Violences sexuelles et harcèlement: encore des témoignages effarants à Saint-Dominique de Neuilly

Main dans la culotte, harcèlements… Les nouveaux témoignages publiés sur le groupe Facebook Témoignages Institution Saint-Dominique de Neuilly, créé le 5 mars, sont glaçants. À l’image de celui de cette ancienne élève, qui prend la parole plus d’un demi-siècle après sa scolarisation à l’institution, de 1968 à 1972. Elle évoque les abus sexuels dont elle aurait été victime, à répétition, de la part de l’aumônier de l’époque, le père D.

« Il se permettait de me prendre sur ses genoux, de me caresser les cuisses, le dos et les seins, puis de mettre sa main dans ma culotte », écrit-elle. Cela se passait pendant les confessions, obligatoires à l’époque pour les élèves du collège. La pièce, située dans un souterrain reliant deux bâtiments, était isolée, loin de tout regard. Le prêtre y officiait derrière un simple panneau en bois. Avant cela, il vérifiait que je n’avais pas mes règles en plongeant son regard dans ma culotte.»

Tétanisée, elle ne parle à personne. « Il était tranquille. Cette agression était rituelle et rien ni personne ne pouvait la découvrir. » A ce jour, ce récit est le seul concernant cette période, mais l’ancienne élève s’interroge a « peine à croire » qu’elle a été la seule à subir ce traitement.

« Je pense que tout le savait »

Entre 1 997 et 2 000 à Saint-Dominique, Mathieu, qui souffre d’une malformation de naissance à la main gauche est harcelé. Dans les couloirs, en classe, à la cantine, des camarades l’humilient, le brutalisent. Il tente d’alerter les adultes. « Les responsables éducatifs n’ont jamais réagi, malgré ses demandes répétées », déplore aujourd’hui son père, Philippe.

Pour échapper à ses harceleurs, Mathieu trouve refuge sous un escalier ou auprès du père M., un prêtre de l’établissement. Ce n’est que des années plus tard qu’il racontera à ses parents les violences subies, en particulier un viol commis par plusieurs camarades, au sein même de l’institution. Son père témoigne aujourd’hui pour « laisser les responsables face à leur conscience » et rendre hommage à son fils, qui est décédé en 2022.

Longtemps, les adultes de l’établissement sont restés silencieux. Mais, depuis la création de ce collectif, début mars, après que l’affaire Bétharram a rebondi à Neuilly, certains décident de parler. Catherine Rocroy a été directrice des affaires financières de l’établissement entre 1998 et 2012. Elle n’a « rien soupçonné », assure-t-elle. Mais en lisant les témoignages partagés récemment, elle exprime son malaise. « Je ne peux pas m’associer à des adultes qui savaient et qui n’ont rien fait. Je me sens coupable de ne pas avoir cherché plus loin. ». Evoquant aussi « la pression entre adultes », elle ajoute : « Je pense que tout le monde savait, surtout maintenant que je découvre ce que les anciens élèves racontent. »

« Enfants tirés par les cheveux, oreilles tirées, coups sur la tête… »

Depuis sa création, le groupe Facebook est devenu un lieu de libération de la parole où, chaque jour, certains s’expriment publiquement, d’autres anonymement.

« Dans ma famille, entre 1968 et 2000, nous sommes tous passés par la classe de Mademoiselle B. Nous avons tous connu les mêmes violences : enfants tirés par les cheveux, oreilles tirées, petits ou gros coups sur la tête, humiliations sans avertissement », écrit un ancien élève.

Un autre se souvient d’une classe de neige en 1982, où « Mademoiselle B. nous a fait prendre la douche à deux par douche, un garçon et une fille. Elle était dans l’encadrement de la porte et nous regardait. » D’autres parlent de coups de poing assenés avec des trousseaux de clés, de cris, d’humiliations publiques.

Le recteur annonce une inspection de l’établissement

Ouvert aux victimes, aux témoins mais aussi aux proches, cet espace de parole est organisé et modéré par Constance Bertrand, ancienne élève de l’établissement dans les années 1990. Jeudi dernier, elle était auditionnée par la commission d’enquête parlementaire sur les violences à l’école où elle a présenté le collectif et son travail de recueil. À ce jour, une cinquantaine de témoignages ont été comptabilisés. Les signalements adressés au parquet font l’objet de vérifications dans le cadre d’une enquête préliminaire menée par la Sûreté territoriale.

Ce lundi 24 mars, le recteur de l’académie de Versailles a adressé un courrier aux familles pour annoncer une inspection de l’établissement et rappeler les dispositifs d’écoute des victimes ou témoins. Une adresse mail spécifique ainsi qu’un numéro vert ont été communiqués, dans le cadre du plan national « Brisons le silence, agissons ensemble ».

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