Un gâchis qui aurait pu être évité?

Le 20 juin, la PDG du réseau Vitalité, Dre France Desrosiers n’a pas retenu ses coups pour défendre les contrats avec la société Canadian Health Labs (CHL) qui ont coûté un bras et une jambe aux contribuables néo-brunswickois.

Son message était clair: il était minuit moins une; sans renforts, certains services allaient tout simplement s’effondrer et des gens allaient mourir. Après avoir communiqué avec une dizaine de fournisseurs potentiels, le réseau a conclu que CHL était le seul à pouvoir lui offrir du personnel infirmier rapidement et en nombre suffisant. La firme a ensuite profité de sa situation de monopole pour exiger des frais astronomiques.

Que l’urgence d’agir ait initialement poussé Vitalité dans les bras de CHL est comprenable.   Cette même urgence n’explique cependant pas le fait que Vitalité ait jugé approprié de s’engager avec CHL jusqu’en 2026. Elle n’explique pas non plus le fait que le réseau soit allé de l’avant sur la base d’approbations verbales de son fiduciaire et du ministère de la Santé.

Aux dires de Dre Desrosiers, ces derniers étaient au courant implications financières – du moins, à court terme – des contrats signés par Vitalité. Si elle dit vrai, il faut se demander pourquoi on voulait tant éviter toute trace écrite.

Ici, on ne peut malheureusement que spéculer. Pour Vitalité, cela lui a peut-être permis de forcer la main au gouvernement pour financer du personnel itinérant jusqu’en 2026. Pour le gouvernement, force est de constater que cela lui a facilité la tâche de tout nier et de jeter le blâme sur Vitalité une fois le moment venu de rendre des comptes.

Le témoignage de Dre Desrosiers mérite d’être écouté pour de nombreuses autres raisons, y compris pour saisir pourquoi Vitalité est bien plus mal en point qu’Horizon.

Interrogée sur les causes de l’état de désespoir dans lequel se retrouve sa régie, la Dre Desrosiers a brossé un portrait assez convaincant, mais qui manquait un peu d’introspection. Certes, le réseau Vitalité a dû faire face à une tempête parfaite qui s’est préparée au cours de la dernière décennie, mais est-ce ses pratiques en matière de ressources humaines étaient exemplaires? Après tout, ce n’est pas seulement depuis hier que le Moncton Hospital fourmille d’infirmières francophones…

Parlant de gestion des ressources humaines, Dre Desrosiers a lancé une autre bombe lors de son témoignage en révélant que les deux régies ont abordé le gouvernement de Blaine Higgs avec un système de primes qui, selon elle, aurait permis de réduire les besoins de Vitalité et ainsi éviter le gâchis occasionné par sa captivité à l’endroit de CHL et ses tarifs exorbitants.

Le lendemain, Blaine Higgs s’est empressé de réfuter les propos de Dre Desrosiers, rétorquant qu’une telle solution n’aurait pas pu être mise en œuvre à temps et qu’elle aurait coûté plus cher à long terme.

Le premier ministre a sans doute à la fois raison et tort. Les négociations collectives sont en effet typiquement très longues. Là où il a tort, c’est en invoquant l’argent comme une excuse pour ne pas agir. Bien conçu, un système de primes peut aider non seulement à maintenir le personnel en milieu hospitalier et dans les foyers de soins, mais aussi à le diriger vers les services les plus mal en point.

Un tel système doit faire partie de la solution, surtout si Dre Desrosiers a raison d’affirmer qu’il ne faut pas s’attendre à disposer de bien davantage de personnel infirmier pour faire face à ce qu’elle qualifie de « tsunami » qui se prépare.

L’image du tsunami, bien qu’utilisée par plusieurs, est trompeuse. Un tsunami frappe avec fracas presque sans avertissement. En santé, les choses étaient prévisibles longtemps à l’avance.

Vitalité a récemment fait des bons coups pour se préparer aux vents contraires qui ne vont qu’augmenter, à commencer par sa réforme des soins de santé primaires. Ici encore, cependant, l’argent est un bâton que le gouvernement continue de lui mettre dans les roues.

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