Dans les rues de Cotonou, comme dans d’autres villes du pays, rares sont les Béninois qui se souviennent encore de la Conférence nationale des forces vives de 1990.
Pris par les défis du quotidien, beaucoup semblent avoir oublié cet événement fondateur qui a permis au Bénin d’embrasser une nouvelle voie démocratique. Pourtant, cette conférence, première du genre en Afrique, reste un modèle de transition pacifique.
Un tournant historique
« On est dans le contexte de la chute du mur de Berlin, où les soutiens internationaux et idéologiques sur lesquels aurait pu compter le régime s’effondraient en interne. La colonne vertébrale du régime, l’armée elle-même, a annoncé sa décision de se retirer de la vie politique et de retourner aux casernes, une position réaffirmée au cours de la Conférence et qui a été respectée. Il faut les en féliciter… », a rappelé Joël Atayi Guèdègbé, expert en gouvernance politique et acteur de la société civile.
Mais pour Ébénézer Sédégan, enseignant-chercheur au département d’histoire et d’archéologie de l’Université d’Abomey-Calavi, cette conférence n’était pas un événement isolé : « On a assisté à un régime liberticide. Aller à la Conférence, c’était aller à la recherche de la liberté, de l’unité nationale et de la paix. »
Un processus de longue haleine, comme le souligne Joël Atayi Guèdègbé : « Ce n’a pas été une génération spontanée, mais le fruit d’un processus long, marqué par des luttes, des revendications et des solutions imaginées pour faire avancer notre pays. »
Un héritage remis en question ?
Trois décennies plus tard, que reste-t-il de cet héritage ? Sur le plan institutionnel, le Bénin a conservé de nombreux acquis fondamentaux, comme une Constitution solide, des élections régulières et une alternance politique respectée.
Cependant, certaines réformes récentes suscitent des critiques, notamment en raison de leur impact perçu comme restrictif sur les libertés et la démocratie.
« Nous sommes à une étape où les différentes couches de la société doivent s’asseoir et discuter du futur, qui doit allier démocratie et développement. Aujourd’hui, avec les résultats atteints en dix ans, on ne peut plus dissocier ces deux aspects. Il faudra peut-être quelques réajustements pour assurer un avenir serein aux générations futures », a estimé, l’analyste politique Eugène Allosoukpo en analysant les tensions actuelles dans le pays.
Alors que le Bénin célèbre les 35 ans de la Conférence nationale, le débat est ouvert sur la manière d’adapter son héritage aux enjeux actuels, sans renier les principes fondateurs qui ont fait du pays un modèle d’alternance démocratique en Afrique.
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