vingt-cinq soldats condamnés à mort pour désertion

C’est une sentence exceptionnelle qui a été rendue, mercredi 3 juillet, par la justice de la République démocratique du Congo (RDC). À l’issue d’un procès en « flagrance » (comparution immédiate) d’à peine une journée, le tribunal militaire de Butembo (Nord-Kivu) a condamné à mort 25 militaires congolais. Six autres prévenus ont été relâchés « faute de preuve » . Tous étaient poursuivis pour « fuite devant l’ennemi »,« dissipation de munitions de guerre », « violation des consignes » et « vol », à la suite des récents combats qui ont opposé les forces armées congolaises (FAR) aux rebelles du M23, dans le Lubero.

Depuis la fin du mois de mai, le M23, soutenu par le Rwanda, étend son emprise dans cette région du Nord-Kivu, sans que les FAR et ses supplétifs miliciens ne réussissent à le contenir. La semaine dernière, après de longs et violents combats, le groupe rebelle s’est même emparé de la ville stratégique de Kanyabayonga, lui ouvrant l’axe routier en direction de Butembo, l’une des villes les plus importantes du Nord-Kivu avec ses deux millions d’habitants.

Vague d’arrestations pour « trahison »

La prise de Kanyabayonga a nourri, une nouvelle fois, les soupçons et les accusations de trahison au sein de l’armée. Un phénomène qui ne cesse de prendre de l’ampleur depuis des mois en RDC, entraînant des vagues d’arrestations parmi les militaires, y compris des officiers supérieurs, mais aussi des députés, des sénateurs et des personnalités du monde économique dans l’est de la RDC. Tous sont accusés d’être des infiltrés ou des complices du M23. Leur nombre n’est pas rendu public, les autorités préférant cultiver le flou dans ce dossier.

Un exemple, parmi d’autres, avec la déclaration fracassante du général Christian Tshiwewe Songesha, le chef d’état-major, lors d’une parade militaire, le 15 avril, à Kinshasa : « Nous sommes en guerre. Il y a ceux parmi nous qui sont corrompus et ont incité à la trahison, parfois par nos propres politiciens. Des arrestations ont été effectuées à Lubumbashi et ici à Kinshasa. C’est grave. »

Devant les unités de l’armée et de la police, il s’est toutefois bien gardé d’en préciser le nombre. Le 8 mars, les services des renseignements avaient présenté à Kinshasa cinq civils présumés collaborateurs du M23 dans la ville de Goma, la capitale provinciale du Nord-Kivu. Parmi eux, deux anciens députés dont les identités, cette fois, avaient bien été communiquées.

Accents paranoïaques

C’est dans ce climat aux accents paranoïaques qu’au mois de mars, Kinshasa a décidé de lever son moratoire – observé depuis 2003 – sur l’exécution de la peine de mort pour les militaires condamnés pour intelligence avec l’ennemi. Les circonstances l’ont imposé, se sont justifié les autorités congolaises. Cette décision avait toutefois soulevé la réprobation des ONG de défense des droits humains comme Trial international pour qui « cette mesure par sa nature irréversible est particulièrement inquiétante dans un pays où la justice présente de nombreux dysfonctionnements dont le Président de la République s’est plaint lui-même en ce début d’année ».

Près de deux mois après la levée du moratoire, huit militaires ont été condamnés à mort, en mai à Goma, pour « lâcheté » et « fuite devant l’ennemi ». Avec le jugement collectif du 3 juillet et la détérioration sécuritaire du Nord-Kivu, tout indique que ces jugements de militaires « pour traîtrise », « fuite devant l’ennemi », « dissipation de munitions de guerre » vont s’amplifier au risque de renforcer, non pas la loyauté, mais la défiance envers Kinshasa de la part des soldats loyalistes envoyés combattre le M23.

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