Une promesse brisée, une rupture avec l’ère Higgs

Le ministre des Finances, René Legacy, a déposé son premier budget, mardi. Son message est simple: les besoins sont immenses et il ne sera pas possible de trouver des solutions sans d’importants déficits. Plus qu’une promesse brisée, il s’agit d’une rupture avec la méthode Blaine Higgs rejetée par les électeurs.

Le gouvernement Holt prévoit terminer la prochaine année financière avec un déficit qui pourrait atteindre 599 millions $ et rester dans le rouge pendant la durée de son mandat. Au total, plus de 3 milliards $ s’ajouteront à la dette publique, qui totalise environ 12,5 milliards $.

Ce n’est pas de la petite monnaie, d’autant plus que la santé économique de la province pourrait se détériorer en raison des droits de douane américains.

Nous n’apprécions pas que les libéraux brisent de cette façon une promesse aussi importante. Ils s’étaient engagés noir sur blanc dans leur programme électoral à réaliser des surplus pendant chaque année de leur mandat. Il n’a jamais été question de le faire seulement si la situation économique le permet ou en fonction des besoins les plus pressants. On s’étonnera ensuite du niveau de cynisme de la population à l’endroit des «promesses de politiciens».

S’il y a un moment pour faire passer la pilule, c’est bien en début de mandat. Les libéraux préfèrent annoncer des déficits jusqu’en 2029 plutôt que d’imposer le suspens chaque année. Politiquement, c’est une bonne stratégie.

Nous sommes rassurés de voir que le ministre Legacy a présenté un plan visant à ne pas perdre le contrôle des finances publiques. Selon ses prévisions, le déficit diminuera chaque année pour atteindre 144 millions $ en 2028-2029, une somme qui n’a rien de dramatique. Reste à voir s’il maintiendra le cap. C’est plus facile à dire qu’à faire. Pendant ses neuf années au pouvoir, le gouvernement fédéral de Justin Trudeau a présenté des projections qu’il n’a jamais respectées…

Le ministre Legacy fait le pari que pour une bonne partie de la population, obtenir de meilleurs services a plus d’importance que de réduire la dette publique. Il n’a pas tort. Après six ans d’un gouvernement obsédé par cette vision, les électeurs ont voté pour le changement. Oui à l’équilibre budgétaire, mais pas au point de sacrifier tout le reste.

En 2024, le gouvernement Higgs a présenté un budget que nous avons qualifié en éditorial de «sans déficit, sans vision et sans solution». En 2023, nous avons critiqué «un mauvais budget d’un gouvernement insensible».

Le gouvernement Holt fait tout le contraire. Il ne baisse pas les bras devant l’ampleur des défis auxquels fait face le Nouveau-Brunswick, ce qui se reflète par la création d’une multitude d’initiatives – certaines coûteuses, d’autres moins – qui auront un impact positif.

Un exemple parmi d’autres: une unité spécialisée dans la traite de personnes sera créée. Il s’agit du genre d’initiatives qui ne vaudra aucun vote supplémentaire aux libéraux lors des prochaines élections, mais qui pourrait contribuer à sauver des vies. Dans la même veine, des fonds sont prévus pour les maisons de transition.

Sans surprise, le gros des dépenses est réservé à la Santé. Le budget du ministère atteint

4,1 milliards $ par année. Il n’augmentera que de 1,9% par rapport à ce qui a été dépensé l’année dernière. Ce n’est pas la mer à boire.

Le ministre Legacy a néanmoins trouvé le moyen de dégager des sous pour de modestes initiatives que nous applaudissons. Parmi celles-ci, le financement de tests de dépistage du VPH (pour détecter le cancer du col de l’utérus) et d’un cycle de fécondation in vitro par ménage. Il va aussi de l’avant avec l’une des principales promesses de son gouvernement, soit la création de 30 cliniques collaboratives.

Ce budget n’est pas ambitieux. On ne sent pas à travers celui-ci un effort visant à transformer le N.-B. Le message d’espoir qui a porté Susan Holt au pouvoir a été rattrapé par la réalité. Le gouvernement libéral n’a pas les moyens de toutes ses ambitions, même avec un budget lourdement déficitaire.

Nous estimons toutefois qu’il se dirige dans la bonne direction. Une opinion d’ailleurs partagée par des représentants de la société civile, lesquels ont fait preuve d’optimisme à la suite du dépôt du budget, même s’ils espéraient de meilleures nouvelles.

Si (et c’est un gros si) le gouvernement Holt possède suffisamment de discipline pour respecter ses propres balises en matière de contrôle budgétaire, il fait un pari gagnant en privilégiant les besoins les plus urgents. Quand le toit coule et que le réfrigérateur est vide, ce n’est pas le moment d’accélérer le remboursement de l’hypothèque.

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