apparition publique remonte au 19 août 2023, lorsque des images de la télévision nationale l’ont montré sur le perron de la résidence à l’occasion d’une visite d’une médiation nigériane.
Depuis octobre, ses conditions de détention se sont durcies. Le régime militaire l’avait accusé d’avoir tenté de s’évader, une version rejetée par ses avocats. Il est privé de ses téléphones et seul son médecin est habilité à le voir, deux fois par semaine. «D’après lui, physiquement ils vont bien. Ils ont le moral très haut. Le président est engagé à continuer sa résistance. C’est un homme de conviction, un républicain convaincu. Démissionner, pour lui ça n’a pas de sens», affirme à l’AFP, Hamid N’Gade, son conseiller en communication.
«Il aurait pu démissionner, retrouver ses enfants mais il ne l’a pas fait. Bazoum aujourd’hui, c’est le symbole du courage et de la démocratie», ajoute un membre de son entourage proche. En janvier, son fils Salem Bazoum, jusqu’alors détenu avec ses parents, a été mis en liberté provisoire et est parti pour le Togo.
Poursuivi pour «trahison»
Mohamed Bazoum, qui n’a eu aucun contact avec ses avocats, est notamment poursuivi pour «complot d’attentat à la sécurité et l’autorité de l’État» et «crime de trahison». Il lui est par exemple reproché d’avoir parlé au téléphone avec le président français Emmanuel Macron et le secrétaire d’État américain Antony Blinken pour qu’ils l’appuient «par une intervention armée», lors du coup d’État.
La décision de la Cour de justice de la Communauté économique des États d’Afrique de l’ouest (Cédéao) ordonnant mi-décembre la remise en liberté du président Bazoum est restée lettre morte. Le pays a depuis quitté la Cédéao et le mois dernier, la Cour d’État du Niger, une juridiction créée par le régime militaire, a levé son immunité présidentielle. «Cette Cour n’a aucune légitimité. Ces personnes ont été nommées par un putschiste qui n’a jamais prêté serment», estime Mohamed Seydou Diagne, l’un des avocats de M. Bazoum.
Un éventuel procès
La levée de son immunité ouvre la porte à un procès, bien qu’aucune date n’ait encore été fixée. Et les peines encourues sont très lourdes. «Le crime de trahison c’est la peine de mort par fusillade, encore en vigueur au Niger même si elle n’est plus exécutée depuis trente ans. Et pour complot contre l’autorité de l’État, c’est la perpétuité», alerte Moussa Coulibaly, ancien bâtonnier du Niger et avocat de Mohamed Bazoum.
Un procès pourrait permettre au chef d’État otage de s’exprimer publiquement pour la première fois depuis le coup d’État. «C’est une juridiction d’exception qui ne répond à aucune des garanties fondamentales pour le droit à un procès équitable. On n’accepte pas les simulacres de procès», prévient Me Diagne. «Ce ne sera qu’une parodie de justice. Ils sont déterminés à tout prix à lui coller une condamnation», ajoute Oumar Moussa, son directeur de cabinet adjoint.
De rares appels à sa libération
Dans les premières semaines qui ont suivi le coup d’État, de nombreuses chancelleries occidentales ont appelé à sa libération immédiate. La Cédéao a pris de lourdes sanctions économiques pour faire pression sur le régime de Niamey et a même menacé d’intervenir militairement pour replacer Mohamed Bazoum au pouvoir. Cette intervention n’a jamais eu lieu et les sanctions ont été levées en février.
Ces derniers mois, rares ont été les prises de paroles internationales pour réclamer sa libération. «Il subit des pressions inacceptables de la junte qui en a fait son otage. Nous nous inquiétons de la levée de son immunité et du simulacre judiciaire qui risque de s’ensuivre», a déclaré une source diplomatique française, sollicitée par l’AFP.
«Nous n’avons pas de commentaire (sur la situation de Bazoum), nous n’interférons pas dans les décisions politiques de nos États membres», a affirmé à l’AFP, un porte-parole du FMI dont l’aide au Niger a repris. Au Niger, des mouvements rebelles réclamant son retour au pouvoir ont récemment revendiqué des attaques contre un important oléoduc acheminant du pétrole.
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