Une Loi Controversée pour Encadrer la Société Civile

L’Assemblée ivoirienne vote une loi pour encadrer les ONG. Simple transparence ou atteinte aux libertés ? Les dessous d’un texte explosif à 7 mois de la présidentielle…

Imaginez un pays où chaque association, chaque voix citoyenne, doit rendre des comptes sous l’œil vigilant de l’État. En Côte d’Ivoire, ce scénario est devenu réalité mercredi dernier avec l’adoption d’une loi qui fait trembler les défenseurs des libertés. À sept mois d’une élection présidentielle cruciale, cette décision divise : mesure de sécurité ou entrave déguisée à la société civile ? Plongez dans les méandres d’un texte qui pourrait redessiner les contours de la démocratie ivoirienne.

Un Vote qui Fait Écho dans une Actualité Tendue

Mercredi, l’Assemblée nationale ivoirienne a donné son feu vert à une loi visant à encadrer les organisations de la société civile. Avec 100 voix pour et 31 contre, le texte, initialement une ordonnance du président datée de juin 2024, a été ratifié sans possibilité de modification par les députés. Une procédure qui, déjà, soulève des questions sur la transparence du processus législatif.

Un Objectif Affiché : Contrôle et Sécurité

Officiellement, cette loi cherche à réguler la création et le fonctionnement des associations. Les autorités mettent en avant des impératifs sécuritaires : lutte contre le **blanchiment d’argent**, le **financement du terrorisme** et même la prolifération d’armes lourdes. Des termes forts, qui résonnent dans un contexte régional marqué par l’instabilité.

Concrètement, les associations devront désormais soumettre un rapport annuel d’activités à une autorité locale. Une mesure qui, selon un député du parti au pouvoir, permettrait de mieux catégoriser des structures ayant évolué depuis la législation de 1960. Mais pour beaucoup, cette justification cache une volonté de surveillance accrue.

Il s’agit de transparence, pas d’intrusion.

– Un porte-parole gouvernemental, mi-mars

Une Opposition en Alerte

Face à ce texte, l’opposition n’a pas tardé à réagir. Qualifié de **liberticide** par un député du principal parti adverse, il a été adopté sans débat, en l’absence des représentants d’un ancien président emblématique, aujourd’hui au cœur d’une bataille électorale. Ces derniers dénoncent une manœuvre politique, surtout à l’approche d’un scrutin décisif en 2025.

Les critiques ne s’arrêtent pas là. Lors d’une récente évaluation des droits humains par les Nations unies, plusieurs pays ont exprimé leur inquiétude, appelant à protéger les défenseurs des droits plutôt que de les entraver. Un contraste saisissant avec les arguments officiels.

Les Associations dans le Viseur

Ce qui choque, c’est la portée de cette loi. Les associations religieuses, par exemple, sont pointées comme des sources potentielles de fonds pour le terrorisme, même sans lien criminel avéré. Une généralisation qui inquiète les acteurs de terrain, déjà mobilisés depuis l’annonce de l’ordonnance en juin 2024.

  • Rapport annuel obligatoire pour toutes les associations.
  • Sanctions possibles pour objectifs jugés illicites.
  • Contrôle renforcé sur les dons et financements.

Pour les petites structures, souvent animées par des bénévoles, ces obligations pourraient devenir un fardeau. Certains y voient une tentative de museler les voix dissidentes sous couvert de régulation.

Un Contexte Politique Explosif

À sept mois de l’élection présidentielle, cette loi ne passe pas inaperçue. L’opposition y décèle une stratégie pour affaiblir ses soutiens dans la société civile, un acteur clé dans les mobilisations électorales. D’autant que le texte doit encore être validé par le Sénat, une étape dont la date reste floue, ajoutant à la tension ambiante.

D’après une source proche du dossier, le timing n’est pas anodin. Avec un ancien leader politique radié des listes électorales suite à une condamnation, chaque décision législative devient un levier dans cette course au pouvoir.

Entre Sécurité et Liberté : Le Grand Écart

Le gouvernement assure que cette loi n’a rien d’une intrusion. Pourtant, les termes employés – **menace sécuritaire**, **économique**, **sociale** – restent vagues, laissant une large marge d’interprétation aux autorités. Un flou qui pourrait servir à cibler des associations gênantes.

Objectif Mesure Critique
Lutte antiterroriste Contrôle des dons Atteinte aux libertés
Transparence Rapport annuel Surcharge administrative

Ce grand écart entre sécurité et liberté est au cœur du débat. Si la menace terroriste est réelle dans la région, est-ce une raison suffisante pour encadrer ainsi la société civile ? Les avis divergent, et les prochains mois seront décisifs.

Un Regard International qui Compte

En novembre dernier, lors d’un examen des Nations unies, plusieurs États ont interpellé la Côte d’Ivoire. Leur message : renforcer les droits humains, pas les restrictions. Une pression internationale qui pourrait influencer le sort de cette loi au Sénat, ou du moins alimenter le débat public.

Pour les observateurs, cette attention mondiale est un signal. Dans un pays où la société civile a souvent joué un rôle de contrepoids, son encadrement pourrait fragiliser un équilibre déjà précaire.

Et Après ? Les Enjeux à Venir

Que réserve l’avenir ? Si le Sénat valide ce texte, les associations devront s’adapter rapidement. Mais les opposants promettent de ne pas baisser les bras. Entre manifestations, recours juridiques et mobilisation citoyenne, la bataille ne fait que commencer.

À l’approche de 2025, chaque décision compte. Cette loi, au-delà de son contenu, est un test pour la démocratie ivoirienne. Sécurité ou contrôle, transparence ou censure : le verdict, lui, appartient autant aux citoyens qu’aux urnes.

Une chose est sûre : dans ce climat tendu, chaque voix compte. La société civile saura-t-elle se faire entendre malgré les chaînes ?

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