De son silence colérique et désespérant mais sans résignation, l’une des personnalités publiques les plus populaires et les plus respectées du pays, reste plus que jamais déterminée et engagée dans son constant combat pour la démocratie, les droits de l’homme et le bien-être des Guinéens. L’ancien ministre guinéen des droits de l’homme, des libertés publiques, de la Citoyenneté et de l’Unité nationale, Khalifa Gassama Diaby, reste égal à lui même, les convictions fermes et invariables, le ton toujours franc et direct, et l’engagement ferme et assumé. Dans une interview exclusive à MediaGuinee, M. Diaby évoque entre autres la situation nationale, la démission de l’élite et des intellectuels guinéens, la dissolution du gouvernement Goumou, la nomination de Bah Oury à la Primature, mais aussi le chronogramme de la transition. Interview (suite et fin)…
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MediaGuinee : Vous avez parlé de la démission de l’élite et des intellectuels guinéens. Pendant ce temps, au Sénégal, deux jeunes (Ousmane Sonko et Bassirou Diomaye Faye) ont pris le pouvoir, 10 ans après la création de leur parti politique et 10 jours après leur sortie de prison. Selon vous, qu’est-ce qui a favorisé cette ascension rapide mais non sans difficultés des nouveaux maîtres du Sénégal ? La situation en Guinée est-elle moins favorable pour les politiques qu’au Sénégal ?
KGD: Il faut bien évidemment noté que chaque pays à ses particularités historiques, sociologiques et politiques. Il serait donc intellectuellement trop imprudent de vouloir calquer les situations.
Néanmoins, on peut lucidement tirer des derniers événements au Sénégal quelques leçons générales qui sont valables en tout lieu :
– la première leçon, c’est la pertinence du système démocratique.
La paresse intellectuelle et la fourberie politique qui consistent à dire que la démocratie n’est pas adaptée à l’Afrique viennent de recevoir un cinglant démenti avec la dernière élection sénégalaise.
Il est donc insensé d’invalider une doctrine (la démocratie) que l’on se refuse cyniquement de mettre en oeuvre en refusant sciemment de respecter ses principes et ses règles….puis venir se cacher derrière une prétendue singularité culturelle pour refuser une doctrine qui a tout pour être universelle.
Aucune particularité culturelle ne peut s’opposer à l’idée de démocratie, donc de liberté, de justice et de souveraineté du peuple.
Ce n’est pas un système parfait la démocratie, elle n’est pas sans défauts, ni sans risques, mais elle reste le meilleur des systèmes de gouvernance.
Le Sénégal vient de le démontrer.
– La deuxième leçon est relative à la capacité démontrée par les Sénégalais (les forces vives sénégalaises….et même le gouvernement du Sénégal) à régler par eux-mêmes en toute responsabilité leur conflit et leur crise.
Bien évidement cela n’a pas été facile, mais quand l’amour et l’attachement francs et sincères à sa patrie sont placés au-dessus de tout, il devient possible pour les différents acteurs de se faire violence et mettre leurs égos de côté pour privilégiées les intérêts vitaux du pays.
Cela n’est pas possible quand on a des dirigeants et des acteurs qui sont obnubilés par leur ego, leur narcissisme et leurs intérêts personnels. Tant pis pour le pays.
– la troisième leçon c’est la capacité de l’élite et des intellectuels sénégalais à rester fidèles aux valeurs de la république, aux lois qui les régissent et à la démocratie.
Ils ont été en mesure de dépasser tous les paramètres partisans, claniques, affectifs, opportunistes, en défendant la vérité des lois, la vérité des valeurs et la vérité de la démocratie.
Quand on a dans un pays une telle élite et de tels intellectuels, le pays est forcément sauvé des dérives tyranniques et autoritaires.
Mais quand on a une élite et des intellectuels comme en Guinée, habitués par la lâcheté, obsédés par leurs intérêts opportunistes, animés par la volonté de jouir de leurs positions de dominants, incapables de dire les vérités qui font évidences et qui s’imposent à tous (en premier lieu à nos gouvernants !), il est évident que le.pays court à sa perte et à sa déchéance.
– La quatrième leçon que l’on peut tirer comparativement des derniers événements sénégalais, c’est qu’ils démontrent que nos peuples africains sont capables de sortir de leur résignation et de refuser l’inacceptable lorsqu’ils ont face à eux et à leur côté le leadership des gens qui restent fidèles à leurs engagements et à leurs combats, avec courage, audace et détermination.
– On peut aussi noter que cette élection peut être perçue comme la revanche du bas peuple, de la jeunesse (deux catégories sociales souvent abandonnées) contre une certaine élite et intellectuels du gouvernement et de l’establishment.
Maintenant il est trop tôt pour se prononcer sur ce que donnera la gouvernance des nouveaux dirigeants sénégalais.
L’histoire nous apprend cruellement (sauf à de rares exceptions) que les réalités de la conquête du pouvoir peuvent très souvent, malheureusement, très différentes de celles de l’exercice du pouvoir.
Mais là se trouve la beauté de la démocratie, à chaque élection, le peuple a la possibilité souveraine de sanctionner et de renvoyer.
Souhaitons le meilleur pour le peuple frère du Sénégal, et espérons que notre pays, surtout son élite et ses intellectuels auront l’audace et le courage d’être un jour enfin du côté de son peuple si abandonné et si misérable.
Mediaguinee : vous appelez donc à un dialogue pour permettre à cette transition de réussir ?
Khalifa Gassama Diaby: Je n’appelle à rien du tout, encore moins à un dialogue. Chacun est libre de faire ce qu’il veut et assumer les conséquences de ses choix. On ne peut dialoguer que dans le respect, la sincérité et l’humilité. On ne peut dialoguer que lorsque les différentes parties au dialogue sont sincèrement animées d’une réelle volonté d’aboutir à une solution heureuse et profitable à tous. Mais, Lorsque le but d’un dialogue réside dans la fourberie, la tricherie, c’est une perte de temps. Enfin pour dialoguer, il faut que les objectifs et les principes du dialogue soient définis et respectés. Vos dialogues qui ressemblent aux discussions dans la cour du roi Pétaud, n’intéresse pas les Guinéens. En tout cas moi ça ne m’intéresse pas. Je pense d’ailleurs que le concept de dialogue est devenu une diversion ridicule et permanente dans ce pays. C’est quand même grave de voir ce pays tourner le dos à ce point au sérieux et à la responsabilité !
Mediaguinee : mais monsieur le ministre, on a besoin aussi de dialogue pour la paix dans notre pays ?
KGD : la paix me dites vous? Allez ça recommence, la paix par-ci, la paix par-là…. Mais ce mot n’a aucun sens dans notre pays. Quelle paix ? La paix de quoi? Et pour qui? Si vous parlez de la paix qui permette aux puissants et aux dirigeants de continuer à sucer tranquillement le sang des Guinéens, à violenter les Guinéens, à humilier les Guinéens, à s’accaparer de ce qui revient aux Guinéens sans résistance, à maintenir les Guinéens dans leur misère et leur pauvreté sans se plaindre ni vouloir en sortir…, défendre cette paix est une lâcheté et une fumisterie pour moi. Ceux qui parlent de paix dans ces conditions sont des complices des gouvernants et des puissants. Si c’est la paix pour tous les Guinéens, laissez-moi vous faire une révélation (rire)…Les garanties de la paix dans un pays, c’est le respect de l’état de droit, c’est la justice, c’est la liberté, c’est le respect du peuple et de sa souveraineté…,c’est le bien-être social, économique des Guinéens et Guinéennes. Maintenant si vous voulez parler de cette fausse paix qu’on nous chante à longueur de temps, dans les discours, dans nos lieux de culte, c’est sans moi. Cela ne m’intéresse pas. Ce n’est que de la démagogie et de la lâcheté. Comment voulez vous parler de paix ou espérer la paix, dans un pays où le peuple est méprisé et constamment violenté et humilié par ses dirigeants ? Les plus faibles sont écrasés par les puissants ? La misère a élu domicile dans les foyers de l’écrasante majorité des guinéens ? Comment voulez-vous parler de paix dans un pays où la violence d’Etat, sous toutes formes est aveugle, sourde et arbitraire ? Les faux prophètes de paix feraient mieux de s’intéresser aux causes profondes qui menacent la paix véritable et durable dans notre pays, que de nous bassiner les oreilles avec un slogan de paix, vide de sens qui n’est qu’escroquerie. Je suis un homme de paix et de dialogue. Mais une paix juste et équitable, un dialogue sincère et sérieux.
Mediaguinee : si vous permettez, revenons sur les religieux. Il y a de plus en plus de voix qui s’élèvent contre eux pour dénoncer leur incapacité à faire plier et obtenir quelque chose du pouvoir dans le cadre d’une recherche de paix. Quel est votre regard sur ce débat ?
KGD : Écoutez, je respecte nos représentants religieux de toutes les confessions. Je crois aussi que c’est de leur faire un mauvais procès de ne pas obtenir telle ou telle chose de nos gouvernants. Ce n’est pas fondamentalement le rôle que moi j’attends d’eux. Ce que je reproche à certains de nos religieux, c’est leur manque de courage et d’engagement dans la défense des plus faibles, des plus démunis, de ceux qui sont victimes d’injustice et d’arbitraire de la part de l’Etat et des gouvernants. Ce reproche en Guinée doit être fondamentalement orienté vers la religion majoritaire du pays, qui apparaît de plus en plus comme une religion d’Etat (elle ne l’est pas!), trop imbriquée dans les fonctionnements (ou plutôt dysfonctionnements) administratifs et politiques de notre pays, au nom et au côté de l’Etat. Cette religion si elle veut se préserver pour l’avenir dans ce pays, doit sortir des grippes compromettantes d’un État immoral et injuste vis-à-vis de son peuple. La peur de Dieu doit dominer et prévaloir sur celle des hommes aussi forts, puissants et riches soient-ils. Et la défense de la justice, de la dignité humaine ,surtout des plus faibles, font partie pour moi de l’honneur et du sens de la foi religieuse. D’ailleurs, de façon générale, Intellectuellement et politiquement je suis très mal à l’aise à voir les religieux (nos religieux en l’espèce) trop s’impliquer dans les débats politiques, ni d’un côté ni de l’autre. Cette proximité des religieux et des politiques, de l’Etat me dérange profondément, en tant que laïque, libéral et démocratique.
Mediaguinee : seriez-vous intéressés pour conduire un véritable cadre de dialogue, pour sortir de cette crise et éviter d’autres crises plus graves?
KGD : Non absolument pas! Je ne suis pas intéressé. Je souhaite juste que notre pays retrouve la normalité, que l’Etat de droit soit de rigueur pour tous les Guinéens, et que chacun vaque librement et sereinement à ses occupations.
Mediaguinee : pourquoi vous ne voulez pas vous associer à cette transition monsieur le ministre ? Et pourtant il paraît que vous connaissiez bien le président de la transition, le général Mamadi Doumbouya ? Que vous êtes des frères et amis
KGD : rire… Pourquoi parlez vous au passé ? Oui je connais bien le président de la transition, on est ami et même frère. Mais là on n’est pas dans un débat de personne, de fraternité ou d’amitié. Il s’agit de la Guinée et du destin du peuple de Guinée. Moi, je ne suis pas dans les débats de personne. Cela ne m’intéresse pas. Je n’ai rien contre personne, absolument rien. Ma fraternité et mes amitiés demeurent mais elles ne sont pas au dessus ni de mes valeurs, ni de mes convictions, encore moins des intérêts de notre pays et de notre peuple. Je regarde les choses comme toujours avec mon esprit et pas avec mes sentiments ou mes affects. La question n’est pas de s’associer ou pas. L’important est que le travail soit bien fait, que les engagements soient tenus, que les intérêts vitaux de la Guinée et du peuple de Guinée soient en priorité devant les intérêts personnels et égoïstes. Quand c’est bien fait, nous serons tous les soutiens et nous serons là pour le dire et le célébrer. Dans le cas contraire, cela doit se savoir, et il doit être su que l’on ne saurait l’accepter ni le défendre. Quels que soient les liens fraternels et sentimentaux. La Guinée avant tout !
Mediaguinee : revenons à la conduite de la transition.. Êtes-vous comme la majorité des Guinéens, pressés de voir la nouvelle Constitution que le CNT à proposer aux Guinéens ?
KGD : Non, je ne suis pressé de voir rien du tout. Je n’attends rien de cette Constitution, il n’y aura rien d’extraordinaire dedans, absolument rien. Ah si peut être….on est bien en Guinée, quelques montages juridiques puérils rt ridicules pour avantager tels ou tels et pour chercher à nuire à tels ou tels… L’effort et l’énergie extraordinaire que nous mettons dans ce pays à haïr, à détester, à jalouser et à vouloir éliminer les meilleurs d’entre nous (dans tous les domaines), si nous déployons ces efforts et ces énergies pour unir nos forces et nos intelligences pour bâtir ce pays, on serait déjà très loin dans le développement de ce pays. Donc je n’attends rien de cette Constitution fantasmée, une Constitution magique qu’on nous vend depuis si longtemps, et qui est sensée être la parfaite copie de nos réalités et je ne sais quoi d’autre… Je n’ai rien à dire pour l’instant pour cette Constitution dont on parle et qu’on ne voit jamais.
Mediaguinee : vous pensez monsieur le ministre que les engagements pris par les autorités sur la présentation de cette nouvelle Constitution très prochainement, seront tenus?
KGD : Rire…! Je ne pense rien du tout. Et pour être honnête, avec nos gouvernants actuels, je ne crois absolument à aucune promesse aucun engagement, je ne crois que ce que je vois.
Mediaguinee: Que pensez-vous de l’hypothèse d’une nouvelles constitution qui donnerait la possibilité pour le président de la transition actuelle d’être candidat à la prochaine élection présidentielle ?
KGD : Rire. Écoutez, je ne commente pas l’inconcevable, l’inacceptable et l’indéfendable. C’est insensé. Pourquoi voulez-vous que je commente ça ? Je suis convaincu que le président de la transition ne se laisserait pas aller dans une telle impasse,une telle forfaiture morale et politique. Comment voulez-vous que ceux et celles qui ont dénoncé un 3ème mandat pour Alpha Condé, puissent, ne serait ce qu’imaginer la candidature d’un militaire suite à un coup d’Etat, à la présidentielle ? Comme disait l’autre, parfois » Un Homme ça s’empêche « ! Nous sommes incroyables dans ce pays. Nous prenons nos normes fondamentales comme des jouets et nos peuples comme des moutons. Nous pensons être intelligents avec des petites et ridicules ingéniosités juridiques traficotées par des experts fantômes nationaux ou internationaux. Le travail est si peu honorable, si peu défendable, que personne ne souhaite y être associé publiquement et officiellement. Tout se fait en catimini (rire). Il n’y a aucune intelligence à tromper, à trahir, à ne pas tenir ses engagements, à ne pas respecter sa parole. Il n’y a aucun honneur, aucune intelligence à jouer avec nos Constitutions. Pourquoi les autres nations démocratiques ne le font pas? Leurs dirigeants ne sont pas moins intelligents que les nôtres. Il faut respecter ce pays, respecter ce peuple et arrêter d’insulter notre intelligence ! Aucune astuce juridique, aucune tartufferie Constitutionnelle ne peut légitimer ce qui ne l’est pas et ce qui ne peut l’être. J’espère que le Président de la transition ne se laissera pas embarquer dans cette aventure périlleuse de haute trahison. Je l’espère de tout cœur pour lui et pour notre pays. Ça ne passera pas, ça ne passera jamais. Ce qui n’a pas été accepté en 2009, ce qui n’a pas été toléré pour un président civil, ne le sera pas aujourd’hui ni demain! Que cela soit dit et entendu. J’ai foi au peuple de Guinée, il ne l’acceptera jamais. Et puis apres tout, si le CNRD veut garder le pouvoir, puisqu’ils se sentent forts et puissants, qu’ils veulent et pensent pouvoir ecraser tout le monde, alors qu’ils le disent et l’assument, et épargnent nos maigres ressources financières en n’organisant pas une mascarade electorale digne de nos républiques bannières et ridicules. Gardez le pouvoir, si c’est ce que vous voulez, épargnez-nous le gaspillage de nos maigres ressources et le peu d’énergies qui nous reste.
Mediaguinee : monsieur le ministre, vous n’avez pas peur pour votre sécurité et pour vous-même ?
KGD : Non ! Je suis préparé à tout, je suis prêt à tout…je suis au courant de tout… Je sais, je sais… Le reste est entre les mains de Dieu. Autant il n’y jamais de place chez moi pour la haine, la jalousie, la rancœur, la violence…autant il n’y en a pas de place chez moi pour la peur, ni la résignation, ni l’intimidation.
Mediaguinee : au regard de l’estime, de la crédibilité et de la popularité dont vous jouissez dans ce pays, pourquoi vous ne vous lancez toujours pas en politique avec votre parti politique ?
KGD : Rire…, ce sujet n’est pas d’actualité pour moi….pour l’instant ! Rire
Mediaguinee : Donc cette forme d’engagement politique ne vous intéresse pas ?
KGD : pour l’instant, à chaque chose son temps. On dit jamais…Jamais !
Mediaguinee : monsieur le ministre, depuis des mois les médias guinéens subissent des mesures de rétorsion de la part de l’Etat, avec les conséquences pour les libertés et les emplois que vous pouvez imaginer. Que pensez-vous de cette situation ?
KGD : Je veux ici exprimer toutes mes pensées solidaires et tout mon soutien total aux médias et à la presse guinéenne, face à l’arbitraire et à l’injustice brutale qu’on leur fait vivre en ce moment. Ce qui est une honte pour notre pays. Enfin on n’est pas à une honte près pour ce pays hélas. Si un pouvoir passe son temps à faire des médias ses ennemis, à vouloir les contrôler ou les abattre et à vouloir contrôler ce qui se dit sur les réseaux sociaux, c’est que ce pouvoir n’a vraiment rien à faire…et ne sait pas quoi faire non plus. L’ensemble des Guinéens, quelles que soient leurs opinions doivent être solidaires de nos médias et doivent les défendre. Ces attaques contre les médias sont profondément choquantes, elles sont inacceptables et injustifiables. Et la HAC (Haute Autorité de la Communication) je le regrette, est devenue la main du bourreau pour signer la mort de la presse guinéenne. Mais d’ailleurs que peut-elle bien faire cette HAC, à supposer qu’elle ait l’intention de bien faire et de protéger cette profession si fondamentale pour la démocratie ? Rien pour être honnête. La HAC ne peut pas empêcher le CNRD à mettre à exécution sa volonté de détruire et de faire taire les médias guinéens, elle passera à l’acte avec ou sans la HAC, avec ou sans succès. Ce qui est triste, profondément regrettable, c’est l’incapacité de la HAC, à dire non, et à ne pas servir de caution administrative et de paravent juridique à cette volonté assassine et destructrice de la presse, des entreprises des presses, par conséquent des emplois,….de la survie des travailleurs et de leurs familles. Mais, croyez-moi c’est une vaine aventure, elle n’aboutira pas. Et je dis à la presse guinéenne de ne jamais négocier autour de sa liberté. Seules les lois de la République et les normes internationales doivent lui servir de limite et de guide. Si la presse guinéenne, face aux difficultés, cède aux chantages et tente de concéder sur sa liberté, elle sera elle même la cause de sa lente et douloureuse disparitions. Qu’elle tienne ! Qu’elle demeure professionnelle juste, responsable, rigoureuse, mais Qu’elle tienne ! La liberté finit toujours par triompher, c’est une leçon magistrale de l’histoire. Aucune presse n’est parfaite (ni en Guinée, ni ailleurs), mais elle est indispensable à nos libertés et à la démocratie. Je préfère une presse imparfaite, qu’on a le droit de critiquer dans le cadre d’un débat démocratique et respectueux, qu’une société sans presse ou avec une presse parfaite aux yeux des gouvernants et des puissants.
Mediaguinee : Quels conseils avez-vous à donner aux médias guinéens dans cette difficile épreuve ?
KGD : Les médias guinéens sont aminés par des hommes et des femmes intelligents, passionnés par leur noble métier. ils savent parfaitement bien le danger qui les guette, et sauront comment y faire face. Je ne peux que leur apporter mon total soutien, et dire aux guinéens, attention quoique vous pensez de tel ou tel média, de telle ou telle radio, de tel ou tel journaliste, si vous restez silencieux, immobiles, muets, inactifs face à cette volonté et ses actions de musellement et de destruction de la presse guinéenne, vous en paierez le plus haut prix. Vous devez soutenir la presse guinéenne dans ce combat, être à ses côtés, et ne jamais accepter l’idée qu’il revient aux gouvernants de dire c’est quoi un bon ou mauvais médias, un bon ou mauvais journaliste. C’est le commencement de l’hydre totalitaire ! Le combat ne sera certes pas facile, mais quoiqu’il en soit, la presse guinéenne a le choix entre se coucher et mourir avec déshonneur, ou alors résister, résister, dans l’honneur et la dignité nécessaire à cette belle profession. On n’assassine pas une liberté, on peut la malmener, mais elle renaît toujours plus forte des attaques assassines !
Mediaguinee : et la restriction de l’internet et l’accès aux réseaux sociaux ?
KGD : Ridicule, puérile, inacceptable, indéfendable et intenable !
Mediaguinee : avez-vous un dernier mot à dire ?
KGD : (avec un soupire de désolation et un ton grave) Je voudrais dire à ceux qui pensent qu’il sera aisé de priver ce peuple de ses libertés, de sa dignité et de sa souveraineté, ils font un très mauvais calcul. Croyez-moi, les patriotes de ce pays se battront au prix de leurs vies pour rendre à ce pays son honneur et sa dignité perdus. L’On aura peut-être leurs vies, mais jamais leur engagement et leur détermination, sans haine ni violence, à faire de la Guinée un pays normal, un pays sérieux, un pays de droits et de libertés, un pays d’humanité, tourné vers l’idéal démocratique, et vers le monde dans un esprit de fraternité et d’ouverture progressiste. Je veux ici avoir une pensée pour tous ces détenus politiques qui croupissent en prison par le fait du prince, au nom d’un combat anti-corruption qui n’est accompagné par aucun principe de droit sérieux et qui a perdu toute sa légitimité. Je ne peux pas oublier ici tous ceux et toutes celles qui ont été contraints à quitter leur pays pour un exil forcé et douloureux. Toutes mes pensées à tous ceux et toutes celles qui sont empêchés encore aujourd’hui de voyager, de travailler ou d’aller se soigner. Pour l’honneur du CNRD et la preuve de sa bonne foi ,tous ces prisonniers doivent être libérés, tous les exilés doivent rentrer dans leur pays et ceux qui sont empêchés de circuler doivent être rétablis dans leurs droits. En attendant, je leur dis à tous et à toutes, courage et de tenir. Car à défaut de la justice des Hommes, celle de la Providence ne manque jamais son rendez-vous ! On ne peut pas rendre la justice avec l’épée de l’injustice et de l’arbitraire. « L’extrême espèce d’injustice, selon Platon, c’est que ce qui est injuste soit tenu pour juste ». Nous vivons un moment extrêmement crucial pour notre pays et au-delà pour notre sous-région. Il faut sauver la démocratie, il faut absolument sauver notre ideal démocratique et nos Etats fragiles des tentations tyranniques et messianiques. Nos vies en dépendent, notre destin collectif aussi !
Mediaguinee : Merci monsieur le ministre Gassama Diaby pour votre disponibilité et l’honneur que vous nous faites de nous donner cette interview exclusive après un long silence. Mediaguinee et toute son équipe vous remercient.
KGD : merci à vous! Il est important rappeler à noses frères et sœurs du CNRD, en toute fraternité, mais avec clarté et solennité…Que nous sommes des hommes et des femmes libres dans ce pays, nous sommes un peuple certes patient et parfois résilient mais qui demeure un peuple de liberté, un peuple vigilant malgré les apparences, malgré toutes les souffrances qui s’abattent sur lui. Il n’est donc pas envisageable, il n’est pas acceptable qu’on nous soumette aux diktats des caprices et des désirs illégitimes. A un moment donné, assez deviendra trop ! Nous sommes de fils et filles d’une même terre, il est temps, dans le respect et la fraternité qu’on passe à des choses sérieuses et qu’on laisse ce pays et ce peuple respirer et jouir du vent de la liberté, de la justice et un peu de bien-être… enfin….!!! Le chemin de notre notre dignité commune, de notre honneur collectif, de la paix pour tous réside dans la légalité, la justice, la liberté, le respect du peuple et de sa souveraineté, la rigueur, la responsabilité et l’esprit patriotique honnête. C’est la seule voie pour redresser ce pays et lui donner sa place dans le concert des nations démocratiques. C’est un conseil bien fraternel./.
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